Le limogeage de Moustapha Cissé Lo a fait l’actualité dernièrement. Comment l’avez-vous apprécié ?
Ce cas n’est plus d’actualité, il est même banal dans la mesure ou la nomination ou le fait de limoger quelqu’un relève d’une part des prérogatives exclusives du Président de la République. D’autre part, cela arrive tous les jours. Alors pour moi ce n’est pas une question d’actualité parce que la question d’actualité est de l’ordre du nouveau, de l’ordre de ce qui est tout à fait crucial qui concentre l’opinion sur un sujet brulant sur un jour, deux, trois voire une semaine, de façon globale. L’autre aspect, c’est que les motivations du Président de la République ne s’expriment pas. Il a la prérogative, il a le droit et du point de vue politique, ce qui est absolument certain c’est qu’il y’aura un traitement de la question dans des espaces appropriés. Quand au parti, je pense qu’il saura être un et saura se mobiliser derrière son leader qui se trouve être le Président de la République et si jamais contradictions il y’avait, dépasser les contradictions pour s’orienter vers l’essentiel. Et l’essentiel, c’est ce que le Président Macky Sall appelle la primauté de la patrie sur le parti.
Oui mais vous personnellement, est-ce que vous approuvez ce limogeage ?
Je ne commente pas une décision du Président de la République parce que je suis son conseiller alors il n’est pas question que je commente. Je m’en tiens à ce que le porte parole du Président de la République a dit.
Donc cela veut dire que vous êtes d’accord que Cissé Lô soit limogé…
(il coupe) Non ce n’est pas une question d’être d’accord ou de ne pas être d’accord. Quand le Chef de l’Etat prend une décision, moi en tant que conseiller ou ministre, je ne peux pas me permettre de faire des commentaires. C’est pourquoi j’ai dit que je m’en tiens à ce que le Président de la République a fait. Je ne crois pas que ce soit franchement une question qui puisse être au cœur de mes préoccupations centrales. Ce sont des choses qui arrivent, on peut limoger n’importe qui et on peut nommer n’importe qui, l’essentiel c’est de prendre acte de la décision du Président de la République qui ne viole pas la Constitution, qui ne viole pas un pacte. Le seul pacte entre un Chef d’Etat et ses collaborateurs, c’est celui de la conscience. Mais on peut limoger quelqu’un pour telle ou telle raison tout en gardant conscience. Ce qui s’est passé, s’est passé donc je ne souhaite pas outre mesure y insister.
Beaucoup de gens ont été stupéfaits d’apprendre que Moustapha Cissé Lô a été limogé parce qu’il a dit ce qu’il pense. Est-ce que Macky Sall est véritablement un démocrate ?
Je crois avoir répondu par rapport à cette question.
Il semble qu’un réel désordre, pour ne pas dire crise, règne au sein de l’Apr. Certains membres de ce parti n’hésitent pas à exposer leurs querelles sur la place publique. Etes-vous conscients que cela ne rend pas service au Chef de l’Etat ?
Vous savez, l’Apr est un parti démocratique, ouvert, un parti ou on retrouve une diversité de sensibilités, des profils tout aussi divers et différents, ou on retrouve des trajectoires différentes. Ensuite c’est un parti qui est né il n’y a pas très longtemps, on l’oublie très souvent parce que c’est un parti qui est né en 2009, précisément au mois de décembre. C’est un parti de type nouveau parce que si vous remarquez bien, ce n’est pas un parti rigidement hiérarchisé comme les partis classiques de façon générale. Il est donc tout à fait normal qu’il y’ait des débats, des querelles positives, des contradictions et cela donne de la vitalité à un parti parce que c’est corps vivant. Même dans une famille, entre époux et épouse, il peut y avoir des contradictions, des disputes, même entre des enfants et leurs parents, à fortiori un organisme qui est aussi vaste, qui regroupe des expériences aussi diverses, des profils aussi divers, des centres d’intérêt aussi divers mais également des trajectoires tout à fait différentes en terme d’éducation, en terme d’expérience politique, en terme d’âge, en terme de sexe, en terme de lieu de résidence, en terme de niveau d’instruction, etc. etc. vous savez, moi en tant que philosophe, je parle toujours d’un grand philosophe Hegel qui dit que pour que la vie soit, il faut pousser les contradictions jusqu’à leur limite extrême parce que c’est à la pointe de ces contradictions que la diversité devient mobile et vivante, les singularités s’affirment et à ce moment là, il y’a une nouvelle dynamique, une nouvelle unité, une nouvelle vie. Alors je pense que c’est très important aussi que dans nos partis, on les débats, les querelles. Mais la querelle au sens de la dispute dont l’enjeu central est l’intérêt du pays. Je rappelle toujours cet énoncé très fort du Président Macky Sall qui est contenue dans la déclaration fondatrice de l’Apr : « la patrie prime sur le parti ».
