Dans quel pays au monde existe-t-il aujourd’hui un mandat présidentiel d’une durée de sept ans ? A part les Républiques d’Irlande et d’Italie où les Présidents tiennent un rôle d’inaugurateur de chrysanthèmes et où le Pouvoir exécutif est totalement dévolu à un Premier ministre, chef de gouvernement dans un régime de type parlementaire, on ne trouve des mandats présidentiels sous la durée d’un septennat que dans quatre pays au monde que sont : le Cameroun, le Gabon, l’Ouzbékistan et la Syrie. Au Cameroun, Paul Biya règne sans discontinuité depuis que Ahmadou Ahidjo lui a légué le pouvoir en 1982. Au Gabon, Ali Bongo a succédé à son père El hadji Oumar Bongo Ondimba au décès de ce dernier après un règne de 42 ans. En Syrie, Bachar Al Assad a succédé à son père Hafez décédé après 30 ans de règne. En Ouzbékistan, Islom Karimov tient le pays d’une main de fer depuis l’indépendance acquise en 1991. Franchement est-ce que nous voudrions de ce type de régime politique ou de système politique ringard au Sénégal ? Bien sûr que non !
Le Président Macky Sall, élu pour un mandat de sept ans le 25 mars 2012, a pris sur lui d’annoncer, sans y avoir été obligé par qui que ce soit, qu’il réduirait le mandat présidentiel à cinq ans et qu’il l’appliquera à son propre premier mandat. Placé dans les mêmes conditions, son prédécesseur Abdoulaye Wade avait joui des sept ans de son mandat de 2000. Abdoulaye Wade avait violé un engagement souscrit auprès de ses alliés. Macky Sall a endossé la charte de la bonne gouvernance des Assises nationales qui fixe la durée du mandat du président de la République à 5 ans. Il déclare s’y conformer scrupuleusement. On s’attend donc à ce qu’une prochaine réforme de la Constitution et par voie référendaire, confirme ce choix. Macky Sall a confié que cette option est irréversible et irrévocable et qu’il voudrait inscrire cet acte dans sa démarche de rupture dans la gouvernance du pays. C’est dire que les sorties de certains de ses collaborateurs qui voudraient que le chef de l’Etat jouisse de ses sept ans sont vouées à l’échec et d’ailleurs qui parlent ainsi ? En fait, avant de polémiquer sur un propos il est parfois nécessaire de faire le profil de la personne qui le tient pour lui accorder ou non un certain crédit. C’était d’abord Moustapha Cissé Lô. On se demande où est-ce qu’il est bien passé celui-là après ses sorties à la hussarde dans les médias. Macky Sall l’avait bien recadré et Moustapha Cissé Lô qui adorait s’épancher dans les médias se fait maintenant trop discret. C’est Jean-Paul Dias qui reprend le propos. Mais quelle idée a été agitée par Jean-Paul Dias qui ait fait florès dans ce pays depuis qu’il s’était fait un souteneur du dictateur guinéen Moussa Dadis Camara ? Dans leurs livraisons de vendredi dernier, certains journaux avaient prêté à l’universitaire Malick Ndiaye des propos qui tendraient à inciter Macky Sall à jouir en totalité de son mandat de sept ans. Très vite, Malick Ndiaye s’est rendu compte de la gravité du propos qui lui était prêté et a apporté les précisions qui s’imposaient notamment en soulignant que lui était opposé à toute idée d’un mandat de sept ans.
