CONTRIBUTION : DE L’HONORABILITÉ DU DÉPUTÉ !


L’institution parlementaire de la République vient d’être rudement agressée par des représentants de partis politiques rivaux, durant le processus ayant conduit au choix du Président du groupe parlementaire libéral. Le tohubohu indescriptible digne d’une arène de gladiateurs, retransmis par les médias nationaux, a éberlué plus d’un. Tant la part belle a été faite aux caniveaux par des députés qui ont substitué les arguments convaincants relevant du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale à ceux de la force physique. 

Il est vrai que dans un passé non lointain, je veux dire, en 2005, une scène quasi – similaire  s’était produite lors de l’examen et de l’adoption de la loi d’amnistie, dénommée loi EZZAN, portant le nom du député feu Isidore EZZAN, issu de la majorité parlementaire de l’époque. Pour rappel, la quintessence de cette effervescence parlementaire autour du vote de la loi citée supra, consistait à amnistier des crimes politiques commis dans notre pays, durant une période englobant la date de l’assassinat de l’ancien Vice – Président  du Conseil Constitutionnel, Maître Babacar SEYE, en 1993. 

Halluciné, le peuple sénégalais, avait assisté, la mort dans l’âme, à un cirque digne de clowns amusant la galerie, à un moment où leurs mandants étaient plutôt préoccupés par le triomphe de la vérité, sur la disparition de ce Grand sénégalais, qui n’avait de tort  que de  servir la justice de son pays, voire la République. Hélas , cet ancien maire de la ville de Saint Louis, de retour de son bureau du Conseil Constitutionnel, se voyait lâchement assassiné par des quidams armés et instrumentalisés, pour accomplir cette cynique forfaiture, à un moment indécis de la vie politique du Sénégal, trahis par  leur professionnalisme digne de celui de tireurs d’élite. A coup sûr, la justice des hommes avait mené à cette fameuse loi  mais, à Dieu ne plaise, LA SIENNE rendra indubitablement son verdict. 

Ce mois de novembre 2015 a vu des députés sacrifier à la tradition, non sans avoir tenté de convaincre dans les débats. Nul n’ignore que le Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale a été diversement interprété par les deux parties au point que la frange des libéraux, voulant faire de madame Aida MBODJ, la nouvelle présidente de leur groupe, fit usage de l’argument de la violence physique, pour faire appliquer sa stratégie, contrairement aux desiderata des députés réformateurs fidèles à leur président de groupe  sortant, je veux nommer Mamadou DIAGNE Fada. Ce dernier, apparemment, usant de bonnes tactiques, et ayant été à bonne école, celle de Abdoulaye WADE, son mentor, fin stratège politique, comme il aime à le rappeler, fit valoir son expérience de parlementaire aguerri, en se payant le luxe de dribbler ses frères de parti, décidés à ne pas se laisser faire, quoiqu’il advienne. Coup de théâtre ! La scène fut effarante ! Un vrai capharnaüm ! 


De mon point de vue, le summum des déclarations des parlementaires secoués par cette  bagarre, aura été les écarts de langage de maître El Hadj DIOUF, difficilement  oubliables ; ponctués par cette diarrhée verbale d’insanités et d’injures, déversée sur la personne du Président Moustapha NIASSE. Ce fut stupéfiant et triste ! Pourquoi  tant de haine viscérale de la part  dudit député à l’encontre de l’occupant du perchoir ; ce que nul ne pouvait s’expliquer. Quel est le mobile de cette vilénie ? Alors que, dans un passé récent, il était inimaginable de voir l’un sans l’autre, dans le véhicule du candidat de BENNOO SIGGIL SENEGAL, notamment, durant la campagne électorale des présidentielles de 2012. 

