ABDOU DIOUF, SECRETAIRE GENERAL DE L’OIF

«Personne ne pourra faire cavalier seul face aux changements en cours»


Langue française, éducation, élections, démocratie, développement, mondialisation, justice, «printemps arabe», Conseil de sécurité de l'ONU... Le secrétaire général de la Francophonie n'a évité aucun sujet dans le long entretien qu'il a accordé à "Notre Afrik". De la situation postélectorale en République démocratique du Congo où doit se tenir le 14e sommet de l'organisation cette année, en passant par la Côte d'Ivoire, l'affaire Hissène Habré, l'ancien président sénégalais a abordé les sujets brûlants de l'actualité africaine, même s'il se refuse toujours à émettre le moindre commentaire sur son propre pays. Elu à la tête de l'Organisation internationale de la Francophonie lors du Sommet de Beyrouth, en 2002, puis réélu à deux reprises, Abdou Diouf avait dirigé le Sénégal de 1981 à 2000 après avoir été, pendant onze ans, Premier ministre du président Léopold Sédar Senghor.

 

Notre Afrik: La Journée internationale de la Francophonie est célébrée le 20 mars de chaque année. Quelle signification donnez-vous à la célébration de cette année, marquée par des crises de toutes sortes, notamment sur les plans économique et financier?

Abdou Diouf: Depuis 2007-2008, nous vivons une crise globale. Même si la plupart des gens n'avaient pas tout de suite mesuré l'ampleur des problèmes, il était clair que la crise ne se résoudrait pas en deux ou trois ans, parce qu'elle touche les structures mêmes de l'économie, le rôle de la finance dans le capitalisme et désormais le modèle même de croissance dans lequel nous vivons. Cette année, en célébrant la Journée de la Francophonie, donc en rappelant les valeurs de la Francophonie, je voudrais inviter tous ceux qui nous accompagnent à réfléchir à tout ce que signifie la solidarité: personne ne pourra jouer cavalier seul face aux changements en cours; personne ne peut espérer éviter ces changements. Mais nous devons être de ceux qui les inspirent et qui tracent une voie vers un monde meilleur et plus équilibré, non vers un monde plus concurrentiel et entraînant plus d'exclusion et de fragmentation.

Quel regard portez-vous sur la situation politique en République démocratique du Congo où doit se tenir, du 12 au 14 octobre prochain, le XIVe Sommet de la Francophonie. Envisagez-vous une éventuelle «délocalisation» du sommet, si la tension postélectorale devait persister ?

Les élections présidentielle et législatives du 28 novembre 2011 en RDC avaient pour objectif de contribuer à la consolidation de la paix et de la démocratie dans ce pays. Elles ont été marquées par un certain nombre de difficultés clairement constatées par les observateurs, à la fois en amont des scrutins, mais aussi, concernant les élections législatives, en aval, dans le traitement des résultats. Nous sommes en train d'évaluer l'ensemble de ce processus qui n'est pas achevé puisque d'autres échéances électorales sont prévues. Mon rôle à ce stade est de suivre avec attention les conditions dans lesquelles se déroulent les préparatifs du Sommet et d'écouter nos Etats et gouvernements membres qui s'exprimeront certainement lors des prochaines réunions de nos instances.

Comment réagissez-vous à la démarche d'Etienne Tshisekedi, arrivé second à la présidentielle, qui s'est autoproclamé président de la République ? Avez-vous parlé aux différents acteurs politiques congolais ?

Je constate que les électeurs congolais, en participant massivement à ces élections, ont voulu exprimer leur volonté de voir progresser la démocratie. Et je me félicite qu'Etienne Tshisekedi et ses partisans aient pris part à ces élections. Néanmoins, j'ai dit et répété dans de nombreuses circonstances, et notamment en ce qui concerne les élections congolaises, que l'unique voie à suivre pour toute contestation des résultats consistait à recourir aux seules voies légales. J'ai bien noté les difficultés rencontrées dans le traitement du contentieux. Il faut à présent trouver des solutions respectueuses des principes de l'Etat de droit pour faire prévaloir la paix, éviter toute violence et s'engager plus résolument dans la consolidation de la démocratie. Bien entendu, nous échangeons régulièrement non seulement avec tous les acteurs politiques congolais, mais aussi avec les représentants de la société civile.

Que faire pour éviter les tensions postélectorales sur le continent ?

