Une fois n’est pas coutume, je m’approprie cette assertion pour affirmer d’emblée, au sujet du franc CFA que «le problème ce n’est pas la France, le problème c’est nous».
En effet, il serait très intéressant que nos économistes nous renseignent sur le montant estimatif cumulé en milliards de franc CFA qui a été officiellement introduit à travers nos Etats en zone Uemoa, depuis les Indépendances.
Ce serait effarant !
C’est pourquoi, une analyse plus objective de nos choix et orientations politico-économiques s’impose.
Il en découlerait incontestablement que la problématique de notre sous-développement n’est pas véritablement tributaire de la configuration de notre monnaie.
D’ailleurs, nombreux sont les pays africains ayant une monnaie dite locale qui ne se portent guère mieux que les nôtres.
Le Nigeria, un cas d’école
Je ne peux m’empêcher de donner l’exemple du Nigeria, qui avec sa force du pétrole et sa propre monnaie vit des situations chaotiques.
Souvenons-nous d’ailleurs, qu’un défunt Président de ce pays, Sani Abacha (1993-1998) avait détourné avant sa mort près de 2 milliards de dollars.
C’est donc dire que quelle que soit la nature de la monnaie d’un pays, si les préalables de bonne gouvernance et en matière d’orientations stratégiques axées sur le développement ne sont pas posés, on trouvera toujours des paramètres subjectifs pour en faire des boucs émissaires.
Loin de moi l’idée de dégager en touche ce combat, mais le vrai combat c’est comment chacun de nous peut apporter concrètement sa pierre à l’édification d’une société plus juste et plus équilibrée.
Sous ce rapport, j’estime que ces combattants anti-CFA auraient mieux fait d’intégrer dans leurs actions la lutte contre la pauvreté.
En quoi faisant ?
Par exemple, en choisissant dans les pays où ils se rendent ; souvent avec «armes», bagages et moyens financiers, d’offrir un système d’électrification solaire à deux pauvres hameaux.
En réalité, nous laissons beaucoup de plumes et consacrons énormément d’énergie dans des combats de prestige ou d’égo existentiel, qui charrient la critique facile
Aliou Sow, Youssou Ndour…
Je dois rappeler qu’avec le franc CFA, des Africains, en travaillant dur et honnêtement ont fait fortune et se sont faits un nom.
Je peux citer au Sénégal, le défunt fondateur de la Compagnie Sahélienne d’Entreprise (CSE) Aliou Sow et Youssou Ndour qui, à la sueur de leurs fronts et sous nos yeux, n’ont certainement pas eu le temps d’accuser notre monnaie de tous les maux.
Au Nigeria, dans un autre environnement monétaire Aliko Dangote a fait fortune dans son pays.
Même si l’esclavage et la colonisation ont détruit les fondements de nos sociétés, il y a plusieurs siècles, nous ne devons quand même pas passer tout notre temps à nous lamenter sur notre sort et à accuser les autres.
Comme les personnalités que j’ai citées plus haut, si dans nos pays nous continuons à améliorer la gestion de nos ressources et à les investir à bon escient, il est clair que nous réussirons à émerger quelle que soit la nature de notre monnaie.
Nous avons l’entière responsabilité de nos options de développement individuel et collectif.
L’Occident n’a jamais dicté ou reproché à nos dirigeants la mise en œuvre, de programmes de développements d’intérêts communautaires comme la Case des tous petits, le Programme d’Urgence de Développement Communautaire (PUDC) ou le Programme de Modernisation des Villes (PROMOVILLES), tous financés à travers notre monnaie pour lutter contre la pauvreté et le déséquilibre social.
C’est justement parce que des solutions viables comme celles-là existent pour juguler la pauvreté, qu’aucun pays n’a jamais jugé nécessaire de quitter notre organisation économique et monétaire.
«Le problème, c’est nous»
Je doute que les dirigeants africains qui ont eu à conduire jusque-là les destinées de nos pays, toutes générations confondues, soient moins courageuses et patriotiques que les contempteurs du franc CFA.
Ces derniers très prolixes à essayer de démontrer que cette devise plombe nos économies; par parallélisme des formes et dans un souci de transparence devraient également évaluer les coûts et autres impacts inhérents à la construction et à l’introduction d’autres monnaies dans nos systèmes économiques.
De ce point de vue, pour le moment, on peut retenir la thèse du directeur national de la BCEAO qui a estimé que l’impression des billets nous coûte entre 25 et 35 milliards de francs CFA par an, alors que l’amortissement annuel d’éventuelles infrastructures de production de billets serait d’environ 60 milliards de francs CFA.
En tout état de cause, même si notre développement doit être conduit par les hommes politiques, il doit être porté par toutes les composantes de nos jeunes nations, y compris par la société civile, certes à travers des idées, mais aussi et surtout par une implication plus accrue dans le soutien concret aux populations démunies.
Ou, le problème ce n’est pas le franc CFA, le problème c’est nous.