La supposée attribution du terminal vraquier à l’entreprise NECOTRANS pollue l’environnement du port et si l’on n’y prend garde ce differend nous mènera droit vers une catastrophe économique et sociale. Nous assistons à un vrai dialogue de sourd entre l’administration du port et le syndicat des manutentionnaires, et apparemment tous les coups sont permis. La question qu’on peut donc légitimement se poser est de savoir si NECOTRANS (http://www.necotrans.com/) est le meilleur choix parmi tous les postulants ? Pour tenter de répondre à cette question, il faut d’abord connaître les principaux acteurs, ceux qui sont connus et ceux qui le sont moins, ensuite voir quelles sont les forces et faiblesses des uns et des autres. Les opérations de manutention au port de Dakar sont plutôt passables comparativement à celles d’autres ports ouest africains comme ceux d’Abidjan et de Lomé. La première conséquence est que la plupart des opérateurs économiques surtout maliens se tournent vers d’autres horizons même avec des coûts plus élevés que ceux appliqués à Dakar. La compétitivité de notre port passe donc nécessairement par un terminal vraquier doté d’installations modernes qui traitent des volumes importants dans des délais raisonnables. Les entreprises locales de manutention traversent d’énormes difficultés organisationnelles et financières, elles doivent de l’argent aussi bien au port qu’à la douane, mais bon gré mal gré, elles font travailler des milliers de sénégalais. Sans une aide massive de l’Etat, elles ne peuvent pas exploiter efficacement le terminal vraquier, et même dans ce cas, il faudrait une restructuration de tout le secteur. NECOTRANS est déjà installée au Sénégal avec GETMA, mais elle ne s’est pas imposée pour autant, c’est pourquoi son choix laisse perplexe. A travers la presse, cette entreprise a déroulé sa feuille de route avec des investissements de l’ordre de 48 milliards sur concours bancaire et une fois la concession obtenue. A-t-elle réellement une grande capacité financière à même de lui permettre de remplir ses obligations ? NECOTRANS n’est pas connue à travers le monde comme un acteur important de la manutention des pondéreux, c'est-à-dire du vrac tant solide. Et ce n’est pas un hasard si dans cette opération, elle cherche à s’associer avec la société Belge KATOEN NATIE (http://www.katoennatie.com/) spécialiste de la manutention (voir les belles photos de la visite du DG du port à Anvers sur le site web du port de Dakar). NECOTRANS ne gère aucun terminal vraquier de la dimension de celui du port de Dakar, et ça c’est un vrai problème. Pour rappel, cette entreprise a été expulsée du port de Conakry par le président Condé, même si par la suite elle a gagné son procès contre BOLLORE. Maintenant, il ne sert à rien de jeter l’anathème sur les sociétés locales de manutention pour justifier le choix de NECOTRANS, de la même manière que les entreprises locales de manutention ne peuvent pas s’opposer au choix de NECOTRANS pour uniquement se voir refiler cette concession, sans en avoir réellement les outils. A côté de ces protagonistes qui s’affrontent férocement, il y a un autre acteur important intéressé par la concession, il s’agit de SEA INVEST (www.sea-invest.com/fr/), entreprise leader en Europe de la manutention en vrac (solide et liquide). Cette entreprise a un autre atout, c’est d’être déjà installée au port d’Abidjan (http://www.sea-invest.com/wp-content/uploads/2012/06/SEA-invest-Afrique-14062012.pdf). Récemment un quotidien sénégalais a tenté de salir la réputation de cette entreprise, en affirmant d’abord que des enquêteurs du port de Dakar ont eu l’assurance du DG du port d’Abidjan que SEA INVEST sera bientôt chassée dudit port, ensuite que les grues qu’elle a installées étaient d’occasion, et enfin qu’elle a été dessaisie de la gestion du terminal fruitier pour insuffisance de résultats. Le simple bon sens aurait permet de comprendre qu’un port concurrent ne peut pas livrer une information aussi sensible à des enquêteurs, quant aux grues d’occasion ce lien permet de juger (http://news.abidjan.net/h/475626.html), pour le quai fruitier, il s’est agit de conflits entre opérateurs fruitiers et manutentionnaires pour sa gestion, finalement le président ivoirien a tranché la poire en deux en confiant ce quai à un manutentionnaire neutre. Autre élément à retenir, SEA INVEST s’engage à investir au port de Dakar sur fonds propres. Sa venue à Abidjan a aussi permis aux sociétés manutentionnaires sur place d’affiner leur savoir faire, et c’est ainsi que la SIMAT (http://www.simat.ci/fr/), réticente au début à l’idée de l’installation de SEA INVEST a su malgré tout conforter sa place de grande société de manutention, avec en prime une cotation en bourse (http://simat.societes-cotees.fr/). En ma qualité de cadre de l’APR, j’aurais voulu que le choix du DG du port soit le meilleur possible, mais, personnellement, je crois que ce n’est pas le cas. Et, il est heureux que les députés aient décidé d’auditionner le DG du port sur cette brûlante question afin d’édifier les Sénégalais. Ironie de l’histoire, au moment où l’on s’étripe autour de cette concession, l’ex DG a été inculpé pour l’attribution d’une autre concession, celle du terminal à conteneurs à DP WORLD. A la différence que pour le cas de Bara SADY, l’expertise et la capacité financière du concessionnaire sont indiscutables. Ceci explique pourquoi la concession du terminal roulier signée avec BOLLORE à l’issue d’un AO n’a pas été contestée et peut être considérée comme une bonne opération pour notre pays. Pour mettre rapidement de l’ordre dans ce tohu bohu, le Président de la République doit prendre une décision allant dans le sens de préserver les intérêts de notre pays. A notre avis, le choix le plus sage est de lancer un appel d’offre ouvert pour l’attribution de cette concession, cette option emportera certainement l’adhésion de tous, il suffira simplement de rassurer tous les acteurs quant à la pérennité de leurs activités au port. Et si par extraordinaire, décision été prise de ne pas faire un AO, que les entreprises locales de manutention soient favorisées.
Abdoulaye Diallo, Agence des Aéroports du Sénégal (ADS)