A deux pas de la Suisse, où il possède une villa, Rue89 a rencontré des proches de l’ex-bras droit de Kadhafi, qui aurait financé la campagne 2007 du Président-candidat.
(De Prévessin-Moëns, Ain) C’est la seconde fois que la route de Bellevue, à Prévessin, attire les médias. La première, c’était en janvier 1993, quand Jean-Claude Romand a assassiné sa famille chez lui. Sa maison est encore là, à l’angle de la rue qui descend vers le centre du bourg, puis vers Ferney-Voltaire et la frontière suisse, à cinq minutes en voiture.
Pour trouver celle de Bachir Saleh (lire ci-contre), il faut rouler quelques centaines de mètres vers l’Est. Les grandes villas s’enchaînent, masquant un peu le panorama qui justifie le nom de la voie : le massif du Mont-Blanc dans toute sa splendeur.
Le lotissement de Bachir Saleh est l’un des plus luxueux de la commune, et sa villa, l’une des plus belles : 600 m2 habitables sur 5 000 m2 de terrain. Aux tarifs du secteur, un tel bien chiffre 3 à 4 millions d’euros. C’est là qu’il vit quand il est en France, et non à Bourg-en-Bresse.
Des lions de pierre gardent l’entrée de la propriété. Alors que j’approche, un chat persan s’immisce par un interstice et s’aligne une seconde entre les deux félins. Je sonne à l’interphone équipé d’une mini caméra. Le nom sur la boîte aux lettres, « Mme Kachour Kafa », est celui de l’épouse de Bachir Saleh.
Par dessus le portail, on aperçoit une pelouse entretenue au cordeau, un palmier, un bouquet de pins parasols. Un homme s’avance. La quarantaine, cheveux noirs, accent indéfinissable, une ressemblance frappante avec Mouammar Kadhafi jeune.
Il dit que Mme Kachour et M. Saleh ne sont pas là, qu’ils sont partis samedi, que lui est venu à la demande de Kafa Kachour pour tenter de rétablir l’eau chaude, parce qu’en ce 1er mai, aucun plombier n’est de service. C’est un ami, venu de Genève. Il refuse d’en dire plus : « C’est la vie privée. »
« On ne les connaît même pas » Les voisins du lotissement sont encore moins bavards. Une dame aux yeux très clairs me referme sa porte au nez. Très poliment :
Des visas français pour leurs « domestiques »
Bachir Saleh Bachir, alias Bashir Al-Shrkawi, objet d’un avis de recherche d’Interpol à la demande du gouvernement libyen, sera arrêté « s’il est recherché par Interpol », a déclaré le 1er mai Nicolas Sarkozy.
Franco-libanaise, son épouse Kafa a été condamnée la semaine dernière à deux ans de prison avec sursis et 70 000 euros d’amende pour esclavage domestique. Pendant plusieurs années, dans sa maison de Prévessin, elle a fait travailler quatre Tanzaniens à qui les passeports avaient été confisqués. Ils vivaient tous dans un des garages de la villa.
Les quatre « domestiques » étaient arrivés de Libye, accompagnant la famille Saleh, grâce à des visas délivrés par le consulat général de France à Tripoli. Selon nos informations, l’enquête sur l’affaire d’esclavage a suscité de nombreuses pressions de l’Elysée, sur la police aux frontières (PAF), chargée des investigations, comme sur le parquet.
Quand leur mère était entendue par la PAF de Bellegarde, deux des fils du couple tournaient en rond autour du pâté de maisons. L’un conduisant une Rolls Royce, l’autre une Bentley. La famille possède aussi une Venturi et deux 4X4, un Mercedes et un BMW. Ou les a possédées.
Un appartement inoccupé à Genève Car Kafa Kachour Bachir est le genre de femme à changer de voiture quand elle croise plus de cinq fois la même que la sienne, selon ce qu’elle a dit à des amis. Son dressing aligne les créations Dior, Dolce & Gabbana, Chanel. L’intérieur de la villa est meublé avec un luxe à peine ostentatoire, puisque tout n’est pas doré.
