Walf Grand-Place : Après 10 jours de détention préventive, vous avez recouvré la liberté suite à un sursis de 3 mois…
Fou Malade : Je réitère mes excuses à l'endroit de mon plaignant Gaston qui a eu un esprit de dépassement. Parce qu'à mon niveau, c'était une bagarre qui aurait pu me conduire à une peine d'emprisonnement de plusieurs années parce que je suis allé chez lui, la nuit, l'agresser. En réalité, je me suis battu avec lui. J'étais avec mes amis. Je salue sa grandeur et je réitère mes excuses. Je prends mon passage en prison avec philosophie parce que quelque chose me lie à cet endroit. Depuis mon premier album, j'aborde le thème de la vie carcérale. Par la même manière, je mène des activités de réinsertion et de formation dans les prisons. Peut-être qu'il fallait passer par ça pour mieux connaître l'endroit. Ce que je disais de la prison, on me l'avait juste raconté. Maintenant, je pense que c'est du déjà vécu. J'ai passé des jours à la maison d'arrêt de Reubeuss.
Comment avez-vous vécu votre première nuit en cellule ?
Sereinement. Lorsque je suis arrivé, j'ai été bien accueilli par les détenus de la chambre 14 qui pensaient que j'étais la personne qui les défendait. Paul et consorts m'ont ouvert les portes. J'ai bien dormi. Et cela m'a rappelé mon enfance, le ghetto. Je suis issu d'une grande famille où il nous est arrivé de dormir à plusieurs dans une pièce. Je profite de l'occasion pour remercier mes parents qui m'ont forgé à faire face à toutes sortes d'épreuves. On était 71 personnes dans la chambre. Les gens dorment superposés. C'est ce qu'on appelle paquétas. Pour les flagrants délits, c'est ainsi. À l'intérieur de la chambre avec une toilette, deux grilles et les gens sont entassés dedans.
Et la nourriture ?
La ration des prisonniers, c'est du riz mal cuit. Au petit-déjeuner, ils servent de petits pains avec du kinkéliba et rarement du lait. Le soir, c'est de la bouillie ou du couscous dans lequel on retrouve des insectes. Le riz n'est pas trié. J'avoue que je ne l'ai pas mangé. On partageait nos repas. Tous les produits qui viennent du dehors sont appelés «en ville». On constituait des groupes pour partager nos mets. Il y a des chambres où l'on compte 210 personnes. Ce qui est frappant, c'est que les gens acceptent leur destin et se résignent. Aussi beaucoup attendent leur jugement. J'ai vu quelqu'un qui a fait 10 ans sans être jugé. Six mois, ça suffit pour aller devant le juge.
Qu'est-ce qui vous a le plus marqué en prison ?
La force dont font preuve les détenus pour contenir leur souffrance. Parce que d'aucuns perdent la tête en prison à cause du mal qu'ils ont commis ou des difficiles conditions de détention. La pause ne dure que 2 heures. On fait les cent pas dans un espace étroit. Malgré tout, les prisonniers sont organisés pour ne pas capter des maladies.
J'ai rencontré des camarades de classe, de vieilles personnes âgées de plus de 60 ans, des tout-petits qui s'intéressent à lutte. Les gens ne font rien à part manger et dormir. Alors que la prison devrait organiser des sessions de formation. D'aucuns se sont plaints de la justice. Parce qu'ils veulent être jugés. C'est leur droit. Les conditions de détention préventive sont déplorables. On n’est pas des animaux. Quel que soit le délit, la personne doit être jugée. Par ailleurs, le ministère de la Justice doit travailler avec la police. Les détenus soutiennent qu'ils sont souvent torturés par les policiers pour leur soutirer des informations. Parfois, on leur force à avouer des choses qu'ils n'ont pas faites. C'est une injustice. On voit des jeunes affamés. Quelle que soit la maladie du détenu, on le soigne avec du paracétamol et de l'aspirine. On dort presque torse nu. Les gens reviennent battus de la police. L'infirmerie n'est pas bien équipée. Des détenus meurent à cause des tortures policières. La question des conditions de détention est sérieuse et les candidats à la présidentielle doivent en tenir compte. Il y a les rats dans les chambres, les fosses puent. Les prisonniers souffrent de beaucoup de maladies. On partage la cellule avec eux.
Quand j'ai demandé à être avec mes amis Raoul, David et Dominique, le chef m'a dit que je n'étais pas un détenu spécial. Ce que j'ai accepté. Je restais là où on me demandait.
«J’attends mon jugement au tribunal de Y’en a marre»
On ne vous a pas torturé ?