Ce genre de comportement nous instruit de nous poser des questions. En insultant le Président de l’auguste institution, fût il son collègue, ne savait il pas, ou avait il oublié que le peuple sénégalais suivait l’actualité, et partant, la jeunesse de notre pays, ses enfants à lui, ses militants, s’il en a, la progéniture de monsieur NIASSE et j’en passe. Ce comportement ne renforce t – il pas cette masse silencieuse de sénégalais, dans sa foi dans  cette assertion du Président Valérie Giscard D’Estaing : « La politique, c’est tout sauf la vertu. » ? Encourage t – il l’adolescent chez qui germe le virus de la politique, à se lancer, avec conviction, dans ce combat patriotique si noble, pour jouer sa partition dans la marche de son pays ? 

La conquête ratée d’un poste de Vice – président de l’Assemblée Nationale, semble t- il, devrait – elle valoir un tel acharnement sur cet homme qui, bon an mal an, reste un soldat de la République, au regard de son cursus politico – administratif  qui date de 1958, alors qu’il était élève en classe de seconde, au lycée Faidherbe de Saint – Louis. Du poste de Directeur de la presse et de l’information, à l’âge de 28 ans, le natif de Keur Madiabel, a occupé toutes les stations de la nomenclature administrative de la République : Directeur de cabinet du Président de la République, Ministre, Ministre d’Etat, deux fois Premier ministre et Président de l’Assemblée  Nationale.  Qu’ il me soit permis de rappeler que son poste de député n’est dû qu’à la vigilance du Président Macky SALL qui, avait constaté l’absence de son nom des listes électorales de la coalition BENNOO BOKK YAAKAAR, sur le point d’être déposées, a voulu les crédibiliser, en faisant de lui sa «Tête de liste majoritaire ». 

De là, nous est – il, encore une fois, enseigné qu’on ne force pas le destin ; que Seul Dieu a le monopole du décret de la nomination ou de l’élection de tout homme, à quelque poste que ce soit. Me rétorquera – t – on, peut être, qu’il est légitime et naturel d’être ambitieux. Oui, mais, vouloir vaille que vaille, atteindre ses objectifs, en  faisant feu de tout bois et en transgressant les règles conventionnelles établies, relève, ou de la mécréance, ou de la folie ! 

Le député modèle doit s’inspirer de ses devanciers qui ont marqué de leurs empreintes l’histoire du parlement ,qui par leur politesse, leur pertinence et leur sagesse, qui par leur intelligence, leur perspicacité et leur foi en leur peuple, je veux parler de feu Souleyemane NIANE de Nioro ; de feu Samba Laobé FALL ; de feu Fara NDIAYE ; de feu maitres Lamine GUEYE et maitre Abdoulaye WADE ; de Habib THIAM ; de docteur Daouda SOW ; des professeurs feu Assane SECK, feu Pape  Abdourahmane KANE, feu Marcel BASSENE, Amadou Makhtar MBOW et Serigne DIOP ; de Khoureychi THIAM ; des jeunes comme feu Pape Babacar MBAYE ;  Mamadou DIAGNE fada, Wack LY et autres, qui ont compris que les séniors n’ ont pas l’exclusivité de la pondération et de la sagesse. 

Ces élus, intellectuels de haut niveau, ayant bien pesé le poids de leur sacerdoce,  imbus des valeurs bien sénégalaises de courage, de courtoisie, bref de notre culture, qui imposent le respect dû aux doyens, sans faiblesse aucune, honnissaient l’impolitesse telle que constatée dans le cas d’espèces ; à fortiori, s’agissant d’un homme né en 1959, se payant le luxe, d’insulter honteusement un septuagénaire, qui a vu le jour en 1939. Vingt ans de différence d’âge ! Quel est ce sénégalais, qui ose insulter frontalement son oncle dont l’écart d’âge est similaire ? Non ! Notre culture, nos traditions et nos mœurs nous le prohibent formellement. Les sénégalais ont eu honte ! 

Que d’aventure, si l’échec de la conquête d’un titre de membre du Bureau de l’Assemblée s’avérait exact, eu égard à un prétendu choix entre Abdoulaye Makhtar DIOP et El Hadj DIOUF, pour pourvoir un poste de Vice – président de cette Chambre, la raison des concernés a parlé. Cela est trop sérieux pour être attribué à un saltimbanque imprévisible, qui aime à claironner, à tout bout de champ, qu’il est le « député du peuple », le chantre de la vérité et que sais – je. Or, est – il besoin de rappeler que le député Iba Der THIAM avait été affublé de ce titre par le peuple, lui-même, tant son travail titanesque et qualitatif abattu au sein de l’hémicycle, ne laissait personne indifférent, alors que tel n’est pas le cas, comme ailleurs. 