La généralisation des élections, devenues la norme de la vie politique nationale, est une avancée indéniable de la démocratie telle qu'elle est clairement formulée dans la Déclaration de Bamako, sous réserve que les élections se déroulent de manière libre, fiable et transparente. Il n'en demeure pas moins que les consultations électorales ont constitué des moments de tensions dans plusieurs de nos pays membres, et ont provoqué, dans certains cas, de réelles crises politiques. Nous avons constaté qu'à l'origine de ces crises électorales, il y avait généralement une mauvaise préparation des élections, et que celle-ci était souvent engagée à la dernière minute. L'approche de la Francophonie consiste donc à essayer de promouvoir une meilleure maîtrise des processus électoraux par les acteurs nationaux. Dans cette perspective, nous avons récemment mis en place le Réseau des compétences électorales francophones (Recef), qui regroupe les différentes structures électorales francophones. Le Recef développe notamment des instruments en appui à la réalisation des étapes particulièrement délicates des processus électoraux comme la révision des textes électoraux, la constitution des listes électorales, ou encore la gestion du contentieux.

Comment réagissez-vous aux critiques adressées aux missions d'observation électorale de l'OIF sur le continent ?

Cela fait maintenant plus de 20 ans que notre organisation s'est engagée dans l'observation électorale. Force est de constater que l'observation classique a aujourd'hui atteint ses limites et qu'il est nécessaire de renouveler les approches. Pour sa part, la Francophonie privilégie désormais l'accompagnement des acteurs impliqués dans les processus électoraux en déployant des actions de soutien et d'expertise en amont, sur la durée et dans une logique d'appropriation nationale, et s'attache à favoriser le développement de l'observation nationale. C'est de cette manière que nous avons procédé en République démocratique du Congo, où l'OIF n'a pas déployé de mission d'observation proprement dite. Nous avons choisi d'appuyer le renforcement des capacités des institutions chargées d'examiner les contentieux des élections et de dépêcher une mission d'évaluation électorale composée d'une dizaine d'experts de haut niveau.

«Francophonie, enjeux environnementaux et économiques face à la gouvernance mondiale.» Qu'est-ce qui guide le choix d'un tel thème pour le Sommet de Kinshasa ?

Vous remarquerez que ce thème touche directement les questions qui se posent à la communauté internationale et qui vont être débattues en juin prochain lors de la Conférence Rio+20. C'est le pays hôte du Sommet qui propose le thème à l'ensemble des pays francophones. Il est donc normal qu'il choisisse un thème en phase avec les préoccupations du moment, puisque la Francophonie se veut active et présente dans les grands débats qui organisent l'évolution de notre monde. Vous remarquerez aussi que par rapport au Sommet de Québec, qui a été le premier sommet francophone à s'attacher très profondément à la place et au devenir de la langue française, le Sommet de Kinshasa va s'attacher à l'ensemble des aspects économiques et environnementaux de la situation actuelle et surtout s'interroger sur les modalités d'une nouvelle gouvernance mondiale. Face à la crise globale que nous traversons, face à des changements sans doute inéluctables dans les modes de production et de consommation, face à la nécessité d'impliquer toute la société dans l'adoption de nouveaux modèles, la Francophonie n'hésite pas à afficher son ambition de contribuer à la mise au point de solutions innovantes.

Avec le recul, comment analysez-vous la crise postélectorale ivoirienne ? Votre fermeté - «II n'y a pas en Côte d'Ivoire d'autre issue que le départ du sortant Laurent Gbagbo», aviez-vous déclaré - signifie-t-elle la fin de l'impunité à l'égard de ceux gui ne respectent pas les règles de la démocratie ?

Je retiens d'abord que la communauté internationale a su faire preuve d'autorité et de convergence face à cette crise ivoirienne causée par le refus du président sortant de reconnaître les résultats de l'élection présidentielle. Notre fermeté était au service de la démocratie et visait à rappeler qu'on ne peut transiger avec elle. Je regrette profondément que cette crise ait été marquée par de nombreuses exactions et violations des droits de l'Homme.