Ne dit-on pas que le linge sale se lave en famille ?
Y’a pas de linge sale qui se lave en famille. Je pense qu’il y’a une partie des cadres qui a donné son point de vue sur ce que vous appelez « l’affaire Moustapha Cissé Lô ». Une autre partie des cadres a aussi donné son point de vue, toujours est-il qu’en dernière analyse, ce qui fait l’autorité c’est d’abord la démocratie interne qui s’est s’exprimée. Il ne faut pas confondre la réalité interne du parti et la réalité de l’Etat où la décision a été prise. Ce sont des sphères tout a fait différente. L’Apr en tant que parti politique a, à travers ses diverses sensibilités, le droit et même l’obligation d’avoir une position mais cela n’est pas fondamentalement l’affaire de l’Apr mais l’affaire de l’Etat, du Chef de l’Etat et de ses collaborateurs. A part des gens qui peuvent ne pas être d’accord, je n’ai pas vu des disputes crypto personnelles au sein de l’Apr.
Etes vous d’accord pour que la présidence de l’Assemblée nationale revienne à Moustapha Niasse ?
Je m’en tiens à la décision du leader de la coalition Benno Bokk Yaakaar ainsi qu’à la décision des instances. Le Président Macky Sall avait dit que ce sont les députés qui doivent élire le président de l’Assemblée nationale et je pense que le Président de la République, le président de l’Apr, leader de la coalition Benno Bokk Yaakaar a parfaitement le droit d’avoir son choix par rapport à la présidence de l’Assemblée nationale, contrairement à ce que certains disent. Il y’a séparation des pouvoirs mais il y’aussi continuité politique entre l’Exécutif et le Législatif pour la bonne et simple raison que si le Législatif est configuré de telle manière que c’est l’opposition qui domine, il y’a un impact immédiat sur l’Exécutif. C’est à la limite une logique banale. Du point de vue de l’architecture des pouvoirs, il y’a séparation mais du point de vue politique, il y’a une sorte de continuité, une sorte de transitivité au sens où l’Assemblée nationale n’est pas à la solde de l’Exécutif par contre elle peut soutenir l’Exécutif dans son projet fondamental de changer le pays.
Donc on est d’accord que le Chef de l’Etat a le droit d’avoir son choix sur le président de l’Assemblée nationale mais pas de le nommer ?
Le Président de la République ne nomme pas le président de l’Assemblée nationale, il ne peut pas le faire. En revanche, il peut inciter son groupe parlementaire à l’intérieur de l’hémicycle de porter son choix sur tel ou tel. Et c’est toujours une position argumentée. Vous savez, en politique les évidences peuvent être fatales et donc il ne faut jamais se fier aux seules évidences. La politique, c’est une intelligence d’abord. C’est vrai que c’est un art mais un art qui implique une bonne part de calculs et de stratégies. Donc le Président de la République, en fonction des paramètres qu’il maitrise, en fonction de la visibilité qu’il a de la configuration politique, en fonction des engagements, en fonction également de l’intérêt supérieur du pays, il peut porter son choix sur Moustapha Niasse.
Etes-vous d’accord sur le choix porté sur Moustapha Niasse ?
