Aide à la presse au Sénégal : L’Etat joue la montre pendant que les médias agonisent et les patrons jouent à la retenue

L’Etat cherche-t-il à tuer les entreprises de presse au Sénégal? C'est l'impression que partagent beaucoup d’acteurs des médias, angoissés à suffisance. Le fonds d’aide à la presse qui, de coutume, est distribué au début de chaque année se trouve jusque-là bloqué. En sus, le ministère du Budget remet au goût du jour un arrêté imposant à toute entreprise un quitus fiscal avant tout règlement de la commande publique. Ces dispositions combinées à la baisse des ventes et à la rareté de la publicité, font que les entreprises de presse ne tiennent presque plus.


L’Etat du Sénégal serait-il déficitaire au point de ne pas pouvoir s'acquitter des 700 millions du fonds d’aide à la presse? Depuis le début de l’année, les entreprises de presse scrutent du côté du ministère de la Communication des Télécommunications et de l’Economie Numérique et piaffent d'impatience. 

Le ministère de la communication avait annoncé sa distribution pour le mois de mars, et une commission ad hoc désignée. Seulement, cette entité ne s’est réunie que deux fois en quatre mois (de mars à juin) avant que le ministre Bamba Dièye ne décide de la mettre de côté et de procéder à la phase pratique de la répartition. 
Cependant, la lenteur dans l'exécution de la mesure semble être la marque de fabrique des préposés au travail, à tel point que lors de la dernière réunion du Conseil des Diffuseurs et Editeurs de presse (CDEPS) à 2STV, les patrons de presse avaient, selon une source, évoqué une possibilité de boycotter cette aide à la presse même si c’est un droit. «L’Etat nous fait languir et utilise l’aide comme si c’est de l’aumône. Si on en parle ça risque de vicier notre combat et de détourner l’opinion sur nos véritables préoccupations», avaient lancé certains responsables d’organe de presse. 

Ainsi, les présidents d’Associations et d’organisations professionnelles des médias refusent systématiquement de parler de la question publiquement, mais cette attitude s’explique plus par un orgueil voire une pudeur mal placée, parce que privant pendant ce temps leur outil de travail de ressources salvatrices. 

Et comme si la rétention de l’aide à la presse ne suffisait pas, le gouvernement qui vit lui aussi des problèmes de trésorerie brandit un arrêté imposant le quitus fiscal. Une mesure qui arrive dans un contexte de crise et marasme. Les rédactions qui comptaient sur le règlement des insertions publicitaires des entreprises publiques pour payer en fin juin ou éponger des arrières de salaire sont dans le désarroi total. De plus des groupes comme Walfadjri, Sud, Nouvel Horizon, l’Office, GFM, RTS, le Soleil, entre autres ont vécu des ATD (A tiers détenteurs – blocage des comptes bancaires). Ils ont été obligés de transiger ou de mettre la clé sous le paillasson. 

Avec toutes ces mesures et le manque d’accompagnement de l’Etat, on parle de plus en plus d’un plan d’anéantissement des PME au Sénégal.

Bamba Toure

Samedi 6 Juillet 2013 10:32

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