Hissène Habré est né en 1942 à Tchad, dans la région de Faya-Largeau. Diplômé en Science politique, il a été Premier ministre du gouvernement de Félix Malloum, en 1978. C’est en 1982 qu’il arrive à la tête du gouvernement tchadien à la suite d’un coup d’Etat contre le régime de Goukouni Oueddei. Il dirige ce pays pendant huit ans, avant d’être renversé par les troupes d’Idriss Deby. Depuis son asile politique au Sénégal, en décembre 1990, l’homme à la barbichette mène une vie effacée et discrète dans le quartier résidentiel des Almadies et le village de Ouakam. Il passe pour un «citoyen sénégalais», après 22 ans passés au « pays de la Teranga ». Présenté comme un dictateur sanguinaire durant les huit années de son règne barbare par la communauté internationale, il doit répondre dans un trimestre devant une Cour spéciale de «crimes contre l’humanité».
Malgré ces accusations, l’ancien numéro 1 du Tchad est décrit par une partie de la population de Ouakam comme «un bon musulman très pieux et généreux». Cet homme réservé serait également d’un tempérament doux. «L’homme que je connais est totalement différent du dictateur dont on parle. Ça ne lui ressemble pas. C’est un fervent croyant, parce qu’il vient très souvent à la mosquée de Ouakam. Habré est maintenant un Lébou parmi nous», renseigne Youssou Ndoye, le Jaraaf de Ouakam. Le chef coutumier du village de Ouakam, qui garde de bonnes relations avec Hissène Habré, reconnaît en lui un caractère pudique et réservé. «En tant que chef coutumier du village de Ouakam, j’étais dans l’obligation d’entrer en contact avec quelqu’un qui vient en aide à ma population. C’est un frère de son épouse qui a facilité notre connaissance. Mais, lors de mes visites chez lui, j’ai connu un homme réservé et timide, qui ne s’occupe pas de certains détails dans sa maison. D’ailleurs, je lui demande souvent de venir à nos lieux de rencontre, mais il préfère rester tranquillement dans son coin», témoigne le dignitaire lébou.
Un discours timide, une démarche posée, un regard rusé et pétillant, Habré est un homme fort discret. Mais son caractère réservé cache un tempérament volcanique. Dans sa chambre, l’ancien chef de guerre des "Fan" (Forces Armées du Nord) peut rester toute la journée sans piper mot. Mais il est capable de cracher le feu, quand il ouvre la bouche. «Pour le moindre détail, il peut tenir un discours très direct et percutant», fait savoir un ancien employé de la maison de Habré, que nous avons jointe au téléphone. «Je ne le voyais pas beaucoup, parce qu’il aimait la tranquillité. C’est aussi un vieil homme très ferme. Il est mystérieux en tout», reconnaît-elle avec sa voie méfiante avant de raccrocher.
OUSMANE FALL
Le Pays au Quotidien