On verra ! Moi personnellement je ne vois pas pourquoi quelqu’un comme Moustapha Niasse ne peut pas être président de l’Assemblée nationale. C’est le militant qui parle, pas le conseiller spécial du Président de la République. Pour le Président Macky Sall, il y’a au moins trois piliers dans l’action de changement de ce pays. D’abord, il dit qu’il faut un nouvel ordre de priorités. Cela veut dire que l’action méthodique raisonnée et patiente de l’Etat va s’appuyer sur l’identification des priorités des sénégalais et non sur ce que veut le dirigeant ou le Gouvernement. Il faut partir des préoccupations des sénégalais : la santé, l’eau potable, les infrastructures routières notamment, l’éducation, etc. La question de l’emploi, même si on ne la nomme pas de façon explicite, est à l’intérieur de ces questions adressées dans le nouvel ordre de priorités. Le deuxième pilier, philosophique, c’est le fait que l’Etat, la patrie, prime sur le parti. Cela veut dire que l’intérêt étroitement partisan n’est plus un indicateur de performance, n’est plus le critère de choix et d’orientation. Le Président Sall dit : « il faut savoir partager, y compris le pouvoir qui n’est pas une fin en soi, qui est un moyen pour atteindre des objectifs précis, notamment l’objectif de changer ce pays ». Donc ça c’est un pilier fondamental essentiel. Et dès lors que nous avons un nouvel ordre de priorités, il nous faut une conception du pouvoir qui se base sur un large consensus, sur ce qu’on peut appeler des convergences minimales fortes qui impliquent une gestion partagée du pouvoir. Et donc le Président Sall n’a pas de fixation partisane. Il a une ambition consensuelle, une ambition de rassemblement, une ambition de construire des convergences minimales très fortes entre divers acteurs politiques que nous appelons les forces vives de la Nation pour entreprendre le projet de transformation du pays qui obéit au nouvel ordre de priorité. Je crois que vous voyez un peu la continuité entre le nouvel ordre de priorités et la primauté de la patrie sur le parti. Et enfin, le troisième pilier qui est fondamental, c’est la nouvelle gouvernance sobre, vertueuse et efficace. Alors ces trois piliers là sont solidaires et corrélatifs car l’un ne va pas sans l’autre. Dès lors que nous avons un nouvel ordre de priorité, la primauté de la patrie sur le parti et une nouvelle gouvernance qui vient soutenir les efforts des différents acteurs réunis autour des intérêts du pays pour mettre en œuvre un nouvel ordre de priorité (…). C’est une dialectique claire et à mon avis, si on part de cela, ce qui importe, ce ne sont plus les individus mais les processus, c’est-à-dire l’intégration de ces individus là dans les processus pour mettre en œuvre les priorités essentielles des sénégalais.
Mais vous arrive-t-il de penser à une probable implosion de Benno Bokk Yaakaar qui est une coalition essentiellement composée de partis politiques d’idéologies différentes ?
Vous savez, nous sommes historiquement dans l’ère de ce qu’on peut appeler, pas la fin des idéologies, mais de l’atténuation des clivages idéologiques. Aujourd’hui, quelque soit le profil politique, l’identité politique des composantes de Bokk Yaakaar, tout le monde est d’accord qu’il y’a des défis. Aucun sénégalais ne peut contester le nouvel ordre de priorités identifié par le Président Macky Sall à savoir la santé, l’eau potable, les infrastructures routières, l’éducation, l’emploi, etc. Personne ! Tout le monde est d’accord ! Ensuite, sans qu’on soit libéral, communiste ou autre, on ne peut pas ne pas être d’accord. Vous savez pourquoi ? Parce que simplement nous sommes dans un pays où il y’a ce qu’on peut appeler le défi du minimum, c’est-à-dire le défi du minimum social obligatoire pour chacun d’entre nous puisse vivre décemment, dignement et en sécurité. Il y’a des poches de pauvreté à Dakar même, des zones dans la proche banlieue ou on ne trouve pas de l’eau potable, ni de l’électricité, ni des marchés décents, ni des routes décentes praticables, à fortiori à l’intérieur du pays. Et ce sont des questions de base que nous n’avons pas encore réglées. Vous savez, aux Etats-Unis, en France, dans tous les pays où ces problèmes ont été réglés, vous n’entendrez jamais un candidat à la Présidence de la République dire : « je vais construire la route entre, par exemple, Washington et Philadelphie ou bien entre Toulouse et Paris ». Non ! Parce que ce sont des questions historiques et donc elles sont historiquement dépassées. Vous n’entendrez pas non plus dans ces pays, un candidat aux élections présidentielles dire qu’il va créer une école dans tel village de sérères ou de toucouleurs (rires). Ou dire qu’il va créer une université, ou un aéroport, un hôpital, un dispensaire, parce que ce sont des infrastructures de base, c’est réglé !
Est-ce à dire que vous croyez en la solidité de Benno Bokk Yaakaar ?
Je pense que si tous les acteurs modèlent leur comportement à la lumière de l’énoncé du Président Sall, de la primauté de la patrie sur le parti, alors oui ! Cette coalition peut persister, durer, être victorieuse dans l’œuvre d’édification d’un Sénégal nouveau.
Il se dit que Macky Sall a commis l’erreur politique d’aller aux élections présidentielle et législative avec Benno Bokk Yaakaar au détriment de la coalition Macky 2012. Commentaires ?
