Benoît Sambou, l’antithèse de Maslow


En élaborant dans son article A Theory of Human Motivation sa vision sur la motivation chez l’humain, le psychologue Abraham Maslow, ne pensait pas pour autant que la fonctionnalité de son idée était encore plus actuelle prise inversement. A bien suivre le Ministre Benoît Sambou, il faut un renversement catégoriel de la pyramide d’Abraham Maslow pour qu’enfin la paix revienne en Casamance.
En effet, pour Maslow (1908 – 1970), nous agissons tous sur la base de la satisfaction de nos besoins. Mais qu’est-ce que le besoin ? Plus qu’un sentiment de manque que la personne cherche à combler par l’usage d’un bien ou d’un service, le terme renvoi à quelque chose de nécessaire, d’indispensable à acquérir. Il désigne donc une réalité qui se présente comme un obstacle à franchir pour arriver à un certain niveau de bien-être. Mais, ces besoins sont classés et hiérarchisés. Ils se présentent chez Maslow sur 5 niveaux que nous avons, par souci d’efficacité et de clarté, classés en 3 strates. Les trois premières (la base) étant regroupées en une.
Première strate : les obstacles primaires (la survie, la sécurité et l’appartenance)
Deuxième strate : les obstacles secondaires (la reconnaissance ou l’estime)
Troisième strate : les obstacles tertiaires (la réalisation de soi).
Etant donné que pour Maslow, plus on monte dans la hiérarchie, plus on gagne en motivation dans la marche vers la satisfaction de nos besoins, Benoît Sambou semble nous dire qu’il faut inverser la tendance pour vraiment cadrer avec l’installation définitive de la paix.
C’est dans la salle de conférence de la Mairie de Paris XXème que le Ministre Benoît Sambou a décliné sa théorie du renversement de Maslow. Selon M. Sambou, la démarche dans le règlement du conflit casamançais n’a jamais été dictée par une réalité de terrain. Le maquis est généralement animé par des jeunes dont le seul souci est de retrouver tout le bien-être auquel ils ont droit comme toutes les personnes de leur âge. Or, leur obstacle premier est lié à un besoin de se réaliser. Dans cette perspective, la réalisation de soi constitue la première strate dans l’échelle de leurs besoins. L’envie de poser de façon personnelle sa particularité et sa propre existence pousse souvent les jeunes du sud du Sénégal à entrer dans le maquis. Ziguinchor, comme aime à le rappeler Benoît Sambou, fait partie des villes où l’on consomme le plus de thé, et ceci est un indice d’oisiveté. Lorsqu’on cristallise tous les vœux de réalisation personnelle légitime et qu’on est sans emploi et sans perspective professionnelle, la seule alternative qui reste c’est la réalisation par les armes. Le langage des armes (Jean Claude Marut : Casamance ce que disent les armes) en Casamance, est donc devenu une option indissociable d’une élaboration de stratégies individuelles de sortie de crise.
Après la réalisation de soi comme première strate, suivra dans ce schéma novateur du  traitement de la crise casamançaise, celle de la reconnaissance ou l’estime. Ce n’est donc, qu’après s’être réalisé en tant qu’être humain accompli sur la base de ses potentialités et de ses dons, que surgit l’obstacle de l’estime et de la reconnaissance, non plus de soi mais des autres. A partir de ce moment, la personne est encline à revendiquer de façon légitime de son entourage (immédiat) des signes de reconnaissance positifs. La sanction la plus palpable de  cette reconnaissance est le statut de bonne personne fréquentable attribué par la société elle-même. Ainsi, le « jeune combattant » reviendra régulièrement dans la communauté pour y vivre pleinement son appartenance après avoir « gagner ponctuellement » sa vie.
Le troisième niveau, dans la logique de M. Sambou, est la satisfaction des besoins tertiaires. Il s’agit là des besoins de repos, de consommer tranquillement, de se marier, de procréer, d’adorer la divinité, d’organiser sa vie de façon à pérenniser les acquis, etc. L’accession à cette strate et la satisfaction des besoins y afférant requièrent une mobilisation individuelle et collective. Tout le monde y a droit, car il s’agit d’épanouissement de l’humain. Et étant donné  que plus on s’élève dans la stratification en terme de satisfaction de besoin, plus la motivation à s’élever est importante, les hommes se battront pour se maintenir dans cette quête. 
Dès lors, on est à même de mieux appréhender cette théorie du « renversement de Maslow » qui pose d’abord la réalisation de soi en tant que besoin primaire à satisfaire. C’est de cette oreille-là qu’il faut entendre le Ministre Benoît Sambou lorsqu’il scande « en Casamance, c’est le développement qui amènera la paix et non le contraire ». Il est vrai que si nous voulons que les jeunes qui peuplent les forêts un peu partout en Casamance pour n’y sortir que pour braquer ou dévaliser puissent ranger les armes, il faut faire décoller la région par le biais d’investissements massifs. Un plan Marshall pour la Casamance s’impose à tout régime sérieux qui voudrait faire du Sénégal un pays véritablement émergent. Il faut relancer l’industrie locale, désenclaver la région par une facilitation de l’accès par voie marine/fluviale, terrestre, et aérienne. C’est bien entendu ce qu’à compris le Président de la République Macky Sall qui avait fait une descente historique dans les « brousses », fiefs de la rébellion non pas seulement pour rendre hommage à nos Jambaar, mais aussi pour prendre langue avec certaines factions irrédentistes. N’est-ce pas là le changement de paradigme auquel nous invite le Ministre Benoît Sambou ?
 
 
Amadou Lamine Ndiaye
Coordonnateur National du C.R.I.E
Cadrerepublicaindesinspecteurs@gmail.com
 

Bamba Toure

Dimanche 12 Mai 2013 18:08

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