Dès sa naissance, Paulo Henrique Machado a été touché par une paralysie liée à une poliomyélite. Sa mère meurt deux jours après l’accouchement. Depuis l’homme vit constamment relié à un respirateur. Son univers, c’est l’hôpital. « J’ai exploré de long en large tous les couloirs, en rentrant dans les chambres des autres enfants qui étaient ici. C’est comme ça que j’ai découvert mon univers », a-t-il confié à la BBC.
Plusieurs enfants sont, avec Paulo, hospitalisés pendant des années, des suites de polio. « C’était très triste de voir tous ces enfants, immobiles dans leur lit, ne pouvant à peine bouger », témoigne Ligia Marcia Fizeto, une des infirmières qui s’est occupée de Paulo peu de temps après son arrivée à l’hôpital. Dans les années 1970, on donne à ces enfants une dizaine d’années d’espérance de vie.
« Chaque perte était comme une mutilation »
Paulo se fait donc des amis, à l’hôpital. « Il y avait moi, Eliana, Pedrinho, Anderson, Claudia, Luciana et Tania. Ils étaient aussi là pour un bout de temps, au moins dix ans. » Mais au fil du temps et des conséquences des maladies, Paulo perd peu à peu ses camarades. « C’était très difficile, chaque perte était comme un démembrement, une mutilation », regrette-t-il. Aujourd’hui, ils ne sont plus que deux à avoir survécu : Eliana et lui.
Les médecins ne comprennent pas pourquoi eux seuls restent en vie. Chaque jour, ils se lèvent dans la même chambre et passent leur journée ensemble. « Certaines personnes pensent que nous sommes mari et femme, mais nous sommes plus comme frère et sœur. Chaque jour, quand je me réveille, je suis sûr que ma force est là – c’est Eliana. C’est réciproque : je lui fais confiance, elle me fait confiance », explique Paulo.
La mer pour la première fois
A cause du risque d’infection, les deux amis doivent rester à l’hôpital. Leurs déplacements sont très rares. Ces dernières années, Paulo estime être sorti environ 50 fois de l’hôpital. « Il y a des voyages qu’on n’oublie pas, comme quand j’ai vu la mer pour la première fois, à 32 ans. J’ai ouvert la portière, j’ai vu la mer, et j’ai pensé WOW » raconte Paulo. Eliana aussi a vu la mer pour la première fois ce jour-là. Elle se souvient du moment où elle a effleuré l’eau avec ses doigts : « Vous appréciez ces petits moments que beaucoup prennent pour acquis. Tout le monde ne s’arrête pas pour s’émerveiller comme nous. »
Malgré sa maladie et sa vie à part, Paulo est infographiste. De son côté Eliana écrit (elle a même publié un ouvrage) et peint, avec sa bouche. Mais l’homme a une autre ambition : réaliser une série télévisée d’animation en 3D à partir de son histoire et de celle d’Eliana, aussi appelée Leca. « Je pense que mes personnages sont réalistes, parce qu’ils sont inventés par quelqu’un qui est lui-même handicapé. Je sais exactement quelles difficultés ils rencontrent », explique Paulo. En mai dernier, il a d’ailleurs réussi à récolter 65.000 dollars pour ce projet qui devrait s’appeler « Les Aventures de Leca et de ses amis ».