Ce n’est pas mon point de vue. Si vous suivez l’exposé que je viens de vous faire, vous verrez une cohérence interne. Si le Président Macky Sall part du fait que la patrie prime sur le parti, il ne peut pas être dans une démarche sectaire, solitaire, exclusiviste. Il ne faut pas oublier qu’au second tour, la coalition qui est sortie victorieuse autour du Président Macky Sall, c’est la coalition Benno Bokk Yaakaar. Et par conséquent, si nous voulons être cohérents avec notre démarche, nous sommes obligés de créer les conditions pour que les forces vives de la Nation se mobilisent dans le cadre de cette coalition là pour entreprendre l’œuvre d’édification du Président, l’œuvre de construction d’un Sénégal nouveau. Sinon ce qui va se passer, c’est que chacun va retourner dans sa chapelle, nous allons être dans une campagne électorale permanente, nous allons être dans une confrontation permanente entre des majorités et des minorités parlementaires pendant que nous n’avons pas encore réglé le minimum. Vous savez, aujourd’hui c’est Macky Sall, dans 10 ans je le souhaite après son deuxième mandat, ce sera certainement un autre. Mais les questions de base sont encore là alors autant construire des consensus très fort pour régler ces questions de base. Les gens se trompent ! Nous, notre modèle démocratique ne peut pas forcément fonctionner comme le modèle démocratique qui a atteint sa maturité à l’Occident, une confrontation permanente entre majorité et minorité parlementaires. Nous sommes donc obligés de passer par une longue étape, une longue période de convergence minimale de toutes les forces politiques, de toutes les forces vives de la Nation, des acteurs politiques majeurs. Même si je ne conteste pas qu’on ait besoin d’une opposition mais tout de même, le plus fondamental c’est de construire de très forts consensus, des convergences minimales sérieuses …
On dirait que vous n’êtes pas contre les retrouvailles de la grande famille libérale prônées dernièrement par l’ancien Président Wade …
Je ne sais pas ce que c’est « retrouvailles de la famille libérale » et comme je ne suis pas libéral, je ne peux pas me prononcer sur cela.
En substance, Wade veut tout simplement que Macky Sall et ses anciens camarades du Pds fument le calumet de la paix afin de travailler ensemble …
Il y’a certaines personnes du Pds que j’appelle, moi, les bastions démocratiques. Vous savez, ce que beaucoup de gens n’ont pas compris, c’est que y compris pendant le second tour, il y’avait des bastions démocratiques au sein du Pds qui, par cohérence sont allés avec Wade et qui sont retournés au second tour pour aller avec le Président Macky Sall parce que justement, pour eux, le premier tour c’était une sorte de primaire. Ce sont des gens qui s’étaient engagés de façon tout à fait militante, par conviction mais qui ont basculé dans le camp du changement. Et je pense qu’on n’en a pas suffisamment parlé. Si ces forces vives là sont aujourd’hui dans la disposition de travailler au renforcement de la dynamique victorieuse du 25 mars, au nom de quoi le Président Macky Sall ne leur dirait pas de venir ?
Donc vous encouragez la transhumance ?
Cela n’a rien à voir avec la transhumance. Je pense que les bastions démocratiques qui étaient au Pds, qui sont composés de forces vives, qui ne sont pas mêlés à des scandales politico-financiers, qui acceptent le projet que le Président Macky Sall a proposé aux sénégalais, sont forcément les bienvenus.
Vous pensez à qui exactement ? Peut-on avoir des noms ?
Non ! Ce n’est pas une question de noms. Bon c’est vrai que vous les journalistes vous aimez le sensationnel (rires) mais ce n’est pas une question de noms. C’est une question de courant, de sensibilité, de vision, une question de perspective politique. Les bastions démocratiques peuvent être définis comme des mouvements vastes au sein d’un parti ou d’un camp qui s’inscrivent dans une perspective démocratique et qui par conséquent, peuvent être considérés comme des alliés stratégiques dans une séquence bien déterminée de l’histoire. Et aujourd’hui, il y’a des bastions démocratiques à l’intérieur du Pds et je pense qu’ils devraient se mobiliser avec les forces victorieuses du 25 mars et ce serait tout bénef pour notre pays.
