Hollande à Dakar: "Un discours pour rien", selon Henri Guaino

Dans une interview accordée à L'Express, l'ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, réagit au discours prononcé vendredi au Sénégal par le chef de l'Etat, François Hollande.



Comment avez-vous trouvé le discours de François Hollande ?

C'est un discours pour rien, qui ne marquera les esprits ni par le fond, ni par la forme. Si on peut savoir gré à François Hollande de ne pas l'avoir présenté comme l'opposé de celui qu'avait prononcé son prédécesseur, il n'y a rien de très nouveau dans son propos. La fin de la Françafrique? Cela fait longtemps que les présidents français successifs veulent en finir avec ce système. Nicolas Sarkozy avait pris cet engagement mais cela ne se fait pas du jour au lendemain. La démocratie? Depuis François Mitterrand, c'est un critère essentiel dans les relations franco-africaines. Mais indiquer dans la même phrase que cette exigence de démocratie se fera sans ingérence, c'est reconnaître que cela ne se décrète pas. La renégociation des accords de défense? Nicolas Sarkozy avait exposé sa politique dans son discours du Cap en 2008 et on a commencé à la mettre en oeuvre. Les financements innovants, la taxe sur les transactions financières? Des dossiers que Nicolas Sarkozy avait portés au G20. François Hollande a juste annoncé que 10% du produit de la taxe irait au développement et à la lutte contre les pandémies. C'est peu, même si c'est mieux que rien.

Pour vous, il n'y a pas de rupture avec la politique menée par Nicolas Sarkozy...

Oui, ce n'était donc pas la peine de vociférer contre Nicolas Sarkozy, de caricaturer autant le discours de 2007. C'est une illustration de plus de ces revirements incessants entre ce que l'on dit un jour et ce que l'on dit ou fait le lendemain. François Hollande annonce qu'il n'ira pas au sommet de la Francophonie car la République démocratique du Congo n'a pas un régime démocratique pour finir par s'y rendre parce qu'il ne peut en être autrement.

Qu'auriez-vous dit en 2012 aux Africains?

J'aurais expliqué qu'il n'y a pas d'un côté, le monde et de l'autre, l'Afrique. Le monde appartient autant aux Africains qu'aux autres populations. Pour le faire évoluer, il faut une Afrique coalisée, autonome des puissances émergentes et déterminée à agir dans les négociations internationales. Il ne faut pas se plaindre mais se battre ensemble. Le co-développement est la clé de l'avenir africain. Malheureusement, le discours de François Hollande ne comportait aucune indication sur la stratégie à suivre, seulement des pétitions de principe.

L'Express

Abdou Khadre Cissé

Samedi 13 Octobre 2012 10:47

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