Le temps est désormais celui de la justice et de la réconciliation. Les Ivoiriens doivent se tourner résolument vers l'avenir, dans un esprit d'unité et de pardon, tout en insistant sur les impératifs de la lutte contre l'impunité, le respect des droits, de la dignité et des libertés. Lors de ma visite à Abidjan en août dernier, j'ai pu apprécier les efforts conduits en ce sens par le président Alassane Ouattara et son équipe. Je constate en outre qu'il a su organiser sans tarder des élections législatives et que celles-ci se sont déroulées dans de bonnes conditions. Il faut que ce travail de renforcement de l'Etat de droit et de la démocratie se poursuive.

L'ancien président ivoirien a été transféré à la Cour pénale internationale de La Haye. Ce que d'aucuns considèrent comme une injustice. Que leur répondez-vous ?

Ce sont les autorités ivoiriennes qui ont saisi la Cour pénale internationale qui s'est déclarée compétente. La CPI conduit son travail en bonne intelligence avec les autorités judiciaires ivoiriennes. Cette décision du gouvernement Ouattara d'en appeler à une instance extérieure pour traiter des événements postélectoraux s'explique, je crois, par le souci de ne pas être accusé de rendre une justice des vainqueurs. Parallèlement, les autorités ivoiriennes ont mis en place une Commission nationale d'enquête sur ces mêmes événements; les résultats de ces investigations conduiront la justice ivoirienne à juger les responsables de crimes et violences commis durant la période, quelle que soit l'appartenance politique de ceux-ci.

Il y a aussi le cas de l'ancien président tchadien Hissène Habré. Estimez-vous important qu'il soit jugé et que le Sénégal devrait l'extrader vers la Belgique comme le demandent les parties civiles ?

Je me félicite des progrès accomplis aujourd'hui dans les efforts de lutte contre l'impunité. La justice pénale internationale progresse, et c'est une bonne chose. Concernant Hissène Habré, l'Union africaine a pris des engagements. Elle doit se mobiliser pour trouver une solution pour qu'un procès équitable puisse être organisé.

Quelle lecture faites-vous de l'évolution politique des pays du monde arabe, notamment ceux du continent comme la Tunisie, l'Egypte, la Libye ?

Les mouvements populaires qui ont émergé dans la région, et en particulier dans deux Etats membres de la Francophonie, la Tunisie et l'Egypte, nous ont évidemment interpellés. Le vent de révolte qui a soufflé sur le monde arabe a été aussi soudain, puissant, qu'inattendu. Une nouvelle page de l'histoire de cette région s'est tournée. L'effervescence des mouvements populaires a laissé place aux processus de transition politique qui constituent des étapes décisives et exigeantes. Il nous faut demeurer à la fois solidaires et attentifs pour faire progresser la démocratie et la restauration de l'Etat de droit.

Ces mouvements, dits «Printemps arabe», ne sont-ils pas finalement la solution pour se débarrasser des régimes dictatoriaux sur le continent ?

Ces mouvements populaires ont été spontanés et portés majoritairement par une jeunesse qui se sentait exclue du développement économique et social ainsi que de la sphère politique. Ils sont venus conforter deux de mes profondes convictions: d'une part, que l'on ne peut laisser se développer éternellement et impunément les inégalités économiques, l'injustice sociale, l'absence de droits et de liberté politique. Et d'autre part, que la démocratie ne peut venir que de l'intérieur, portée par l'aspiration à la liberté et à l'équité, et qu'il n'y a de vraie victoire contre les régimes autoritaires que celle remportées par les peuples eux-mêmes.

Les pays occidentaux observent cependant ces changements avec prudence, craignant l'arrivée de régimes islamistes au pouvoir...

Des avancées essentielles ont été menées, avec en particulier la tenue de l'élection de l'Assemblée nationale constituante en Tunisie et les élections législatives et sénatoriales en Egypte. L'enracinement de la démocratie prend du temps, c'est un travail de longue haleine. Il nous faut rester vigilant, en particulier à l'égard de la protection des droits et des libertés. Les peuples arabes ont su se mobiliser, parfois au péril de leur vie, pour gue tombent ces régimes autoritaires; si on ne répond pas à leurs aspirations de manière satisfaisante, le risque est grand de les voir à nouveau réagir.

Ce printemps de la démocratie arabe peut-il se répandre dans les pays subsahariens ?

Les dirigeants africains doivent tirer les leçons de ce qui s'est passé dans le monde arabe.

Vous ne vous exprimez jamais sur le Sénégal. Avez-vous signé un pacte avec le président Wade, pour ne pas vous mêler de ce qui se passe dans votre pays ?

