Le candidat Macky Sall a démarré sa campagne électorale depuis plusieurs mois. Dans cette perspective, il passe le plus clair de son temps à poser des premières pierres et à inaugurer des infrastructures. Ainsi, le 20 décembre 2018, il a inauguré en grande pompe l’autoroute ‘’Ila Touba’’, probablement l’une des plus chères du monde. Longue de seulement 112 km, elle traverse un terrain sablonneux avec comme seuls obstacles quelques rares arbres. Elle nous aura pourtant coûté 416 milliards de francs CFA. Le 22 décembre 2018, ce sera au tour de l’ancienne gare de Koki d’être inaugurée par le candidat Sall. Du moins, c’est ce qui se prépare intensément au village. Cette gare faisait partie des plus coquettes du pays et l’idée de la réhabiliter est à saluer. Elle le serait davantage, bien sûr, si le coût de la réhabilitation n’était pas exorbitant. Cent millions (100) de francs CFA pour réhabiliter cette vieille gare, c’est quand même beaucoup ! Ce coût a été annoncé pour la première lors de la tenue d’un Comité local de Développement (CLD). L’assistance était naturellement ébahie. Elle l’était encore plus quand un participant, le Maire de Ndiagne ou son adjoint déclara que leur mairie, toute neuve (R+1), leur a coûté soixante-quinze mille (75) millions. Donc, 100 millions pour réhabiliter la gare de Koki, cela dépasse l’entendement. Avec un tel montant, on peut construire deux gares toutes neuves. En attendant d’en avoir le cœur net un jour – et ce jour viendra forcément – arrêtons-nous sur sa destination ! Il semble qu’elle a été déjà équipée et abritera un ‘’centre de recherches et d’essais’’ qui dépendra du Ministère de l’Enseignement supérieur. D’ores et déjà, des jeunes gens seraient en train d’être recrutés pour meubler les différentes salles le jour J. C’est, du moins, le bruit qui court avec insistance dans le village.
En tant que vieil enseignant et fils du village (doomu dëkk ba), je ne peux pas ne pas me poser certaines questions : qui a donné ce nom de ‘’centre de recherches et d’essais’’ à l’ancienne gare ? Qui a fait du Ministère de l’Enseignement supérieur le Ministère de tutelle ? Qui recrute ce qu’on pourrait appeler déjà les stagiaires ? Le Sous-préfet, représentant dans la localité le Président de la République et tous les ministres, le maire, le proviseur du lycée, un représentant du Ministère de tutelle, l’association des parents d’élèves, etc., ont-ils été associés à l’ensemble des démarches et des décisions qui ont été prises ? Si ce n’est pas le cas, de qui viennent les décisions unilatérales ? Sont-ils habilités à les prendre seuls et à quel titre les prendraient-ils ?
Moi, vieil enseignant, si je devais donner mon humble avis, la nouvelle structure s’appellerait ‘’Centre d’enseignement ou de formation technique et professionnel (le)’’ et aurait pour Ministère de tutelle celui de la ‘’Formation professionnelle, de l’Apprentissage et de l’Artisanat’’. Ce nom devrait d’ailleurs être trouvé par consensus, après avis de toutes les parties prenantes, celles-ci étant les hommes et les femmes qui auront pour charge la gestion du Centre. Il leur reviendra aussi de définir, avec le Sous-préfet, le représentant du Ministère de tutelle, le profil des jeunes gens qui seront recrutés sur la base du mérite, et d’élaborer le programme qui leur sera proposé. Quoi qu’il en soit, le Centre ne devrait, en aucun cas, être la propriété exclusive de quelques personnes. Il ne peut être qu’un établissement public, donc la propriété de toute la collectivité.
Je souhaiterais aussi donner mon humble avis sur d’autres questions relatives au village, à notre village à nous tous. La réhabilitation de l’ancienne gare est une excellente idée, comme la construction de la Brigade de gendarmerie dont j’espère que le coût sera raisonnable. Le village, qui compte aujourd’hui 20 000 habitants au moins et abrite l’un des plus grands instituts islamiques du pays, a d’autres préoccupations. L’un des plus grands problèmes des populations, c’est l’eau, l’eau potable et douce. L’eau du seul forage construit dans les années 1970 est trop salée. On la boit en grimaçant. On ne peut l’utiliser ni pour faire du maraîchage, ni pour arroser de jeunes arbres. Au fur et à mesure que la nappe baisse, l’eau devient plus salée encore. Elle va baisser de plus en plus car, au moment où le forage était construit, la population du village n’atteignait pas 10000 habitants. Elle en était même loin. Le village a aujourd’hui grandi, beaucoup grandi, notamment avec des villages environnants qui sont venus se fondre dans les quartiers périphériques. Donc, les populations seraient comblées si un second forage leur était construit.
