Arrêtons de faire des enfants si nous voulons nous développer !


Voilà un sujet qu’aucun candidat n’évoquera de peur de se faire lyncher par la population, et surtout les guides religieux. Et pourtant, voilà le sujet qui est le pilier de l’émergence. Peut-on exclusivement parler de croissance économique et de démographie ? En Afrique subsaharienne, la population est jeune et le taux de fécondité est de 4,9 en 2018, au Sénégal, ce taux est de 4,77 enfants par femme. L’Afrique a l’un des sous-sols les plus riches dans le monde et paradoxalement une population pauvre. Selon le rapport des Nations Unies intitulé Aperçu régional de la sécurité alimentaire et de la nutrition en Afrique, 237 millions de personnes en Afrique subsaharienne souffrent de sous-nutrition chronique, entravant ainsi les progrès réalisés ces dernières années. On peut blâmer l’esclavage, la colonisation et tout ce que nous voudrons, mais il est impératif que nous arrêtons de faire des enfants si nous ne pouvons pas nous en occuper. 
Pourquoi les couples réduiront le nombre d’enfants s’ils n’y trouvent aucun intérêt ? L’Etat doit faire en sorte que la population soit consciente que tant que nous continuons à ce rythme, il sera impossible pour l’Etat d’être à jour. Des routes doivent être construites, des hôpitaux, la création de richesses, la création d’emplois. Tout cela ne sera pas visible si nous ne diminuons pas le taux de fécondité. Qu’est-ce qui nous pousse à aimer avoir tant d’enfants en Afrique et plus particulièrement au Sénégal ? Il faut d’abord noter la cause religieuse que nous entendons depuis notre naissance. Le fait que nous devons augmenter la progéniture du prophète Mahomet (PSL). Certains amènent la théorie du Coran où Dieu nous dit « Ne tuez pas vos enfants par crainte de pauvreté, nous pourvoyons à vos besoins comme aux leurs. » Cependant, on ne nous dit pas d’en faire plus que nous puissions en entretenir. C’est la raison la plus courante que nous entendons au Sénégal. Le prophète a besoin de qualité et non de quantité. 
Il y a aussi les causes culturelles, car au Sénégal, nous avons toujours cru au concept de famille élargie. Ceux qui avaient beaucoup d’enfants étaient considérés comme les plus riches, car les enfants pouvaient les aider dans les champs, dans l’agriculture et l’élevage. 
Il y a aussi les causes socio-économiques, car notre pays est un pays pauvre, avec près de 47 % de la population vivant dans la pauvreté et ce taux est de plus de 60 % en milieu rural. Tout ce qui se fera par l’Etat ne se sentira pas, car nous nous multiplions exponentiellement. Il est impossible d’instaurer une couverture sociale universelle, car l’Etat n’en a juste pas les moyens. Un pays qui rengorge beaucoup de jeunes chômeurs qui n’ont pas accès à un système social adéquat ne fera que créer la précarité et une insécurité sociale. 
Le mariage est un autre aspect qui est en train de changer, non pas à cause des mentalités, mais à cause de la pauvreté. Certes, l’âge du mariage a augmenté un peu par manque de moyens, mais il est toujours relativement bas. Par exemple, dans les années 2000, l’âge médian de mariage était de 19 ans en Afrique subsaharienne, avec le Tchad ayant le plus bas âge, qui était de 16 ans. Pour un pays dont l’économie est une économie de rente, il est impératif de contrôler la démographie. Nous ne transformons pas les matières premières, donc pas d’industries. Dans ce cas, il est impossible de créer une valeur ajoutée. 
Selon les malthusiens et les néomalthusiens, une population qui s’accroît d’une manière exponentielle, sans aucun contrôle, ne pourra jamais se développer. En augmentant les personnes disproportionnellement à la création de richesses, on notera une stagnation du niveau de vie, ce qui explique qu’au Sénégal, depuis l’indépendance, à part quelques infrastructures dans la capitale, le développement humain ne peut pas prendre place. Depuis l’indépendance, nous parlons toujours d’autosuffisance alimentaire et nous recevons tellement d’aide dans ce sens. C’est pourquoi la théorie de la population optimale a vu le jour. C’est une limite au-delà duquel la population ne peut plus être favorable à l’essor socio-économique. Dans ce sens, Thomas Malthus disait, « si une population n'est pas freinée, elle s'accroît selon une progression géométrique, alors que les subsistances augmentent selon une progression arithmétique. » Plus les enfants naissent, plus la population est jeune et une population jeune ne favorise pas l’épargne, et quand il n’y a pas d’épargne, les banques ne pourront pas financer les projets de développement, ce qui fait de nous, une société de consommation et non d’épargne. 
Pour pouvoir se développer, les néomalthusiens nous disent que c’est primordial de freiner la croissance de la population pour qu’il y ait assez de ressources pour tous. Il faut miser sur la qualité et non la quantité. Il est plus avantageux d’avoir une fille qui est allée à l’école que d’avoir 5 garçons qui ne sont pas allés à l’école. Cet exemple a été pris, car la scolarisation des filles est toujours un problème au Sénégal. Pour avoir une population en bonne santé, il faut que les filles aillent à l’école pour pouvoir appliquer certaines règles sanitaires comme le suivi de grossesses, pour réduire le taux de mortalité maternelle et infantile. Si elles sont éduquées, elles auront du travail, ce qui fera d’elles des actrices de développement pour qu’elles puissent réduire le taux de fécondité.
L’Etat est responsable des projets sociaux pour que la population soit dans de conditions relativement décentes. Si la population n’est pas éduquée et n’a pas d’emplois, elle a tendance à favoriser les comportements natalistes illimites, ce qui favorise la précarité. En nous multipliant démesurément, nous ne permettons pas à l’Etat de mettre en place les salles de classe, c’est pourquoi nous disposons toujours d’abris provisoires d’ailleurs. Ces effectifs pléthoriques dans les salles de classe font de telle sorte que l’éducation est de mauvaise qualité. Notre taux de scolarisation est de plus de 90 % et paradoxalement, le taux d’alphabétisation est de plus de 56 %. L’Etat ne pourra pas non plus construire assez de routes pour éviter les embouteillages qui nous font perdre des milliards par année. Un accroissement de la population fait aussi que nous ne pouvons toujours pas répondre au seuil du nombre de médecins par habitants comme déterminé par l’OMS. Si l’Etat a une dette intérieure non contrôlée, c’est en partie à cause de la couverture maladie universelle qu’il se doit d’offrir à la population, mais dont il n’en dispose pas les moyens. L’Afrique a l’indice de développement humain le plus bas dans le monde.
Nous savons tous que c’est un sujet tabou au Sénégal, et que les femmes veuillent avoir beaucoup d’enfants à cause de l’héritage aussi. Nous constatons que tout est lié à la pauvreté, cependant, l’Etat ne sera pas en mesure d’assurer les emplois dont nous avons besoin, les routes dont nous avons besoin, la couverture sociale, l’épanouissement, un cadre de vie agréable. Nous devons aider l’Etat à nous aider. Si nous réduisons le taux de fécondité, l’Etat sera en mesure de faire sa part. Dieu nous dit dans son coran qu’Il parle aux doués d’intelligence, utilisons cette intelligence pour savoir que Dieu n’a pas obligé à une personne qui n’a pas les moyens de se marier. Si le mariage n’est pas forcé en Islam, croyez-vous qu’avoir beaucoup d’enfants soit forcé ? Cogito Ergo Sum.
Mohamed Dia, Consultant bancaire


Vendredi 15 Février 2019 08:06

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