Je fais toujours la même réponse sur le Sénégal : quand j'ai quitté le pouvoir en 2000, j'ai dit que jamais je ne m'exprimerai sur les problèmes sénégalais ; et je ne m'exprimerai pas sur les problèmes sénégalais. Si j'ai signé un pacte, ce n'est qu'avec moi-même...

L'année 2012 est riche en échéances électorales sur le continent. Quel est votre plus grand souhait pour ces différents scrutins ?

De nombreuses consultations électorales sont en effet prévues cette almée : au Sénégal, au Mali, au Cameroun, en Guinée-Bissau, au Burkina Faso ou encore en Mauritanie. Si d'importants progrès ont été accomplis dans la maîtrise technique de 1'Organisation des scrutins, les autorités respectives de ces pays doivent impérativement veiller à réunir l'ensemble des conditions, notamment politiques, pour que ces élections soient libres, fiables, transparentes et puissent être acceptées par tous. Nous avons, dans ce cadre, déployé, dans certains de ces Etats, des actions d'accompagnement à l'attention des acteurs impliqués dans les processus électoraux. Le problème n'est pas tant le nombre de mandats présidentiels que l'instabilité constitutionnelle, les modifications subreptices et arbitraires des règles encadrant la vie politique et l'absence de travail mené pour que les textes constitutionnels soient consensuels et durables.

Alors que 25% des membres de l'Assemblée générale de l'ONU sont Africains, aucun pays africain ne dispose du droit de veto au Conseil de sécurité. Comment jugez-vous cette situation et que devraient faire les pays du continent ?

Il y a un consensus aujourd'hui pour reconnaître que le mode de gouvernance internationale, en particulier le mode de fonctionnement du Conseil de sécurité des Nations unies, n'est pas satisfaisant, car il ne correspond plus à la réalité du monde multipolaire dans lequel nous vivons. La réforme du Conseil nécessite l'accord d'au moins deux tiers des Etats membres de l'ONU et celui de tous les membres permanents qui disposent du droit de veto. Cette procédure, très contraignante, nécessite donc de définir une réforme qui puisse recueillir le soutien d'une vaste majorité d'Etats membres. Or, c'est sur les contours de cette réforme que nous achoppons depuis plusieurs années maintenant. Elle doit impliquer un élargissement du nombre de membres (permanents et non permanents) du Conseil de sécurité, mais aussi la revalorisation des autres organes décisionnels des Nations unies. Il me semble extrêmement important que les pays africains prennent très au sérieux cette réforme et se mettent enfin d'accord sur ce qu'ils ont à proposer et sur les conditions de la représentation du continent dans ce processus.

Face à la crise financière qui frappe aujourd'hui les pays industrialisés, la mondialisation ne risque-t-elle pas de se transformer en un nouvel handicap pour le développement de l'Afrique ?

La crise financière touche d'abord les pays les plus développés, qui «découvrent» l'ampleur de leur endettement et les problèmes que cela pose. Les pays émergents ont déjà repris le cours de leur croissance. Or ce sont de plus en plus ces pays qui sont les partenaires de l'Afrique. Les flux commerciaux, les mouvements de personnes, la coopération sont de plus en plus placés sous le signe «Sud-Sud». La mondialisation, qui est un processus et non le résultat de la volonté de tel ou tel Etat, suit son cours et elle apporte à l'Afrique des possibilités d'ouverture et des changements d'orientation majeurs.

C'est à l'Afrique de savoir si elle veut entrer activement dans le processus, en particulier en améliorant son intégration régionale, ou si elle subit les événements. Ses nouveaux partenaires n'attendent pas qu'elle se laisse faire; mais ils n'ont pas non plus d'héritage particulier à son égard. Il faut donc négocier clairement avec eux, en ayant conscience des forces du continent africain et de ses faiblesses, afin d'obtenir un échange équitable.

A quelles conditions l'Afrique peut-elle parvenir à se transformer en une véritable puissance économique ?

Je pourrai vous renvoyer à des spécialistes tels que le président de la Banque africaine de développement (Donald Kaberuka, Ndlr), qui a su à maintes reprises dire clairement ce qu'il en est. En bref, l'Afrique dispose de richesses naturelles considérables -les premières du monde probablement- et des ressources humaines croissantes; il faut qu'elle se donne les outils de mise en valeur -les infrastructures et l'énergie pour les biens matériels, la formation et la recherche pour les hommes.

