Président de l’Association des Consommateurs du Sénégal (Ascosen), Momar Ndaw demande à l’Etat de procéder, sans délai, à des prélèvements dans les essenceries pour voir s’il y a bien du «sale» carburant en circulation dans le pays. Non sans demander des sanctions, si jamais ce que l’Ong Public Eye a publié dans son rapport, venait à être confirmé.
M. Ndao du carburant dangereux serait aujourd’hui en circulation au Sénégal. Que pensez-vous d’une telle révélation ?
C’est une révélation grave qui n’est pas rare de nos jours. Parce que beaucoup de pays européens, quand nos Etats veulent exporter chez eux, se voient poser des conditions extrêmement sévères en ce qui concerne le respect des normes. Mais quand ces pays exportent en Afrique, ils ne se soucient vraiment pas de la qualité des produits qu’ils nous envoient ici. Nous avions eu ce genre de cas avec un lait qui venait de la Hollande. Sur les papiers, tous les certificats montraient un respect total des normes. Mais quand on l’a fait analyser au Sénégal et à l’étranger, on s’est rendu compte qu’aucune des normes n’a été respectée. Alors le cas aujourd’hui, sur le carburant, pose problème.
Comment une telle situation peut-elle se poser alors qu’il y a des normes strictes qui encadrent l’importation des hydrocarbures dans notre pays ?
Au Sénégal un décret avait été pris en 2014 en remplacement du décret de 2011. C’est le décret 2014-961, qui fixe les spécifications des hydrocarbures raffinées. Ce décret fixe la composition que doit avoir chaque hydrocarbure importé au Sénégal. Aucune importation ne doit se faire en dehors de ces spécifications données par le décret. Ce qui veut dire que normalement il ne devait pas y avoir sur le marché des produits non conformes à ces spécifications sur le marché. Cependant, l’enquête de l’Ong Public Eye a été menée de façon un peu cachée et on ne peut la prendre pour argent comptant. Pour qu’on puisse l’opposer aux producteurs, distributeurs et importateurs, elle aurait dû être faite de manière contradictoire avec des personnes assermentées pour qu’il ne puisse pas y avoir de contestations. Et c’est la raison pour laquelle nous exigeons que l’Etat sans délai, fasse des prélèvements d’échantillons au niveau des dépôts et certains stations-services, pour voir si réellement il y a sur le marché des produits non conformes aux caractéristiques fixés par le décret. Et en fonction des résultats on pourra savoir s’il y a fraude ou laxisme dans le contrôle et prendre les décisions qui s’imposent. Mais c’est extrêmement important, il faut des analyses.
Mais est ce que nos normes protègent véritablement le citoyen sénégalais ?
Les normes sont devenues de plus en plus sévères en union européenne et par conséquent nous devons aussi faire évoluer nos normes pour les rendre plus sévères pour mieux protéger nos consommateurs. Pour l’instant, les normes que nous avons ne sont pas aussi sévères que celles qu’on met en œuvre dans certains pays. Mais il faut voir si nos normes sont respectées. Parce que les taux qui sont donnés sont supérieurs aux normes sénégalaises et il faut vérifier si ces taux-là sont bel et bien observables sur le terrain au Sénégal. Sur les décrets qui fixent les caractéristiques, il n’y a pas toutes ces spécifications. Par exemple on ne cherche pas la teneur en benzène. Toutes les spécificités qui sont dans le rapport ne sont pas forcément exigées par le décret de 2014, alors qu’on ne peut opposer que des textes qui sont pris. Sauf qu’à l’absence de normes locales, le produit vendu au Sénégal doit être de vente légale dans le pays d’origine. Donc, on peut se baser sur cela pour sanctionner le producteur ou le distributeur qui l’a amené au Sénégal.