Le village a besoin aussi d’être mieux éclairé. La nuit, les quartiers périphériques – pas seulement d’ailleurs – sont plongés dans une obscurité totale, ce qui fait le bonheur des voleurs de bétail et autres malfaiteurs. Le village compte, en outre, énormément de jeunes qui se contentent, faute de mieux pour leurs distractions (danses, théâtres, etc.), de l’ancienne maison de commerce que nous utilisions dans les années 60. Comme tous les jeunes du pays, ils seraient reconnaissants aux autorités nationales de leur construire un ‘’Espace jeunes’’. Je pense aussi – pourquoi ne pas rêver – à une piste qui relierait la Commune de Koki à celle de Ndiagne, distantes seulement de sept à huit kilomètres. Cette piste faciliterait les déplacements et les échanges entre les deux communes dont chacune abrite un gros marché hebdomadaire. La piste aurait pour autre avantage, substantiel celui-là, de nous éviter de passer par Ouarack pour aller à Ndiagne et de gagner ainsi un nombre non négligeable de kilomètres. Une piste existe déjà, qui part de l’Institut islamique et passe par Kanène Alle, Kanène Khar et l’un des deux thieuyène. Il suffit de la protéger vers Ndiagne.
Nous avons aussi pour préoccupation, que nous partageons avec Louga, Darah étant déjà servie avec la construction de la route Touba-Darah, Darah-Linguère, la réhabilitation de la route Louga-Darah et Ouarack-Ndoyène. La réhabilitation de ces quatre routes était dans le même programme rendu public par Agéroute. Les deux dernières attendent encore. Peut-être que nos responsables politiques respectifs sont moins actifs que les autres.
Je ne peux pas ne pas rappeler que, lors du Conseil des Ministres délocalisé à Louga le 20 décembre 2012, le Président de la République s’est engagé à investir 250 milliards de francs CFA dans la Région. Selon le Gouverneur Alioune Badara Mbengue, les engagements ont connu un taux de réalisation de 52,37%. En d’autres termes, 130 931 951 073 F CFA ont été investis dans la Région. Le Gouverneur s’exprimait ainsi devant la presse à l’issue d’une revue des programmes et réalisations des engagements du conseil des ministres décentralisé avec l’implication des services techniques administratifs et des autres partenaires de l’Etat. Combien la Commune et l’Arrondissement de Koki ont-ils reçu de ce pactole ? Cette question mérite quand même d’être posée aux populations de Koki. Le 24 février 2019, leur choix dans l’urne devrait dépendre (aussi) de la réponse à cette question. Avant d’introduire son bulletin de vote dans l’urne, on doit se poser la question plus générale : qu’a-t-il fait pour mon village, le candidat sortant, depuis sept ans qu’il dirige le pays ? Alors, seul, devant DIEU, on fait son choix, en fonction de la réponse à cette question qu’on s’est posée.
Pour terminer, je précise qu’en publiant ce texte, je ne m’érige pas en défenseur des populations de Koki qui ont choisi librement, depuis plusieurs années, de renoncer à leur citoyenneté et aux droits importants y afférents. Je respecte leur choix, même si je le comprends difficilement. J’ai écrit ce texte en mon nom propre, en ma qualité de fils du village dont l’avenir ne peut en aucune façon me laisser indifférent. Depuis quarante ans, je me prononce publiquement sur la manière dont mon pays est gouverné. Je devrais pouvoir le faire pour mon village. Personne, je crois, ne devrait me le reprocher.
Dakar, le 20 décembre 2018
Mody Niang, doomu Koki
En tant que vieil enseignant et fils du village (doomu dëkk ba), je ne peux pas ne pas me poser certaines questions : qui a donné ce nom de ‘’centre de recherches et d’essais’’ à l’ancienne gare ? Qui a fait du Ministère de l’Enseignement supérieur le Ministère de tutelle ? Qui recrute ce qu’on pourrait appeler déjà les stagiaires ? Le Sous-préfet, représentant dans la localité le Président de la République et tous les ministres, le maire, le proviseur du lycée, un représentant du Ministère de tutelle, l’association des parents d’élèves, etc., ont-ils été associés à l’ensemble des démarches et des décisions qui ont été prises ? Si ce n’est pas le cas, de qui viennent les décisions unilatérales ? Sont-ils habilités à les prendre seuls et à quel titre les prendraient-ils ?
Moi, vieil enseignant, si je devais donner mon humble avis, la nouvelle structure s’appellerait ‘’Centre d’enseignement ou de formation technique et professionnel (le)’’ et aurait pour Ministère de tutelle celui de la ‘’Formation professionnelle, de l’Apprentissage et de l’Artisanat’’. Ce nom devrait d’ailleurs être trouvé par consensus, après avis de toutes les parties prenantes, celles-ci étant les hommes et les femmes qui auront pour charge la gestion du Centre. Il leur reviendra aussi de définir, avec le Sous-préfet, le représentant du Ministère de tutelle, le profil des jeunes gens qui seront recrutés sur la base du mérite, et d’élaborer le programme qui leur sera proposé. Quoi qu’il en soit, le Centre ne devrait, en aucun cas, être la propriété exclusive de quelques personnes. Il ne peut être qu’un établissement public, donc la propriété de toute la collectivité.
