Mali : un responsable d'Ansar Eddine arrêté dans la région de Kidal

Le numéro trois et idéologue du groupe islamiste armé Ansar Eddine, Mohamed Moussa Ag Mouhamed, a été arrêté dimanche 3 février au nord de Kidal par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). La veille, l'aviation française a mené d'importantes frappes dans la région.





La région de Kidal, dans l'extrême nord-est du Mali, est au centre de toutes les attentions. Suspectée être le sanctuaire des groupes islamistes armés, elle a été intensément bombardé par l'aviation française dans la nuit de samedi à dimanche. Le lendemain, c'est dans cette même zone, proche de la frontière algérienne, qu'un haut responsable du mouvement Ansar Eddine, Mohamed Moussa Ag Mouhamed, un autre du Mujao (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest), Oumeïni Ould Baba Akhmed, ont été arrêtés pas les Touaregs du MNLA.
Selon Paris, c'est également autour de Kidal, dans le massif des Ifoghas, que seraient détenus les sept otages français au Sahel. Évoquant leur sort samedi, François Hollande a jugé que « les ravisseurs doivent comprendre que le moment est venu de libérer les otages », ajoutant que les forces françaises au Mali en étaient désormais « tout près ».

Le président nigérien Mahamadou Issoufou a aussi jugé dimanche que les quatre otages français enlevés au Niger en septembre 2010 étaient « vivants » et qu'ils se trouvaient « probablement » dans le nord du Mali, « vers la frontière avec l'Algérie, dans les montagnes des Ifoghas ».
La zone de Tessalit, à 200 km au nord de Kidal, près de l'Algérie, a été la cible dans la nuit de samedi à dimanche « d'importantes frappes aériennes », selon le porte-parole de l'armée française, le colonel Thierry Burkhard. Il a précisé que ces bombardements visaient « des dépôts logistiques et des centres d'entraînement » des groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda, un peu plus de trois semaines après le début de l'intervention militaire française.

"Tête pensante"

D'après des experts et des sources de sécurité régionales, c'est dans cette vaste zone de montagnes et de grottes autour de Kidal qu'une bonne partie des chefs et des combattants des groupes islamistes se sont réfugiés. Parmi eux se trouveraient l'Algérien Abou Zeïd, un des émirs les plus radicaux d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et Iyad Ag Ghaly, chef d'Ansar Eddine (Défenseurs de l'islam), un ex-rebelle touareg malien des années 1990, originaire de Kidal, qui connaît parfaitement la région.

Deux d'entre eux, Mohamed Moussa Ag Mouhamed, présenté comme le numéro trois et idéologue d'Ansar Eddine, et Oumeïni Ould Baba Akhmeda, responsable du Mujao, ont été arrêtés dimanche dans cette région par les hommes du MNLA. Selon un cadre du mouvement touareg, l'arrestation s'est produite après un accrochage entre le MNLA et un convoi de rebelles qui tentait de passer la frontière algérienne.
« Mohamed Moussa Ag Mouhamed, celui qui ordonnait de couper les mains (à Tombouctou), a été arrêté par un groupe armé. Il est conduit vers Kidal », a confirmé une source de sécurité malienne jointe depuis Gao (nord-est). « C'était l'idéologue d'Ansar Eddine à Tombouctou (nord-ouest), la tête pensante de l'organisation là-bas. Il a été arrêté à In Hallil, près de la frontière algérienne », a précisé Abdoulaye Touré, un fonctionnaire au gouvernorat de Kidal.

Charia

Kidal, à 1 500 km de Bamako, a longtemps été le bastion d'Ansar Eddine. Mais, avant même l'arrivée dans la nuit du 29 au 30 janvier de soldats français qui ont pris le contrôle de l'aéroport de la ville, elle était passée sous le contrôle du Mouvement islamique de l'Azawad (MIA, groupe dissident d'Ansar Eddine) et du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA, rébellion touarègue).

Ces deux groupes ont affirmé soutenir l'entrée des soldats français à Kidal, mais refusent la présence de militaires maliens et ouest-africains, notamment par crainte d'exactions contre les membres des communautés arabe et touarègue de la ville, parfois assimilées aux groupes islamistes armés. Un petit contingent de soldats tchadiens (dont le pays ne fait pas partie de l'Afrique de l'Ouest) est aussi déployé à Kidal.
Mohammed Moussa, présenté par des habitants de Tombouctou comme un Touareg originaire de la région, a été décrit comme le responsable de la « police islamique » faisant régner la terreur, selon des témoignages recueillis dans cette ville par des journalistes de l'AFP. Aqmi et Ansar Eddine, qui ont occupé Tombouctou pendant dix mois, ont commis dans le Nord de très nombreuses exactions, au nom d'une interprétation rigoriste de la charia (loi islamique) : amputations, coups de fouets aux couples « illégitimes », aux fumeurs. Ils ont imposé le port du voile intégral aux femmes, interdit la mixité dans les écoles, le football, la danse, la musique et l'alcool.

Poursuite de l'engagement français

Ils ont également choqué le monde en détruisant à Tombouctou des mausolées de saints musulmans adulés par les populations locales, assimilant cette vénération à de « l'idolâtrie », mutilant cette ville qui fut capitale culturelle de l'islam en Afrique sub-saharienne et qui est inscrite au patrimoine mondial de l'humanité. À Alger, le ministre algérien des Affaires étrangères Mourad Medelci a estimé dimanche qu'en dépit du recul des islamistes, « les Maliens et ceux qui les aident » font encore face à des « problèmes » pour « rétablir la stabilité et la sécurité », sans réagir aux bombardements français dans la région de Kidal.

L'Algérie, qui partage près de 1 400 km de frontières terrestres avec le Mali, a toujours milité en faveur d'une solution politique pour régler le conflit dans ce pays, mais elle a autorisé le survol de son territoire par les avions militaires français engagés au Mali.

Samedi, le chef de l'État français - « Papa François Hollande », comme l'ont surnommé les habitants de Tombouctou, « frère de tous les Maliens », selon le président par intérim Dioncounda Traoré - a promis aux Maliens que la France n'avait pas encore « terminé sa mission » face aux « terroristes » et assuré que les soldats français seraient au côté des militaires maliens pour, « plus au Nord, finir cette opération ».

(Avec AFP)

Jeune Afrique

Lundi 4 Février 2013 12:34

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