Je me remémore les grands débats parlementaires ayant opposé Habib THIAM à Abdoulaye WADE ; Serigne DIOP, étudiant  au Ministre Djibo Leyti KA ; Abdoulaye WADE au Ministre de l’économie et des finances,  Mamoudou TOURE ; feu Assane SECK  à Amadou FALL Puritain ; le Ministre Moustapha NIASSE au député Ousmane NGOM et tutti quanti. Le peuple en tirait vraiment des enseignements car l’intellectualité et la tenue étaient au rendez – vous. Ah oui ! Les idées volaient très haut, dans un respect mutuel dénudé de quelque complexe que ce soit. Elève au lycée Van Vollenhoven, j’ai eu la chance de suivre, avec des camarades de classe, durant nos permanences intercalées, la plupart des séances plénières évoquées plus haut. La nostalgie m’ébranle, en rédigeant ces mots. 

De grâce, par respect au peuple sénégalais dont vous détenez le mandat, épargnez nous les comportements avilissants qui, non seulement déshonorent les paltoquets qui en sont les auteurs, mais décrédibilisent cette Institution qui nous est chère. Dans la même veine, le cri du cœur du Président NIASSE, lors du vote du budget de 2016, sommant les députés d’honorer leur mandat, en venant participer aux séances plénières, laisse pantois nos concitoyens. Cet absentéisme ne saurait être toléré, surtout quand on est bien payé aux frais du contribuable. C’est une faute à corriger ! 

Quand on s‘est battu de toutes ses forces, afin de figurer, en bonne place, sur les listes électorales, en vue des législatives, pour être élu député, sa conscience devrait s’interdire certaines forfaitures. Dans ce registre, le Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale devrait être plus sévère ou, en tout cas, être amélioré quant aux sanctions à appliquer aux députés champions de l’absentéisme, insulteurs, ou, ayant un comportement qui abhorre les règles élémentaires de bienséance, de morale et de civilité. Ne serait ce que par respect au peuple ! 

A vrai dire, on n’a nullement besoin d’injurier pour communiquer, à fortiori quand on est parmi ses pairs députés. La liberté et l’indépendance d’esprit propres aux intellectuels, arrimées à un argumentaire pointu, corroboré par des idées généreuses et pertinentes, ne sauraient ne pas séduire, convaincre, voire émerveiller, entendu dans le bon sens, aussi bien le peuple que les collègues de l’hémicycle, dans la dynamique des préoccupations des sénégalais. C’est de ça, que nous voulons ! 

Aujourd’hui, tout homme politique sénégalais doit  faire son introspection, dans la mesure où, c’est devenu une rengaine, d’entendre dire par le sénégalais lambda : « les politiques ont échoué. » ou, « les politiques ont montré leurs limites. ». L’arrogance, l’impertinence et les commérages ont fini de lasser le peuple. L’homme politique doit être un modèle, une référence dont l’expression et l’action doivent susciter l’émulation. 

Le concept « Honorable Député », introduit dans la  deuxième Institution de notre République, par l’ancien Patron de la diplomatie sénégalaise, - bon à savoir -, qu’est son actuel Président, doit se mériter. Les présidents de séance, Ministres, Rapporteurs et autres, l’utilisent pour s’adresser aux représentants du peuple, or, malheureusement, tout député n’est pas honorable. De vils propos émanant d’un élu du peuple et proférés à l’encontre de la Personne morale de l’Institution, écorchant, de fait, son honneur, retirent concomitamment, ce qualificatif à son auteur, de quelque obédience politique qu’il puisse être.   

Oui, pour le respect de nos INSTITUTIONS ! 

« Honorable député », a – t  – on dit !  


Dimanche 6 Décembre 2015 05:31

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