A acte politique, réponse politique. C’est en tout cas la lecture que l’on pourrait avoir de la motion de censure déposée contre le gouvernement du Premier Ministre Abdoul Mbaye, par le groupe parlementaire dirigé par le député Modou Diagne Fada. Mécontents d’être trainés dans la boue et jetés en pâture aux populations comme ceux qui se sont enrichis illégalement et illicitement sur leur dos, les libéraux retournent l’ascenseur au Premier Ministre (PM). Dans la missive qu’il a adressée au président de l’Assemblée nationale, pour demander le vote d’une motion de censure contre le gouvernement du PM Abdoul Mbaye, le groupe parlementaire « Libéraux et démocrates » considère que le Premier Ministre Abdoul Mbaye a contribué au blanchiment des capitaux ‘’pillés’’ par l’ancien dictateur tchadien, pour avoir «joué un rôle important dans le transfert et la dissimulation de l’argent de M. Habré, mal acquis du Trésor public tchadien». Or, celui-ci n’aurait eu comme argument de défense, au cours d’une conférence de presse, que l’existence d’un vide juridique par rapport à cette infraction. Pour Abdoul Mbaye, «au moment des faits, il n’existait pas une loi contre le blanchiment d’argent». Ce qui, selon les frères de Modou Diagne Fada, sonne comme «un aveu de blanchiment et même de recel de biens et de fortune appartenant au peuple tchadien». Dès lors, les libéraux pensent que celui-ci ne peut plus continuer à diriger le gouvernement du Sénégal.
Le second argument brandi par les députés libéraux repose sur le rapport d’audit commandité auprès de 36 experts dont des membres de la branche américaine d’un Cabinet international et dont la ‘’Lettre du Continent’’ a fait état dans sa publication N° 645 du 25 octobre 2012. Selon les conclusions de cet audit, pour blanchir ces importantes sommes d’argent qui tournent autour de 16 milliards, la banque aurait procédé à «l’utilisation de comptes appartenant à des clients décédés ou fictifs, qui ont permis d’accueillir les fonds de l’ancien président tchadien en exil au Sénégal». Poursuivant, le rapport précise qu’au «cours de l’année 1991, des ordres ont été donnés pour que la banque en question émette plusieurs ‘’bons de caisse au porteur’’ remis en liquide à Hisséne Habré». Une incongruité qui, selon les libéraux, a rattrapé le Premier ministre. Aussi, pensent-ils : «L’éthique et la morale devraient lui interdire de tels agissements, d’autant plus qu’il est, par ailleurs, accusé de faux et usage de faux». Face à l’imminence de l’ouverture du procès d’Habré par un tribunal ad hoc, les députés libéraux veulent une démission du Premier Ministre et de son gouvernement, pour le rôle que celui-ci aurait joué dans le blanchiment de l’argent d’Habré. A cette fin, ils évoquent les dispositions des articles 86 de la Constitution et 99 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
SOULEYMANE KANE