Faut-il s'inquiéter de la percée de la Chine en Afrique, tant sur le plan économique que de celui de valeurs chères à l'OIF, comme le respect des droits humains ou la démocratie ?

Aujourd'hui, la Chine fait partie des partenaires réguliers de l'Afrique, on a dépassé de loin le stade de la percée. Mais elle n'est pas seule: le Brésil, l'Inde, la Turquie sont aujourd'hui tout aussi présents et de façon peut-être encore plus variée que la Chine qui s'intéresse prioritairement aux matières premières. Comme je l'ai déjà dit, l'Afrique est en position de négocier à son avantage, de demander le respect de ses valeurs - et de celles qu'elle défend au sein de la Francophonie. Nous devons l'y aider, mais personne ne le fera à sa place. Les chefs d'Etat, les administrations, mais aussi la société civile, les collectivités locales, les associations doivent apprendre à négocier et à ne pas sacrifier le long terme pour des avantages momentanés et ponctuels. D'autres continents ont fait cet apprentissage et continuent de le faire. Il n'y a aucune raison que l'Afrique ne puisse y parvenir et nous serons toujours là pour partager cet apprentissage avec elle.

En Afrique francophone, la plupart des observateurs de l'éducation sont unanimes pour reconnaître que la qualité de l'enseignement est en baisse ces dernières années. Que fait l'OIF face à cette situation qui, à terme, constitue une menace pour l'usage du français sur le continent ?

La baisse de la qualité de l'enseignement ces dernières années en Afrique francophone est un fait bien établi et dont la Francophonie a très tôt pris conscience. Plusieurs causes sont à l'origine de cette situation. Outre les nombreuses secousses sociopolitiques qui frappent certains de nos Etats, il faut notamment signaler les facteurs suivants: l'insuffisance du niveau de compétence des maîtres en français, la non prise en compte des acquis cognitifs de l'enfant dans l'enseignement-apprentissage du français, les effectifs pléthoriques des classes, le manque d'outils pédagogiques appropriés au contexte, etc.

L'OIF a toujours accompagné ses membres dans la recherche de l'amélioration de la qualité de l'enseignement, soit par l'appui à la réforme des curricula, soit par le renforcement des capacités des enseignants, soit par la mise en œuvre d'outils pédagogiques innovants tels que l'Initiative de formation à distance des maîtres (Ifadem) ou encore l'initiative Ecole et langues nationales en Afrique (Elan-Afrique) qui est conjointement menée avec le ministère français des Affaires étrangères et européennes (Maee), l'Agence universitaire de la Francophonie (AUF) et l'Agence française de développement (AFD). Toutes ces initiatives sont renforcées par la mise en place du projet «d'Etat Régulateur» pour une Education de qualité pour tous, que l'OIF est en train de mettre en place en synergie avec l'Unesco et le Conseil de l'Europe.

Les étudiants africains se tournent de plus en plus vers les Etats-Unis. Que vous inspire cette évolution ? Peut-on toujours dire que «l'avenir de la Francophonie se trouve en Afrique» ?

C'est un phénomène qui est effectivement perceptible dans certains pays. Mais malgré cet attrait, nous pouvons affirmer que l'avenir de la langue française est et sera toujours en Afrique: toutes les projections futures dont nous disposons éta­blissent qu'à l'horizon 2050,80% des locuteurs du français seront issus du continent africain. La langue française qui s'est incrustée de façon définitive dans l'écologie linguistique de l'Afrique n'est plus, à notre avis, une langue en simple partage, mais une langue en copropriété. L'Afrique restera profondément francophone parce que le français jouit d'un statut scolaire important et qui doit être préservé. C'est sur ce continent que la Francophonie a le plus d'avenir en raison de cette plus-value éducative, en tant que langue internationale de communication dans ce regroupement régional des pays et en tant que langue favorisant la mise en place des réseaux africains francophones. Cela dit, laissez-moi répéter que nous ne nous positionnons pas dans une optique conflictuelle vis-à-vis de l'anglais ou des autres langues et que nous défendons le plurilinguisme.

REALISE PAR LUCIEN AHONTO (NOTRE AFRIK N°20, MARS 2012


Bamba Toure

Jeudi 22 Mars 2012 04:14

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