De temps à autres, Madame envoie ses gens chez Goodtaste, un restaurant-traiteur libanais installé le long de la frontière, acheter mezzés et baklavas. Le 1er mai, des limousines venues de Genève accompagnaient des clients, deux Koweïtiennes et leur chauffeur pakistanais, puis un homme d’affaires saoudien. Dépités : le restaurant était fermé. « C’est le meilleur traiteur de la région », m’a dit une des Koweïtiennes.
Sinon, chaque matin, ont raconté les « domestiques » lors du procès, il fallait acheter « quatre poulets et un mouton ». Et refaire les repas des enfants s’ils n’étaient pas contents. Me Marcel Ceccaldi, avocat de Mme Kachour, a vigoureusement contesté ces affirmations, et annoncé que sa cliente ferait appel.
Hussein, un des enfants du couple, est propriétaire depuis 2005 d’un appartement dans le centre de Genève, qu’il n’occupe pas. Il vit chez sa mère, avec son épouse et ses enfants.
Bachir Saleh Bachir n’a, aux dires de ses proches, jamais apporté en France les valises pleines de billets qu’on voyait parfois chez lui, à Tripoli. Quand il rentrait en Libye, c’était pratique : dix petites minutes de voiture séparent sa villa de l’aéroport international de Genève.
Ses poursuivants d’accord pour sa fuite, selon Sarkozy Maintenant qu’il est fiché par Interpol, il lui sera difficile de repasser par cet aéroport. Saleh serait en France avec l’autorisation des autorités libyennes... qui pourtant le recherchent.
Saleh est protégé par la France, et Sarkozy l’a affirmé :
Mercredi, il se trouvait à Paris, où un reporter de Paris Match lui a parlé, dans la rue. La veille, il avait rencontré Dominique de Villepin au Ritz.
(De Prévessin-Moëns, Ain) C’est la seconde fois que la route de Bellevue, à Prévessin, attire les médias. La première, c’était en janvier 1993, quand Jean-Claude Romand a assassiné sa famille chez lui. Sa maison est encore là, à l’angle de la rue qui descend vers le centre du bourg, puis vers Ferney-Voltaire et la frontière suisse, à cinq minutes en voiture.
Pour trouver celle de Bachir Saleh (lire ci-contre), il faut rouler quelques centaines de mètres vers l’Est. Les grandes villas s’enchaînent, masquant un peu le panorama qui justifie le nom de la voie : le massif du Mont-Blanc dans toute sa splendeur.
Le lotissement de Bachir Saleh est l’un des plus luxueux de la commune, et sa villa, l’une des plus belles : 600 m2 habitables sur 5 000 m2 de terrain. Aux tarifs du secteur, un tel bien chiffre 3 à 4 millions d’euros. C’est là qu’il vit quand il est en France, et non à Bourg-en-Bresse.
Des lions de pierre gardent l’entrée de la propriété. Alors que j’approche, un chat persan s’immisce par un interstice et s’aligne une seconde entre les deux félins. Je sonne à l’interphone équipé d’une mini caméra. Le nom sur la boîte aux lettres, « Mme Kachour Kafa », est celui de l’épouse de Bachir Saleh.
Par dessus le portail, on aperçoit une pelouse entretenue au cordeau, un palmier, un bouquet de pins parasols. Un homme s’avance. La quarantaine, cheveux noirs, accent indéfinissable, une ressemblance frappante avec Mouammar Kadhafi jeune.
Il dit que Mme Kachour et M. Saleh ne sont pas là, qu’ils sont partis samedi, que lui est venu à la demande de Kafa Kachour pour tenter de rétablir l’eau chaude, parce qu’en ce 1er mai, aucun plombier n’est de service. C’est un ami, venu de Genève. Il refuse d’en dire plus : « C’est la vie privée. »
« On ne les connaît même pas » Les voisins du lotissement sont encore moins bavards. Une dame aux yeux très clairs me referme sa porte au nez. Très poliment :
« Merci beaucoup, mais ça ne m’intéresse pas. »Le maire de Prévessin-Moëns, Jean-Paul Laurenson (divers gauche), est plus disert que ses administrés. Quand il prononce des chiffres, il dit « septante » et « nonante », comme les Suisses.
