Habré s'est parfaitement intégré à la société sénégalaise, et c'était vrai bien avant que la justice ne s'intéresse à lui, en 1999. «C'est un des nôtres», confirme un commerçant. Sa boutique se trouve à deux pas de la villa bien gardée (notamment par des gendarmes en civil) de Habré, et il le voit régulièrement. «C'est un homme ouvert et généreux. Il reçoit beaucoup, mais sort aussi. Qu'a-t-il fait de mal ? Pourquoi veut-on l'envoyer en prison ? Certains, ici, s'y opposeront, car il nous aide beaucoup.»Les observateurs glosent sur ce «budget du silence» qui lui aurait permis de se constituer un véritable bouclier (humain ?). Habré est riche et il n'est pas avare. Il a la réputation d'arroser sans trop de difficulté et, indique "Jeune Afrique", «ils sont nombreux à le soutenir: des intellectuels comme le professeur Oumar Sankharé, agrégé de grammaire ; des journalistes comme Abdou Latif Coulibaly ; des hommes politiques comme l'ancien ministre des Affaires étrangères de Wade (et ex-défenseur de Habré) Madické Niang», mais aussi «des avocats médiatiques comme El Hadji Diouf, des hommes d'affaires comme Babacar Touré, l’ex-patron du groupe Sud Communication, avec qui il a l'habitude de boire le thé ; ou encore des dignitaires religieux, à commencer par la famille du (défunt) khalife des Tidianes, l'une des deux principales confréries du pays...»Tous ceux-là, ajoute "Jeune Afrique", «sont forcément corrompus aux yeux des adversaires de Habré». Et l’un d’eux de se s’indigner : «Pourquoi, par principe, ne pourrais-je pas défendre Habré?». Il serait naïf de croire que, dans sa situation, «il ne corrompt personne pour trouver des défenseurs. Mais nous ne sommes pas tous dans ce cas!»
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