On ne m'a jamais brutalisé. J'ai lu dans un journal que j'étais activement recherché par la Dic. Ce qui n'est pas vrai. J'ai téléphoné au commissaire Arona Sy qui me l'a confirmé. Je n'avais pas reçu de convocation. Ils m'ont dit qu'ils se sont rendus à Guédiawaye. Je leur ai répondu que je n'habitais plus là-bas. Même si j’y ai grandi. Je me suis rendu au commissariat central. On m'a interrogé, j'ai reconnu les faits et je me suis excusé.
Qu'est-ce qui vous a pris d’agresser votre collègue rappeur ?
Je regrette ce que j'ai fait. Mais, vous savez un être humain a des pulsions qu'on n'arrive pas toujours à contrôler. J'étais énervé.
Est-ce que vous n'avez pas été influencé ?
Non, les décisions que je prends me concernent. Je n'avais pas envie de commanditer un truc sans y être. Pour moi, c'est lâche. Je partais le voir pour discuter. On était en froid depuis quelque temps. On ne se parlait pas. J'avais entendu dire que des jeunes de son groupe s'apprêtaient à venir attaquer mon studio et que Gaston préparait un album pour me clasher. J'ai agi sans réfléchir. Je ne devais pas me fonder sur des rumeurs. J'étais très fâché contre Gaston. J'ai fauté, j'ai déconné. Il a été grand. C'était quelque chose que je pouvais éviter. Je vais lui téléphoner. Je lui ai présenté mes excuses. Et la police m'a demandé de revenir le lendemain. Je n'ai pas compris leur jeu. Heureusement que les gens m'ont soutenu. Ma famille, ma femme, mes amis, mon grand frère Thierno Talla qui a beaucoup souffert de mon arrestation.
«Y'en a marre» vous a aussi suspendu ?
Je m'en réjouis parce que cela fait partie du règlement intérieur du mouvement. Il devait se démarquer. Le mouvement est grand. Et s'il essaie de justifier mon acte, cela veut dire qu'il est mon complice. Quand ils m'ont demandé si j'allais accepter d'être mis en quarantaine, je leur ai répondu que j'allais le faire moi-même. J'ai fauté et je le reconnais. J'en profite pour saluer le travail de la justice qui a refusé la manipulation. De même, mes avocats qui m'ont défendu gratuitement. J'attends mon jugement devant le tribunal de «Y'en a marre». Je ne dois pas prendre part à leurs activités d'ici à quelque temps.
Cela vous manque ?
Bien sûr. Mais, mon séjour m'a permis de découvrir le milieu carcéral. Parce que depuis 2009, je suis interdit d'accès à la prison par l'ancien régisseur du camp pénal, Saliou Sall.
(Source : Walf Grand-Place)
Fou Malade : Je réitère mes excuses à l'endroit de mon plaignant Gaston qui a eu un esprit de dépassement. Parce qu'à mon niveau, c'était une bagarre qui aurait pu me conduire à une peine d'emprisonnement de plusieurs années parce que je suis allé chez lui, la nuit, l'agresser. En réalité, je me suis battu avec lui. J'étais avec mes amis. Je salue sa grandeur et je réitère mes excuses. Je prends mon passage en prison avec philosophie parce que quelque chose me lie à cet endroit. Depuis mon premier album, j'aborde le thème de la vie carcérale. Par la même manière, je mène des activités de réinsertion et de formation dans les prisons. Peut-être qu'il fallait passer par ça pour mieux connaître l'endroit. Ce que je disais de la prison, on me l'avait juste raconté. Maintenant, je pense que c'est du déjà vécu. J'ai passé des jours à la maison d'arrêt de Reubeuss.
Comment avez-vous vécu votre première nuit en cellule ?
Sereinement. Lorsque je suis arrivé, j'ai été bien accueilli par les détenus de la chambre 14 qui pensaient que j'étais la personne qui les défendait. Paul et consorts m'ont ouvert les portes. J'ai bien dormi. Et cela m'a rappelé mon enfance, le ghetto. Je suis issu d'une grande famille où il nous est arrivé de dormir à plusieurs dans une pièce. Je profite de l'occasion pour remercier mes parents qui m'ont forgé à faire face à toutes sortes d'épreuves. On était 71 personnes dans la chambre. Les gens dorment superposés. C'est ce qu'on appelle paquétas. Pour les flagrants délits, c'est ainsi. À l'intérieur de la chambre avec une toilette, deux grilles et les gens sont entassés dedans.
Et la nourriture ?
La ration des prisonniers, c'est du riz mal cuit. Au petit-déjeuner, ils servent de petits pains avec du kinkéliba et rarement du lait. Le soir, c'est de la bouillie ou du couscous dans lequel on retrouve des insectes. Le riz n'est pas trié. J'avoue que je ne l'ai pas mangé. On partageait nos repas. Tous les produits qui viennent du dehors sont appelés «en ville». On constituait des groupes pour partager nos mets. Il y a des chambres où l'on compte 210 personnes. Ce qui est frappant, c'est que les gens acceptent leur destin et se résignent. Aussi beaucoup attendent leur jugement. J'ai vu quelqu'un qui a fait 10 ans sans être jugé. Six mois, ça suffit pour aller devant le juge.
