BBY ou le mariage gris d’ennemis intimes
Les coalitions de partis politiques font partie du jeu démocratique lorsqu'elles ont une substance. Mais les querelles de clocher qui infestent la coalition BBY témoignent qu’il s’agit d’un mariage impossible. BBY est une coalition d’ennemis devenus ostensiblement intimes depuis les dernières élections présidentielles. Il est impossible de la maintenir sans s’embourber dans la sournoiserie. Cette union est tributaire des intérêts antagonistes de ses membres, qui attendent le bon moment pour arrêter de flirter avec l’amant souverain.
Idrissa Seck vient de moucharder son pacte avec la coalition BBY. Il a le mérite d’avoir mis fin à temps à une cohabitation nauséeuse. Il fallait être naïf pour croire que son idylle politique avec Macky Sall pourrait durer longtemps. Que le remaniement ministériel du 01 Sept 2013 ait déclenché ou non leur procédure accéléré de divorce, il était prévisible depuis le début qu’Idrissa Seck aura pris ses distances avec l’APR. D’abord la plaie ouverte par les velléités qu’il a eues avec Macky Sall dans l’affaire des sentiers de Thiès et lors de la création de son parti politique, n’est pas encore guérie. Ensuite, Idrissa Seck sait qu’il lui est nécessaire, pour se positionner en nouveau leader de l’opposition et, peut être, devenir le 5ème président du Sénégal (à défaut de Idy4Président), de s’affranchir de l’ombre de l’actuel président.
Tanor Dieng, Moustapha Niass, Abdoulaye Bathily, Amath Dansokho, Cheikh Bamba Dièye, représentent chacun une organisation qui a la vocation téléologique de conquérir le pouvoir. Ils rateraient cette vocation s’ils se contentaient de squatter le pouvoir de Macky Sall pour exister politiquement. En même temps, ils seraient ridicules de vouloir scier la branche sur laquelle ils sont assis. Mais ils peuvent être tentés de savonner la planche au président, pour précipiter sa chute et lui succéder. Il y a de l’orage dans l’air, et ils le savent!
BBY, une armée mexicaine incompatible avec la bonne gouvernance
La déclaration de politique générale du gouvernement n’aura jamais la valeur d’un contrat social fédérant toutes les sensibilités regroupées dans BBY. C’est un compromis de façade pour valider la cohabitation gouvernementale et parlementaire. La politique générale de l’exécutif, quelque soit le premier ministre qui la porte, se dessine suivant le programme présenté au peuple par le Président de la République avant son élection. Elle ne se concocte pas à posteriori à partir d’un ramassis de déclarations, de revendications et de slogans formulés par les différents coalisés. C’est une démarche anachronique, contraire à la démocratie : un président est élu en fonction d’un programme qu’il présente au peuple et qu’il s’est engagé de faire exécuter par son gouvernement une fois élu. C’est tout le sens de la théorie du contrat social de délégation de souveraineté, développée par Jean Jacques Rousseau, reprise par les principes républicains contenus dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et consacrée par la constitution sénégalaise. Rafistoler un nouveau programme après l’élection du président, pour satisfaire la pléiade d’acteurs regroupés dans BBY, est contraire à l’esprit républicain. Cet état de fait favorise l’improvisation et le pilotage à vue. La création d’un ministère de la bonne gouvernance, qui risque de rester une coquille vide aux intentions candides, n’y changera rien.
BBY est gangrenée par la jalousie et « l’adultère » politiques
Les dirigeants du BBY reconnaissent eux-mêmes que leur coalition ne peut pas être efficace avec les micmacs dont elle fait l’objet. Moustapha Niass, Secrétaire général de l’Alliance des Forces de Progrès (AFP) et Président de l’Assemblée nationale essuie de sévères critiques au sein même de BBY. Alors que Pape Diouf, ministre de l’hydraulique et de l’assainissement et Oumar Guèye, ministre du Tourisme, ont tourné le dos à leur ex-camarade de parti Idrissa Seck pour consigner leurs valises chez le parti au pouvoir, des militants de l’Alliance Pour la République (APR) incitent d’autres ministres à déguerpir avec leurs valises : Serigne Mbaye Thiam membre du parti socialiste (PS) et ministre de l’Education nationale ; Mansour Sy, membre du Parti de l’indépendance et du travail (PIT) et ministre de la fonction publique. Cette zizanie cause un tort au gouvernement, et donc à l’Etat et au peuple sénégalais.
