La Centrafrique fait appel à la France face à la rébellion


Le gouvernement centrafricain a «fait appel à la France» mercredi soir pour l'aider au dialogue entre le pouvoir et la coalition rebelle du Séléka, qui a pris les armes depuis le 10 décembre et s'approche dangereusement de Bangui, la capitale. «Nous remercions la France d'avoir condamné les attaques rebelles, d'avoir pris position pour le dialogue inter-centrafricain, et d'avoir proposé son appui à la concrétisation de ce dialogue», a déclaré mercredi soir le ministre centrafricain de l'administration du territoire Josué Binoua.


«La République Centrafricaine ne perd pas de vue l'importante contribution de la France dans la restructuration de nos forces de défense et de sécurité, car elle dispose régulièrement de conseillers militaires auprès des forces armées centrafricaines, aux côtés desquelles elle a toujours joué un rôle» a souligné le ministre centrafricain.

«La France demeure résolue à appuyer ce processus» de règlement politique de la crise

Une déclaration des autorités centrafricaines qui faisait écho aux réactions de la France à l'issue d'une journée marquée par des violences contre les représentations ou intérêts américains et français à Bangui. Le Quai d'Orsay avait affirmé, dans la journée dans un communiqué, qu'il était «nécessaire de parvenir à un règlement politique de la crise actuelle». «La France demeure résolue à appuyer ce processus, en coordination avec les Nations unies, l'Union africaine, la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC), l'Union européenne et tous les partenaires internationaux attachés à la stabilité et au développement de la République Centrafricaine», ajoute le communiqué.

Mercredi matin dans la capitale centrafricaine, des membres d'associations proches du Kwa Na Kwa (le parti du président François Bozizé) ont observé un sit-in devant l'ambassade des Etats-unis. Munis de sifflets et de branches de palmiers, ils ont scandé en sango, la langue nationale: «i yé gui siriri» (nous voulons la paix, non à la guerre).

«Une manifestation particulièrement violente devant la chancellerie de France»

Dans l'après-midi, plusieurs centaines de personnes ont lancé des projectiles vers l'ambassade de France. «Nous sommes ici à l'ambassade de France, parce que c'est la France qui nous a colonisés. Mais la France a tendance à nous lâcher. On n'a plus besoin de la France, la France n'a qu'à prendre son ambassade et partir», a lancé une manifestante. «La France n'a pas respecté la convention de défense entre elle et la République Centrafricaine. Nous dénonçons cette attitude», a pour sa part déclaré un étudiant qui a requis l'anonymat. Plusieurs jeunes ont jeté des projectiles sur les locaux de l'ambassade dont certains ont cassé des vitres, ainsi que sur la représentation d'Air France.

L'ambassadeur de France, Serge Mucetti, a immédiatement réagi face à ces violences. «Ce matin, une manifestation violente s'est déroulée devant l'ambassade des Etats-unis d'Amérique, et s'est prolongée par une manifestation particulièrement violente devant la chancellerie de France, avec des jets de projectiles, avec des bris de vitres. Le drapeau français a été descendu de son mât et emporté par des manifestants»,  «Cette situation est totalement inadmissible. Je demande au gouvernement de la République centrafricaine de faire respecter les accords internationaux en cette matière. Ceux qui ont agi de la sorte sont des ennemis de la République centrafricaine», a-t-il ajouté.

Le périmètre de l'ambassade de France «sécurisé» par des troupes françaises

«Cette manifestation n'était pas dirigée contre l'ambassade de France», a assuré de son côtéVincent Floréani, porte-parole adjoint du Quai d'Orsay, sur BFM TV. Mais, explique-t-il, «certains manifestants ont pénétré à l'intérieur de l'enceinte avant d'être repoussés».

En fin de journée, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a assuré que le périmètre de l'ambassade de France à Bangui avait été «sécurisé» à la suite de l'intervention de troupes françaises en renfort de gendarmes présents sur place. Ces forces françaises détachées de la mission internationale Boali opérant en Centrafrique «sont parvenues à sécuriser l'emprise de l'ambassade et à rétablir le calme», a précisé le ministre.

L'ONU et Washington retirent leur personnel non essentiel

A la suite des ces événements, les Nations unies ont ordonné le retrait de la République centrafricaine de tous leurs employés non essentiels et de leurs familles face à l'avancée de la rébellion aux portes de la capitale Bangui. Les Etats-Unis ont également exprimé leur «profonde inquiétude» face à ces troubles en Centrafrique. Ils poussent tous leurs ressortissants à quitter le pays et demandent à Bangui de protéger leur ambassade et à la rébellion de cesser les combats.

Au terme de plus de deux semaines d'opérations et de conquêtes, les rebelles du Séléka se sont arrêtés tout près de Bangui, mais le porte-parole de l'ONU Martin Nesirky a estimé dans un communiqué que «leurs messages contradictoires et leur progression militaire semblent indiquer qu'ils aient l'intention de s'emparer de Bangui».

La Centrafrique, pays enclavé de 5 millions d'habitants, était engagé depuis 2007 dans un processus de paix après des années d'instabilité qui ont ravagé son tissu économique et l'ont empêchée de tirer profit de ses ressources naturelles. Depuis le 10 décembre, la coalition rebelle du Séléka a pris plusieurs villes importantes du pays, revendiquant «le respect» d'accords de paix signés entre 2007 et 2011.

Malgré l'appel à la négociation des autorités et des pays voisins, le Séléka a avancé rapidement sans rencontrer de résistance, et se trouve désormais non loin de la capitale centrafricaine. Les rebelles ont demandé ce mercredi dans un communiqué que le pouvoir de Bangui «rende les armes».

Source: Le Parisien

Abdou Khadre Cissé

Jeudi 27 Décembre 2012 15:11

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