Qu'est-ce qui vous a le plus marqué en prison ?
La force dont font preuve les détenus pour contenir leur souffrance. Parce que d'aucuns perdent la tête en prison à cause du mal qu'ils ont commis ou des difficiles conditions de détention. La pause ne dure que 2 heures. On fait les cent pas dans un espace étroit. Malgré tout, les prisonniers sont organisés pour ne pas capter des maladies.
J'ai rencontré des camarades de classe, de vieilles personnes âgées de plus de 60 ans, des tout-petits qui s'intéressent à lutte. Les gens ne font rien à part manger et dormir. Alors que la prison devrait organiser des sessions de formation. D'aucuns se sont plaints de la justice. Parce qu'ils veulent être jugés. C'est leur droit. Les conditions de détention préventive sont déplorables. On n’est pas des animaux. Quel que soit le délit, la personne doit être jugée. Par ailleurs, le ministère de la Justice doit travailler avec la police. Les détenus soutiennent qu'ils sont souvent torturés par les policiers pour leur soutirer des informations. Parfois, on leur force à avouer des choses qu'ils n'ont pas faites. C'est une injustice. On voit des jeunes affamés. Quelle que soit la maladie du détenu, on le soigne avec du paracétamol et de l'aspirine. On dort presque torse nu. Les gens reviennent battus de la police. L'infirmerie n'est pas bien équipée. Des détenus meurent à cause des tortures policières. La question des conditions de détention est sérieuse et les candidats à la présidentielle doivent en tenir compte. Il y a les rats dans les chambres, les fosses puent. Les prisonniers souffrent de beaucoup de maladies. On partage la cellule avec eux.
Quand j'ai demandé à être avec mes amis Raoul, David et Dominique, le chef m'a dit que je n'étais pas un détenu spécial. Ce que j'ai accepté. Je restais là où on me demandait.
«J’attends mon jugement au tribunal de Y’en a marre»
On ne vous a pas torturé ?
On ne m'a jamais brutalisé. J'ai lu dans un journal que j'étais activement recherché par la Dic. Ce qui n'est pas vrai. J'ai téléphoné au commissaire Arona Sy qui me l'a confirmé. Je n'avais pas reçu de convocation. Ils m'ont dit qu'ils se sont rendus à Guédiawaye. Je leur ai répondu que je n'habitais plus là-bas. Même si j’y ai grandi. Je me suis rendu au commissariat central. On m'a interrogé, j'ai reconnu les faits et je me suis excusé.
Qu'est-ce qui vous a pris d’agresser votre collègue rappeur ?
Je regrette ce que j'ai fait. Mais, vous savez un être humain a des pulsions qu'on n'arrive pas toujours à contrôler. J'étais énervé.
Est-ce que vous n'avez pas été influencé ?
Non, les décisions que je prends me concernent. Je n'avais pas envie de commanditer un truc sans y être. Pour moi, c'est lâche. Je partais le voir pour discuter. On était en froid depuis quelque temps. On ne se parlait pas. J'avais entendu dire que des jeunes de son groupe s'apprêtaient à venir attaquer mon studio et que Gaston préparait un album pour me clasher. J'ai agi sans réfléchir. Je ne devais pas me fonder sur des rumeurs. J'étais très fâché contre Gaston. J'ai fauté, j'ai déconné. Il a été grand. C'était quelque chose que je pouvais éviter. Je vais lui téléphoner. Je lui ai présenté mes excuses. Et la police m'a demandé de revenir le lendemain. Je n'ai pas compris leur jeu. Heureusement que les gens m'ont soutenu. Ma famille, ma femme, mes amis, mon grand frère Thierno Talla qui a beaucoup souffert de mon arrestation.
«Y'en a marre» vous a aussi suspendu ?
Je m'en réjouis parce que cela fait partie du règlement intérieur du mouvement. Il devait se démarquer. Le mouvement est grand. Et s'il essaie de justifier mon acte, cela veut dire qu'il est mon complice. Quand ils m'ont demandé si j'allais accepter d'être mis en quarantaine, je leur ai répondu que j'allais le faire moi-même. J'ai fauté et je le reconnais. J'en profite pour saluer le travail de la justice qui a refusé la manipulation. De même, mes avocats qui m'ont défendu gratuitement. J'attends mon jugement devant le tribunal de «Y'en a marre». Je ne dois pas prendre part à leurs activités d'ici à quelque temps.
Cela vous manque ?
Bien sûr. Mais, mon séjour m'a permis de découvrir le milieu carcéral. Parce que depuis 2009, je suis interdit d'accès à la prison par l'ancien régisseur du camp pénal, Saliou Sall.
(Source : Walf Grand-Place)