Ils se sont arrêtés pour l'instant à Douentza, au pied des falaises mythiques de Bandiagara et du pays dogon, à 150 km de Mopti, la troisième ville du Mali, et à 600 km de Bamako, la capitale. À l'aube du samedi 1er septembre, les habitants de ce gros bourg agricole ont vu arriver sur la nationale 15 une dizaine de 4x4 remplis de combattants islamistes du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Sans tirer un seul coup de feu, ils ont encerclé et désarmé le détachement de la milice songhaï d'autodéfense Ganda Izo, à qui une armée malienne aboulique et acéphale avait sous-traité la protection de cette localité pourtant stratégique.
Depuis, les hommes d'Oumar Ould Hamaha se sont installés. Bamako n'est qu'à dix heures de route de Douentza avec, sur le trajet, deux verrous en capilotade : Mopti et Ségou. Six mois après la chute d'Amadou Toumani Touré, le 22 mars, l'ombre jihadiste n'en finit plus de s'étendre sur le Mali...
Charia
Alors que se réunissait à New York, le 26 septembre, une conférence internationale sur le Sahel, dont on attend sans doute beaucoup trop tant les conditions à remplir pour déclencher une intervention militaire ressemblent à un Rubik's Cube insoluble, Douentza et avec elle la moitié nord du Mali font le douloureux apprentissage de l'ordre islamique. Certes, le Nord survit, comme avant. la catastrophe humanitaire annoncée n'a pas eu lieu, une douzaine d'organisations non gouvernementales (ONG) continuent d'assurer le minimum sanitaire, l'électricité, les salaires des fonctionnaires - ceux d'entre eux qui n'ont pas fui - continuent d'être payés par Bamako au nom de la continuité de l'État, et les marchés sont approvisionnés. Mais c'est sur le plan des libertés que la régression a été brutale, au nom de la charia. Des amputations de membres ont eu lieu à Ansongo, Gao et Tombouctou, un couple « illégitime » a été lapidé à mort à Aguelhok, et les flagellations publiques au fouet pour dromadaire sont quasi quotidiennes dans toutes les localités. Fumer une cigarette, écouter de la musique, discuter entre hommes et femmes - et pour ces dernières dévoiler sa chevelure - ou consommer de l'alcool sont punis de dix à cinquante coups de chicote. Le vol et le banditisme valent amputation, les relations sexuelles hors mariage, la lapidation ou, si le cadi fait preuve de mansuétude, cent coups de fouet. La destruction des mausolées maraboutiques est systématique, la possibilité de s'exprimer et de s'opposer, nulle.
Qui sont ces chefs surgis des sables de l'Azawad, dont la foi aveugle et sommaire s'accommode de bien des trafics impies, talibans le jour et contrebandiers la nuit, émirs autoproclamés de katibas dont la tactique s'apparente à celle des rezzous d'antan et dont l'objectif est d'établir un califat malien jusqu'à Bamako ? Chercheur indépendant, spécialiste du renseignement et historien des guérillas révolutionnaires, le Français Laurent Touchard a reconstitué pour J.A. l'itinéraire d'une dizaine d'entre eux. Voici les nouveaux maîtres du Nord-Mali...
Lu sur Jeuneafrique.com
Depuis, les hommes d'Oumar Ould Hamaha se sont installés. Bamako n'est qu'à dix heures de route de Douentza avec, sur le trajet, deux verrous en capilotade : Mopti et Ségou. Six mois après la chute d'Amadou Toumani Touré, le 22 mars, l'ombre jihadiste n'en finit plus de s'étendre sur le Mali...
Charia
Alors que se réunissait à New York, le 26 septembre, une conférence internationale sur le Sahel, dont on attend sans doute beaucoup trop tant les conditions à remplir pour déclencher une intervention militaire ressemblent à un Rubik's Cube insoluble, Douentza et avec elle la moitié nord du Mali font le douloureux apprentissage de l'ordre islamique. Certes, le Nord survit, comme avant. la catastrophe humanitaire annoncée n'a pas eu lieu, une douzaine d'organisations non gouvernementales (ONG) continuent d'assurer le minimum sanitaire, l'électricité, les salaires des fonctionnaires - ceux d'entre eux qui n'ont pas fui - continuent d'être payés par Bamako au nom de la continuité de l'État, et les marchés sont approvisionnés. Mais c'est sur le plan des libertés que la régression a été brutale, au nom de la charia. Des amputations de membres ont eu lieu à Ansongo, Gao et Tombouctou, un couple « illégitime » a été lapidé à mort à Aguelhok, et les flagellations publiques au fouet pour dromadaire sont quasi quotidiennes dans toutes les localités. Fumer une cigarette, écouter de la musique, discuter entre hommes et femmes - et pour ces dernières dévoiler sa chevelure - ou consommer de l'alcool sont punis de dix à cinquante coups de chicote. Le vol et le banditisme valent amputation, les relations sexuelles hors mariage, la lapidation ou, si le cadi fait preuve de mansuétude, cent coups de fouet. La destruction des mausolées maraboutiques est systématique, la possibilité de s'exprimer et de s'opposer, nulle.
Qui sont ces chefs surgis des sables de l'Azawad, dont la foi aveugle et sommaire s'accommode de bien des trafics impies, talibans le jour et contrebandiers la nuit, émirs autoproclamés de katibas dont la tactique s'apparente à celle des rezzous d'antan et dont l'objectif est d'établir un califat malien jusqu'à Bamako ? Chercheur indépendant, spécialiste du renseignement et historien des guérillas révolutionnaires, le Français Laurent Touchard a reconstitué pour J.A. l'itinéraire d'une dizaine d'entre eux. Voici les nouveaux maîtres du Nord-Mali...
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