La gorge pleine d’amertume, elle enchaîne : «je ne peux pas ne pas travailler et me contenter des promesses qui n’arrivent jamais. C’est pourquoi, j’ai décidé de travailler en plein temps pour vivre. Je ne vais quand même pas rester là à attendre sinon, je risque de crever. Je dois payer le loyer et d’autres choses. Je ne peux plus me contenter de promesses».
«J’aime bien porter le maillot national. J’en suis fière. Mais, il n’y a rien pour m’accompagner. Il n’y a rien, rien, rien», fulmine la double championne d’Afrique.
«Vous ne pouvez pas imaginer ma fierté quand j’ai décidé de venir compétir sous les couleurs du Sénégal en 2010. Mais aujourd’hui, je suis déçue de la tournure des événements. Ça fait des années que nous sommes là à réclamer la même chose. C’est une perte d’énergie de tenir les mêmes discours. C’est vraiment écœurant. J’ai envie de pleurer. Nous sommes tous en France où chacun s’entraine de son côté. Personne n’a le soutien de personne», poursuit Amy Sène qui trouve «incroyable» la performance de Mamadou Kassé Hanne, qualifié à la finale des 400 mètres haies.
«Heureusement qu’il fait de bons meetings où il gagne des primes et tout. Je l’ai appelé récemment en lui demandant s’il a les nouvelles de la Fédé. Il me dit : non ! Même pas de félicitations. Personne ne te demande si tu es blessé, si tu t’entraines, si tu as envie, si tu es mort. Rien !», se désole-t-elle.
Pis, révèle Amy Sène : «à Moscou, chacun vit de son côté. Je n’ai même pas encore vu Kassé (Hanne). On n’a même pas fait un petit regroupement, histoire de… »
«Je n’ai pas envie d’être méchante. Mais, il faut que les choses changent. Le haut niveau nous est accessible. Il suffit d’avoir les moyens. Il y a des filles plus fines que moi qui y arrivent. Je ne vois pas pourquoi, je n’y arriverai pas», souligne la meilleure sportive de l’année. Titre décerné par l’ANPS.
«Pour les JO 2016, j’attends une réponse en septembre»
«J’ai dit à Momar (Mbaye, président de la Fédération sénégalaise d’athlétisme, Ndlr) que j’ai envie d’avoir une bonne préparation en perspective de Rio de Janeiro (qui abrite les JO 2016). Il me faut des réponses dès le mois de septembre. Je viens quand même de faire 65 mètres sans m’entraîner correctement. Ce qui me frustre, c’est que je sais de quoi je suis capable. Il nous faut des moyens sinon nous allons continuer à faire de la figuration dans les compétitions internationales», a averti Amy Sène.
Et d’ajouter : «nos adversaires ont une préparation de dingues. Si nous pouvons faire comme eux, tout le monde verra le résultat. Je suis quand même championne d’Afrique depuis 2010. Puis, j’ai conservé mon titre avec à la clé le record d’Afrique. J’ai récidivé aux Jeux africains. Mais jusque-là, j’attends encore mes primes dont je ne suis même plus sûre que je vais les toucher. Je n’ai que le soutien du maire de Dakar que je remercie au passage». «Je n’ai aucune bourse. J’ai zéro soutien. Je travaille pour m’en sortir. Mon problème, c’est que je ne sais plus comment nous pouvons être écoutés et entendus. Ce sera la même chose en 2015. Le comble, c’est que quand nous disons des choses dans les journaux, on se fait démonter. On nous insulte dans les forums. Franchement, je trouve ça triste !» «Malgré tout, dit-elle, on continue à nous battre, à essayer. Il faut quand même qu’on soit entendus et compris parce que tout le monde dit la même chose. On ne demande pas à devenir millionnaire, mais juste une petite bourse pour mieux nous préparer».