Beyoncé arrive même à faire s’engueuler les Indiens entre eux


Dans la vidéo de « Hymn for the Weekend », le chanteur de Coldplay Chris Martin joue le rôle d’un voyageur épicurien se mêlant à de jeunes Indiens pour danser et chanter à l’occasion de ce qui semble être Holi, la fête hindoue des couleurs, tandis que Beyoncé apparaît revêtue des atours d’une rani, une reine indienne. 



Parmi les personnages secondaires du clip, on compte des hommes sacrés Sâdhus ainsi qu’un enfant Bahurupi [artistes costumés endossant le rôle de figures mythologiques ou religieuses] représentant le dieu Shiva. 

Nishita Jha écrit dans « The Wire » que Chris Martin se comporte « comme le baroudeur blanc typique qui ne remarque que les drapeaux couleur safran et les hommes sacrés à barbe » : 

« Le nouveau clip de Coldplay pour la chanson “Hymn for the Weekend” rassemble tout ce que Chris Martin semble préférer de l’Inde : les taxis colorés de Mumbai, les bâtiments délabrés, Holi, et à l’occasion un enfant déguisé en singe ou en divinité bleue. Beyoncé a également collaboré à l’album de Coldplay et apparait ici sous les traits d’un ange, ou de son équivalent indien : une reine du Bollywood. » 

Dénonciation de l’orientalisme 

Pour mieux comprendre le débat engendré par cette vidéo, il est utile de se remémorer le concept d’orientalisme développé par Edward Saïd : 

« On peut décrire et analyser l’orientalisme comme l’institution globale qui traite de l’Orient, qui en traite par des déclarations, des prises de position, des descriptions, un enseignement, une administration, un gouvernement : bref, l’orientalisme est un style occidental de domination, de restructuration et d’autorité sur l’Orient. » 

Selon Richard King [PDF], la conceptualisation d’Edward Saïd traite de la « complicité entre les récits académiques occidentaux sur la nature de “l’Orient” et les velléités hégémoniques de l’impérialisme occidental ». 

Au XXIe siècle, ces « velléités hégémoniques » pourraient trouver leur prolongement logique dans l’impérialisme culturel aux moyens de l’appropriation et de la diffusion de stéréotypes à travers la musique et les autres formes d’art. 

Le problème Beyoncé 

Parmi les stéréotypes véhiculés par le clip de Coldplay, tel que le cliché duchauffeur de taxi sikh au turban, c’est la représentation de Beyoncé comme une reine indienne qui s’avère le plus problématique pour certains. 

En plus des gestes de l’artiste américaine, les détracteurs du clip ont souligné le fait que la célèbre actrice indienne Sonam Kapoor — une véritable star de Bollywood — soit reléguée à une apparition de huit secondes dans la vidéo et joue les seconds rôles de Beyoncé. 

Dans les jours ayant suivi la sortie de la vidéo, de nombreux Indiens ont dénoncé sur Twitter la représentation qui était faite de leur pays 

La vidéo de Beyoncé est problématique car réductrice, et elle utilise l’Inde comme un accessoire lui permettant de gagner de l’argent. Une terre et une culture sur lesquelles elle n’a aucun droit. 



Dimanche 7 Février 2016 07:54

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