A présent parlons de vos conseils des ministres décentralisés. On constate qu’il n’y en a plus depuis la fin des législatives. Il semble que vous donnez raison à vos adversaires qui disaient que c’était une campagne électorale déguisée …
Il n’y a pas de conseils des ministres décentralisés parce que d’abord il y’avait les élections et immédiatement après, il fallait suivre le processus de près. Mais ils vont reprendre le 26 prochain à Diourbel. Contrairement à ce qui se disait, il ne s’agissait pas d’une campagne électorale déguisée, c’était une modalité de mise en œuvre de concepts de proximité entre le pouvoir central et les populations à la base. Et cela va continuer dans toutes les 14 régions. Maintenant, il va avoir des pauses certainement mais le prochain se fera à Diourbel ainsi de suite jusqu’à ce que d’ici la fin du premier quinquennat, toutes les régions soient couvertes.
Le Président Macky Sall n’a pas encore supprimé le Sénat et pourtant c’est inscrit dans la charte des Assises nationales. N’est-ce pas là un début de trahison envers ses alliés ?
Mais non ! Vous savez, beaucoup de gens là aussi font des confusions. Nous, nous avons présenté un programme dès le premier tour intitulé Yonou Yokkuté et dans ce programme, on n’a parlé nulle part de suppression du Senat. Ensuite, nous n’avons pas pris les conclusions des Assises nationales pour dire que c’est notre programme.
Mais Macky Sall avait signé la charte des Assises nationales et il a été convenu avec ses alliés qu’il doit respecter les conclusions …
Oui il avait signé ça. Mais attendez, il y’a la charte des Assises nationales et il y’a notre programme. C’est sur la base de ce programme que Macky Sall a été élu. Il n’y a pas de contradiction. Pour le moment, il peut sur la base d’une analyse sur l’architecture institutionnelle de notre pays, dire que le Senat est nécessaire. Toutefois, il va sans doute proposer un nouveau mode de désignation des membres du Senat. Vous savez, avant l’essentiel des sénateurs étaient désignés par le Président de la République, je crois que c’était dans l’ordre de 65 ou 35%. Peut être qu’on va inverser et donc, au lieu que le Président désigne les 65, ces derniers seront élus et les 35 désignés. Et la désignation, c’est pour tenir compte d’un certain nombre d’équilibres qu’une élection ne prend pas forcément en charge. Il n’y a vraiment pas de trahison des Assises nationales mais vous savez à l’épreuve du pouvoir, on a tout de même l’obligation de tenir compte de la réalité, d’avoir une analyse fine de ces réalités là et par conséquent d’en tirer les conclusions.
Que répondez-vous, si on vous dit que Macky Sall est un Président par défaut. Autrement dit, les sénégalais ont voté contre Wade plutôt que pour Macky Sall ?
Ce sont des formules ! 65% de la population votent Macky Sall au second tour et on dit qu’ils n’ont pas voté pour Macky Sall, ils ont chassé Wade. Cela n’a pas de sens ! C’est de la formule dont le contenu est très discutable. La vérité, c’est que il y’avait une lame de fond. Les sénégalais avaient besoin d’un changement, d’un nouveau visage. Dès le premier tour, celui qui a incarné ce changement là c’est Macky Sall et les sénégalais l’ont confirmé au second tour. Donc tout le reste, c’est de l’ordre de la formule. C’est très difficile, c’est comme si on disait que la poule est première par rapport à l’œuf ou que l’œuf est premier par rapport à la poule. C’est trop métaphysique.
La photo officielle du Chef de l’Etat est très controversée. Plusieurs observateurs soutiennent qu’elle est de mauvaise qualité. Pensez-vous à la refaire ?
Il y’en a qui ont dit que c’est une photo de très bonne qualité, d’autres ont dit qu’elle n’est pas de bonne qualité. Bon ! Vous savez, le roman de Proust, « à la recherche du temps perdu », est passé inaperçu dès qu’il a été publié alors que c’est une œuvre majeure. Les poèmes de Mallarmé, c’est l’invention poétique même mais c’est passé inaperçu immédiatement après publication. Dans notre pays, l’aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane était une œuvre à la limite anonyme mais c’est après qu’elle a pris son envol. Donc les œuvres d’art peuvent recevoir ou être reçu de telle ou de telle manière mais ce qui est fondamental, c’est la subjectivité de celui qui l’a réalisé. Ce qui est fondamental, c’est que le contenu de cette œuvre, la photo du Président Macky Sall, est en partage et quand c’est en partage, quand ça touche à la subjectivité des uns et des autres, la polémique est inévitable.
Astou Winnie BEYE
LE PAYS AU QUOTIDIEN