Naturellement Macky Sall n’a pas intérêt à ce que le BBY soit rangée illico aux oubliettes. Même s’il sait que c’est une réalité éphémère, il a besoin de leur compagnonnage pour asseoir une légitimé populaire qu’il n’a pas eue lors de son élection ; et dont la consolidation justifierait le report des élections régionales, municipales et rurales de 2014. Alors, il partage le gâteau avec ses coalisés, en gardant la fine crème et la cerise pour lui, son parti et les transfuges. Mais c’est une liaison dangereuse. Car débaucher les cadres des partis rivaux pour consolider son parti, c’est aussi périlleux que détourner la femme de son ennemi pour terrasser celui-ci. Non seulement l’ennemi aura plus de haine pour combattre celui qui l’a rendu cocu, mais encore l’imposteur risque d’être trahi à son tour par la femme convoitée. Parce que les traîtres politiques trahissent toujours pour garder une portion du butin républicain.
Pingouins au Palais, hiver méchant.
Les pingouins de la République, ces profiteurs décomplexés qui valsent d’un parti à l’autre et qui ne se soucient guère de prendre un râteau en draguant l’heureux élu, sont à éviter comme la peste. Ils ont anticipé la fin de l’été indien pour BBY, en s’infiltrant au Palais pour hiberner dans la fraicheur du pouvoir. Tout pouvoir qui flirte avec ces caméléons qui ne cherchent qu’à vivre aux crochets de l’Etat, en payera le prix un jour. Parce que, comme le disait Albert Camus dans la Peste, le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais. Il peut rester endormi pendant des années dans les caves du pouvoir, et un jour il enverrait ses rats pourrir la gestion du pays. Nos pingouins-politiciens sont à la démocratie, ce que les rats sont à la peste.
L’irruption dans la sphère politique sénégalaise de ces politicards opportunistes, prêts à monnayer leur dignité en transhumant sans cesse d’un camp à l’autre, est une pathologie contagieuse à freiner. Leur destination finale est toujours le camp de celui qui a gagné, qu’ils ont insulté et dénigré hier avec véhémence, et qu’ils glorifient aujourd’hui avec bassesse. C’est incongru ! Il faut stopper cette filouterie politique en mettant en quarantaine ces pestiférés. Il y va de l’intérêt du président de la République et de son parti, de l’intérêt des partis trahis de l’opposition, et surtout de notre démocratie. En fondant son pouvoir sur le piédestal trébuchant qu’est BBY, le président de la République met son règne sur le fil du rasoir.
En attendant la fin de cette tragi-comédie politique, notre pays risque de risque de retourner à l’ère protohistorique de la démocratie.
Aliou TALL,
Président du RADUCC
(Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen)
Email : raducc@hotmail.fr
Les coalitions de partis politiques font partie du jeu démocratique lorsqu'elles ont une substance. Mais les querelles de clocher qui infestent la coalition BBY témoignent qu’il s’agit d’un mariage impossible. BBY est une coalition d’ennemis devenus ostensiblement intimes depuis les dernières élections présidentielles. Il est impossible de la maintenir sans s’embourber dans la sournoiserie. Cette union est tributaire des intérêts antagonistes de ses membres, qui attendent le bon moment pour arrêter de flirter avec l’amant souverain.
Idrissa Seck vient de moucharder son pacte avec la coalition BBY. Il a le mérite d’avoir mis fin à temps à une cohabitation nauséeuse. Il fallait être naïf pour croire que son idylle politique avec Macky Sall pourrait durer longtemps. Que le remaniement ministériel du 01 Sept 2013 ait déclenché ou non leur procédure accéléré de divorce, il était prévisible depuis le début qu’Idrissa Seck aura pris ses distances avec l’APR. D’abord la plaie ouverte par les velléités qu’il a eues avec Macky Sall dans l’affaire des sentiers de Thiès et lors de la création de son parti politique, n’est pas encore guérie. Ensuite, Idrissa Seck sait qu’il lui est nécessaire, pour se positionner en nouveau leader de l’opposition et, peut être, devenir le 5ème président du Sénégal (à défaut de Idy4Président), de s’affranchir de l’ombre de l’actuel président.
