Macky Sall, l'ex-allié d'Abdoulaye Wade devenu opposant

Avant de devenir le challenger du président sortant à la présidentielle, Macky Sall a fait sa carrière au sein du régime en place. Mais quand il s'est opposé à l'ascension du fils d'Abdoulaye Wade, il est tombé en disgrâce.


C'est un homme du sérail qui affrontera le président sortant Abdoulaye Wade au deuxième tour de la présidentielle au Sénégal, si on en croit les résultats provisoires du premier tour. Et c'est au nom du "vote utile", sans beaucoup d'enthousiasme, que nombre d'électeurs se prononceront sans doute pour lui; avant tout pour "sortir le sortant", selon Bouba Benjelloun, membre de l'Assemblée des Sénégalais de l'extérieur.

Ex-homme de confiance du président Wade, Macky Sall, ingénieur géologue passé par l'Institut français du pétrole, est son ministre des Mines de 2001 à 2003, puis de l'Intérieur en 2003 et 2004.  

Lorsqu'il est Premier ministre entre 2004 et 2007, il confie à Jeune Afrique qu'il côtoie le Gorgui -le "vieux", surnom d'Abdoulaye Wade- depuis 1988, quand ce dernier était encore dans l'opposition. Il le trouve alors "en avance sur son temps". Le disciple à la carrière éclair devient directeur de campagne de Wade lors de la présidentielle de 2007, mais après la réélection, il n'est pas reconduit à la tête du gouvernement et se voit attribuer la présidence de l'Assemblée nationale. 

Une erreur politique "grave"

"Vous avez commis l'erreur politique d'avoir convoqué mon fils. C'est une erreur grave que vous allez payer" aurait déclaré le "Vieux", racontait Cheikh Yérim Seck dans Jeune Afrique en novembre 2007. Il a eu le tort, un mois plus tôt, de convoquer Karim Wade, le fils et conseiller du chef de l'Etat que ce dernier prépare pour lui succéder, afin que les députés l'entendent sur des travaux publics effectués sous sa tutelle.  

Outre les accusations de mauvaise gestion, le camp Wade y voit un autre piège: le fils du président serait interrogé en Wolof, langue nationale qu'il ne parle pas, ce qui nuirait à son ambition présidentielle. Le camp Wade organise alors une campagne contre l'ancien protégé. Il perd d'abord son poste de numéro 2 du parti, et en novembre 2008, il est destitué de son poste de Président de l'Assemblée nationale. Abdoulaye Wade fait -déjà- changer la Constitution pour se débarrasser de son ancien premier ministre en réduisant la durée du mandat du président de l'Assemblée. Et enfin, comme il l'avait fait pour un autre gêneur, le gouvernement poursuit Macky Sall pour blanchiment d'argent.  

Un soutien par défaut

Il crée alors son parti politique Alliance pour la République (APR) qui, lors des élections locales de 2009, remporte plusieurs villes, ainsi que les grandes villes du pays dans le cadre d'une coalition formée avec d'autres partis. Maire de Fatick à 140 km de Dakar où il est né, Macky Sall maîtrise, outre le français, trois langues locales.

Macky Sall a bénéficié du ras le bol des Sénégalais vis-à-vis de Wade, selon Bouba Benjelloun, qui reste dans l'expectative: "Il y a de tout dans son programme; Il aura beaucoup à faire, entre les deux tours, pour le clarifier". Il rappelle que le candidat de l'opposition n'avait pas soutenu le projet des Assises nationales organisées en 2008-2009 par la société civile et de nombreux acteurs de la vie publique sénégalaise, qui prévoyait, entre autres un rééquilibrage des pouvoirs du président; Macky Sall s'est aussi opposé à la démarche participative qui a été le propre de ces Assises nationales. "Macky Sall se place surtout dans une logique technicienne", observe Bouba Benjelloun qui pense que les opposants se rallieront, bon gré mal gré à sa candidature, pour faire échec à la candidature d'Abdoulaye Wade, mais sans beaucoup d'illusions. 
 
Le soutien de la diaspora Macky Sall a obtenu le soutien de la diaspora et est largement en tête en France, avec 39% des voix à Paris selon des résultats partiels, loin devant le président sortant (18%) selon le site de l'Assemblée des sénégalais de l'extérieur. Mais pour Bouba Benjelloun, C'est surtout au sein de sa communauté (les Haalpulaar ou toucouleurs) que les électeurs de la diaspora se sont déplacés, et en partie parce qu'il y eu les moyens financiers pour mobiliser ses partisans et organiser leur déplacement. D'ailleurs le taux de participation à Paris n'a été que de 37%.



Source: L'Express


Bamba Toure

Lundi 27 Février 2012 16:03

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