Macky Sall n’aura pas à revenir sur son engagement et ce sera tout à son honneur mais surtout qu’il aurait tout à perdre en agissant autrement. Qui peut penser que le peuple du 23 juin 2011, qui par sa mobilisation avait ébranlé le régime du Président Wade, le laisserait faire ? Macky Sall a annoncé des politiques de rupture. Il a fait devant le Conseil constitutionnel une déclaration de patrimoine qu’il a dit «exhaustive» et depuis sa publication nul n’a débusqué un quelconque bien caché quelque part. Tant mieux. Il a aussi instruit son gouvernement de transmettre aux institutions judiciaires tous les dossiers impliquant des personnalités politiques qu’il a trouvés en souffrance. Pas un dossier n’a manqué. On sait comment, placé dans la même situation en 2000, Abdoulaye Wade avait utilisé des dossiers judiciaires pour forcer le ralliement au Pds de grands responsables du Parti socialiste. On sait aussi comment des dossiers judiciaires avaient disparu à jamais des archives du temple de Thémis. Le gouvernement de Macky Sall a demandé au Parquet de mettre la pédale douce sur les poursuites pénales contre des responsables politiques, le temps de les laisser battre campagne pour les élections législatives afin de ne pas donner l’impression de vouloir museler une opposition en période de campagne électorale. C’est bien une autre rupture car Abdoulaye Wade ne se privait guère d’une telle arme. Le Président Macky Sall fait jouer un rôle à son gouvernement. Il n’est pas le Président omnipotent, omniscient et Président de tout. Certes on ne sait pas encore ce que son véritable gouvernement, celui qui sera composé après les législatives de juillet prochain, fera ; mais on sait déjà ce qu’il devra faire. Il lui faudra faire un audit exhaustif de la gestion des affaires publiques de ces douze dernières années et en tirer toutes les conséquences. Le gouvernement a la responsabilité de procéder à des audits indépendants et transparents et punir les dépositaires de pouvoirs publics indélicats avec nos maigres ressources. Le gouvernement devra également s’atteler à redessiner l’architecture institutionnelle du pays même si, pour reprendre l’expression de Montesquieu, «il ne faut toucher aux institutions que d’une main tremblante». Dans la même veine, Jacques Julliard, éditorialiste de l’hebdomadaire français Marianne écrivait la semaine dernière : «Il faut féliciter François Hollande de revenir à la pratique «normale» de la Vème république, celle dont le Général De Gaulle avait fixé les règles : au Président les grandes orientations et la politique étrangère ; au Premier ministre le reste de la politique gouvernementale. Le coup d’arrêt à la monarchie républicaine est une bonne chose.» Et comme le soulignait si bien Bertrand Vac, «on a beau dire, une rupture, ça libère, mais ça déchire aussi, ne serait-ce que la routine».
Par Madiambal Diagne
Source: Le Quotidien
Macky Sall n’aura pas à revenir sur son engagement et ce sera tout à son honneur mais surtout qu’il aurait tout à perdre en agissant autrement. Qui peut penser que le peuple du 23 juin 2011, qui par sa mobilisation avait ébranlé le régime du Président Wade, le laisserait faire ? Macky Sall a annoncé des politiques de rupture. Il a fait devant le Conseil constitutionnel une déclaration de patrimoine qu’il a dit «exhaustive» et depuis sa publication nul n’a débusqué un quelconque bien caché quelque part. Tant mieux. Il a aussi instruit son gouvernement de transmettre aux institutions judiciaires tous les dossiers impliquant des personnalités politiques qu’il a trouvés en souffrance. Pas un dossier n’a manqué. On sait comment, placé dans la même situation en 2000, Abdoulaye Wade avait utilisé des dossiers judiciaires pour forcer le ralliement au Pds de grands responsables du Parti socialiste. On sait aussi comment des dossiers judiciaires avaient disparu à jamais des archives du temple de Thémis. Le gouvernement de Macky Sall a demandé au Parquet de mettre la pédale douce sur les poursuites pénales contre des responsables politiques, le temps de les laisser battre campagne pour les élections législatives afin de ne pas donner l’impression de vouloir museler une opposition en période de campagne électorale. C’est bien une autre rupture car Abdoulaye Wade ne se privait guère d’une telle arme. Le Président Macky Sall fait jouer un rôle à son gouvernement. Il n’est pas le Président omnipotent, omniscient et Président de tout. Certes on ne sait pas encore ce que son véritable gouvernement, celui qui sera composé après les législatives de juillet prochain, fera ; mais on sait déjà ce qu’il devra faire. Il lui faudra faire un audit exhaustif de la gestion des affaires publiques de ces douze dernières années et en tirer toutes les conséquences. Le gouvernement a la responsabilité de procéder à des audits indépendants et transparents et punir les dépositaires de pouvoirs publics indélicats avec nos maigres ressources. Le gouvernement devra également s’atteler à redessiner l’architecture institutionnelle du pays même si, pour reprendre l’expression de Montesquieu, «il ne faut toucher aux institutions que d’une main tremblante». Dans la même veine, Jacques Julliard, éditorialiste de l’hebdomadaire français Marianne écrivait la semaine dernière : «Il faut féliciter François Hollande de revenir à la pratique «normale» de la Vème république, celle dont le Général De Gaulle avait fixé les règles : au Président les grandes orientations et la politique étrangère ; au Premier ministre le reste de la politique gouvernementale. Le coup d’arrêt à la monarchie républicaine est une bonne chose.» Et comme le soulignait si bien Bertrand Vac, «on a beau dire, une rupture, ça libère, mais ça déchire aussi, ne serait-ce que la routine».
Par Madiambal Diagne
Source: Le Quotidien