Je souhaiterais aussi donner mon humble avis sur d’autres questions relatives au village, à notre village à nous tous. La réhabilitation de l’ancienne gare est une excellente idée, comme la construction de la Brigade de gendarmerie dont j’espère que le coût sera raisonnable. Le village, qui compte aujourd’hui 20 000 habitants au moins et abrite l’un des plus grands instituts islamiques du pays, a d’autres préoccupations. L’un des plus grands problèmes des populations, c’est l’eau, l’eau potable et douce. L’eau du seul forage construit dans les années 1970 est trop salée. On la boit en grimaçant. On ne peut l’utiliser ni pour faire du maraîchage, ni pour arroser de jeunes arbres. Au fur et à mesure que la nappe baisse, l’eau devient plus salée encore. Elle va baisser de plus en plus car, au moment où le forage était construit, la population du village n’atteignait pas 10000 habitants. Elle en était même loin. Le village a aujourd’hui grandi, beaucoup grandi, notamment avec des villages environnants qui sont venus se fondre dans les quartiers périphériques. Donc, les populations seraient comblées si un second forage leur était construit.
Le village a besoin aussi d’être mieux éclairé. La nuit, les quartiers périphériques – pas seulement d’ailleurs – sont plongés dans une obscurité totale, ce qui fait le bonheur des voleurs de bétail et autres malfaiteurs. Le village compte, en outre, énormément de jeunes qui se contentent, faute de mieux pour leurs distractions (danses, théâtres, etc.), de l’ancienne maison de commerce que nous utilisions dans les années 60. Comme tous les jeunes du pays, ils seraient reconnaissants aux autorités nationales de leur construire un ‘’Espace jeunes’’. Je pense aussi – pourquoi ne pas rêver – à une piste qui relierait la Commune de Koki à celle de Ndiagne, distantes seulement de sept à huit kilomètres. Cette piste faciliterait les déplacements et les échanges entre les deux communes dont chacune abrite un gros marché hebdomadaire. La piste aurait pour autre avantage, substantiel celui-là, de nous éviter de passer par Ouarack pour aller à Ndiagne et de gagner ainsi un nombre non négligeable de kilomètres. Une piste existe déjà, qui part de l’Institut islamique et passe par Kanène Alle, Kanène Khar et l’un des deux thieuyène. Il suffit de la protéger vers Ndiagne.
Nous avons aussi pour préoccupation, que nous partageons avec Louga, Darah étant déjà servie avec la construction de la route Touba-Darah, Darah-Linguère, la réhabilitation de la route Louga-Darah et Ouarack-Ndoyène. La réhabilitation de ces quatre routes était dans le même programme rendu public par Agéroute. Les deux dernières attendent encore. Peut-être que nos responsables politiques respectifs sont moins actifs que les autres.
Je ne peux pas ne pas rappeler que, lors du Conseil des Ministres délocalisé à Louga le 20 décembre 2012, le Président de la République s’est engagé à investir 250 milliards de francs CFA dans la Région. Selon le Gouverneur Alioune Badara Mbengue, les engagements ont connu un taux de réalisation de 52,37%. En d’autres termes, 130 931 951 073 F CFA ont été investis dans la Région. Le Gouverneur s’exprimait ainsi devant la presse à l’issue d’une revue des programmes et réalisations des engagements du conseil des ministres décentralisé avec l’implication des services techniques administratifs et des autres partenaires de l’Etat. Combien la Commune et l’Arrondissement de Koki ont-ils reçu de ce pactole ? Cette question mérite quand même d’être posée aux populations de Koki. Le 24 février 2019, leur choix dans l’urne devrait dépendre (aussi) de la réponse à cette question. Avant d’introduire son bulletin de vote dans l’urne, on doit se poser la question plus générale : qu’a-t-il fait pour mon village, le candidat sortant, depuis sept ans qu’il dirige le pays ? Alors, seul, devant DIEU, on fait son choix, en fonction de la réponse à cette question qu’on s’est posée.
Pour terminer, je précise qu’en publiant ce texte, je ne m’érige pas en défenseur des populations de Koki qui ont choisi librement, depuis plusieurs années, de renoncer à leur citoyenneté et aux droits importants y afférents. Je respecte leur choix, même si je le comprends difficilement. J’ai écrit ce texte en mon nom propre, en ma qualité de fils du village dont l’avenir ne peut en aucune façon me laisser indifférent. Depuis quarante ans, je me prononce publiquement sur la manière dont mon pays est gouverné. Je devrais pouvoir le faire pour mon village. Personne, je crois, ne devrait me le reprocher.
Dakar, le 20 décembre 2018
Mody Niang, doomu Koki