« Dans ce lotissement, les gens se parlent à peine entre eux, ils sont très discrets. Ce sont surtout des étrangers. Les Kachour-Bachir, ils sont ici depuis une dizaine d’années, mais on ne les connaît même pas. »Rue89 a retrouvé trois proches du couple, qui ont accepté de s’exprimer. Mais sous couvert d’anonymat : les circonstances actuelles accentuent le risque de représailles, disent-ils.
Des visas français pour leurs « domestiques »
Bachir Saleh Bachir, alias Bashir Al-Shrkawi, objet d’un avis de recherche d’Interpol à la demande du gouvernement libyen, sera arrêté « s’il est recherché par Interpol », a déclaré le 1er mai Nicolas Sarkozy.
Franco-libanaise, son épouse Kafa a été condamnée la semaine dernière à deux ans de prison avec sursis et 70 000 euros d’amende pour esclavage domestique. Pendant plusieurs années, dans sa maison de Prévessin, elle a fait travailler quatre Tanzaniens à qui les passeports avaient été confisqués. Ils vivaient tous dans un des garages de la villa.
Les quatre « domestiques » étaient arrivés de Libye, accompagnant la famille Saleh, grâce à des visas délivrés par le consulat général de France à Tripoli. Selon nos informations, l’enquête sur l’affaire d’esclavage a suscité de nombreuses pressions de l’Elysée, sur la police aux frontières (PAF), chargée des investigations, comme sur le parquet.
Quand leur mère était entendue par la PAF de Bellegarde, deux des fils du couple tournaient en rond autour du pâté de maisons. L’un conduisant une Rolls Royce, l’autre une Bentley. La famille possède aussi une Venturi et deux 4X4, un Mercedes et un BMW. Ou les a possédées.
Un appartement inoccupé à Genève Car Kafa Kachour Bachir est le genre de femme à changer de voiture quand elle croise plus de cinq fois la même que la sienne, selon ce qu’elle a dit à des amis. Son dressing aligne les créations Dior, Dolce & Gabbana, Chanel. L’intérieur de la villa est meublé avec un luxe à peine ostentatoire, puisque tout n’est pas doré.
De temps à autres, Madame envoie ses gens chez Goodtaste, un restaurant-traiteur libanais installé le long de la frontière, acheter mezzés et baklavas. Le 1er mai, des limousines venues de Genève accompagnaient des clients, deux Koweïtiennes et leur chauffeur pakistanais, puis un homme d’affaires saoudien. Dépités : le restaurant était fermé. « C’est le meilleur traiteur de la région », m’a dit une des Koweïtiennes.
Situé côté français de la frontière, Goodtaste, le traiteur libanais le plus prisé de la région genevoise (Augustin Scalbert/Rue89)
Hussein, un des enfants du couple, est propriétaire depuis 2005 d’un appartement dans le centre de Genève, qu’il n’occupe pas. Il vit chez sa mère, avec son épouse et ses enfants.
Bachir Saleh Bachir n’a, aux dires de ses proches, jamais apporté en France les valises pleines de billets qu’on voyait parfois chez lui, à Tripoli. Quand il rentrait en Libye, c’était pratique : dix petites minutes de voiture séparent sa villa de l’aéroport international de Genève.
Ses poursuivants d’accord pour sa fuite, selon Sarkozy Maintenant qu’il est fiché par Interpol, il lui sera difficile de repasser par cet aéroport. Saleh serait en France avec l’autorisation des autorités libyennes... qui pourtant le recherchent.
Saleh est protégé par la France, et Sarkozy l’a affirmé :
« L’arrivée de M. Saleh en France a été faite avec le plein accord du président [du Conseil national de transition libyen Mustapha] Abdeljalil. »Plusieurs sources affirment que ce « plein accord » a été obtenu grâce à des pressions amicales de la France. Prisonnier d’une tribu libyenne, l’homme des petits et grands secrets de Kadhafi a été libéré en février, avant d’être accueilli dans l’hexagone, où lui et sa famille sont sous protection policière française.
Mercredi, il se trouvait à Paris, où un reporter de Paris Match lui a parlé, dans la rue. La veille, il avait rencontré Dominique de Villepin au Ritz.
A dix minutes de l’aéroport de Genève, Prévessin-Moëns accueille de nombreux riches étrangers (Augustin Scalbert/Rue89)
Source: Rue89.com