Tanor Dieng, Moustapha Niass, Abdoulaye Bathily, Amath Dansokho, Cheikh Bamba Dièye, représentent chacun une organisation qui a la vocation téléologique de conquérir le pouvoir. Ils rateraient cette vocation s’ils se contentaient de squatter le pouvoir de Macky Sall pour exister politiquement. En même temps, ils seraient ridicules de vouloir scier la branche sur laquelle ils sont assis. Mais ils peuvent être tentés de savonner la planche au président, pour précipiter sa chute et lui succéder. Il y a de l’orage dans l’air, et ils le savent!
BBY, une armée mexicaine incompatible avec la bonne gouvernance
La déclaration de politique générale du gouvernement n’aura jamais la valeur d’un contrat social fédérant toutes les sensibilités regroupées dans BBY. C’est un compromis de façade pour valider la cohabitation gouvernementale
BBY est gangrenée par la jalousie et « l’adultère » politiques
Les dirigeants du BBY reconnaissent eux-mêmes que leur coalition ne peut pas être efficace avec les micmacs dont elle fait l’objet. Moustapha Niass, Secrétaire général de l’Alliance des Forces de Progrès (AFP) et Président de l’Assemblée nationale essuie de sévères critiques au sein même de BBY. Alors que Pape Diouf, ministre de l’hydraulique et de l’assainissement et Oumar Guèye, ministre du Tourisme, ont tourné le dos à leur ex-camarade de parti Idrissa Seck pour consigner leurs valises chez le parti au pouvoir, des militants de l’Alliance Pour la République (APR) incitent d’autres ministres à déguerpir avec leurs valises : Serigne Mbaye Thiam membre du parti socialiste (PS) et ministre de l’Education nationale ; Mansour Sy, membre du Parti de l’indépendance et du travail (PIT) et ministre de la fonction publique. Cette zizanie cause un tort au gouvernement, et donc à l’Etat et au peuple sénégalais.
Naturellement Macky Sall n’a pas intérêt à ce que le BBY soit rangée illico aux oubliettes. Même s’il sait que c’est une réalité éphémère, il a besoin de leur compagnonnage pour asseoir une légitimé populaire qu’il n’a pas eue lors de son élection ; et dont la consolidation justifierait le report des élections régionales, municipales et rurales de 2014. Alors, il partage le gâteau avec ses coalisés, en gardant la fine crème et la cerise pour lui, son parti et les transfuges. Mais c’est une liaison dangereuse. Car débaucher les cadres des partis rivaux pour consolider son parti, c’est aussi périlleux que détourner la femme de son ennemi pour terrasser celui-ci. Non seulement l’ennemi aura plus de haine pour combattre celui qui l’a rendu cocu, mais encore l’imposteur risque d’être trahi à son tour par la femme convoitée. Parce que les traîtres politiques trahissent toujours pour garder une portion du butin républicain.
Pingouins au Palais, hiver méchant.
Les pingouins de la République, ces profiteurs décomplexés qui valsent d’un parti à l’autre et qui ne se soucient guère de prendre un râteau en draguant l’heureux élu, sont à éviter comme la peste. Ils ont anticipé la fin de l’été indien pour BBY, en s’infiltrant au Palais pour hiberner dans la fraicheur du pouvoir. Tout pouvoir qui flirte avec ces caméléons qui ne cherchent qu’à vivre aux crochets de l’Etat, en payera le prix un jour. Parce que, comme le disait Albert Camus dans la Peste, le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais. Il peut rester endormi pendant des années dans les caves du pouvoir, et un jour il enverrait ses rats pourrir la gestion du pays. Nos pingouins-politiciens sont à la démocratie, ce que les rats sont à la peste.
L’irruption dans la sphère politique sénégalaise de ces politicards opportunistes, prêts à monnayer leur dignité en transhumant sans cesse d’un camp à l’autre, est une pathologie contagieuse à freiner. Leur destination finale est toujours le camp de celui qui a gagné, qu’ils ont insulté et dénigré hier avec véhémence, et qu’ils glorifient aujourd’hui avec bassesse. C’est incongru ! Il faut stopper cette filouterie politique en mettant en quarantaine ces pestiférés. Il y va de l’intérêt du président de la République et de son parti, de l’intérêt des partis trahis de l’opposition, et surtout de notre démocratie. En fondant son pouvoir sur le piédestal trébuchant qu’est BBY, le président de la République met son règne sur le fil du rasoir.
En attendant la fin de cette tragi-comédie politique, notre pays risque de risque de retourner à l’ère protohistorique de la démocratie.
Aliou TALL,
Président du RADUCC
(Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen)
Email : raducc@hotmail.fr