Riches et pauvres au Sénégal : les dessous d’une cohabitation

Le Sénégal, un pays où cohabitent l’opulence des riches et la misère des pauvres, le tout cautionné par les pouvoirs publics.


Voilà un pays, où riment une pauvreté accrue et une niche de riches. Ainsi cohabite riche et pauvre dans une harmonie depuis longtemps créant ainsi des liens de subordination.Placé 4e économie de la sous-région derrière le Nigéria, la Cote d’Ivoire et le Ghana, le Sénégal voit prospérer depuis l’an 2000 une certaine classe d’hommes et de femmes d’affaires richissimes. Il suffit de flâner dans le tout nouveau mall de Dakar, le Sea Plaza, pour remarquer la tendance : loisirs, habillement, cosmétiques… Les grandes marques ont désormais leurs boutiques sur place. « L’Oréal a ouvert un bureau au Sénégal avec un représentant », confirme un consultant dakarois. BMW, Mercedes… « Les ventes progressent car le pouvoir d’achat croît », assure Edward Gonfray, responsable de la marque Mercedes-Benz pour le Sénégal, le Mali et la Guinée. Mais le luxe, ce n’est pas seulement acheter des biens ou habiter de belles villas, c’est aussi se faire voir. Il faut savoir que la population du Sénégal connait de nombreuses inégalités sociales. C’est un phénomène assez répandu en Afrique où les plus nantis envoient leurs enfants dans les meilleures écoles et universités du monde au moment où les plus pauvres ont à peine de quoi nourrir la famille. Les 5 % des ménages les plus riches s’accaparent de 47 % des revenus alors que 80 % des gens les plus pauvres réussissent à se partager 28 % des revenus (doing business 2011). Le Sénégal est un Etat prébendier c’est à dire que conquérir le pouvoir équivaut au contrôle des sites d’accès à la richesse nationale. Dans un Etat prébendier, le Président de la république est le gardien de la porte qui mène aux prébendes, prestiges et privilèges et donc peut enrichir qui il veut. Dans le contexte économique actuel, être milliardaire est le fruit de travail de toute une vie voir le travail de plusieurs générations, mais la politique est devenue un raccourci pour devenir milliardaire depuis l’an 2000. Un pays a besoin de milliardaires. C’est ainsi que le président sortant Abdoulaye Wade lors d’un entretien sur Africa7 disait : «Je ne récuse pas les riches. Je n’ai jamais vu un pays qui se développe avec les pauvres. Même en Occident, il faut des riches pour investir».
Le chef de l’Etat avoue même qu’avec son avènement à la tête du pays, beaucoup se sont enrichis et, en retour, réinvestissent dans le pays. Au Président Wade d’ajouter qu’il existe «une classe très aisée» et une autre «très pauvre». «On ne peut pas enrichir tout le monde à la fois. Même le bon Dieu ne l’a pas fait».
Des milliardaires dans un pays démontrent le dynamisme des affaires, attirent des investisseurs et contribuent à la création d’emplois. Une économie forte a besoin de consommateurs qui ont un fort pouvoir d’achat. La faible moyenne salariale mensuelle dans les entreprises formelles établie à 221 000 F Cfa en 2006(ANSD 2006) et à 45 960F dans l’informel justifie le manque de pouvoir d’achat. Au même moment des fêtes, baptêmes, mariages, pour la plupart organisés par la classe moyenne se multiplient et beaucoup de millions sont gaspillés.
La Chine a commencé à émerger quand Deng Xiaoping a lancé son fameux “Enrichissez-vous”, mais il parlait du business. Des politiciens milliardaires est un indicateur de pays pauvre et sous-développé parce que l’émergence commence par la séparation des deux sphères d’un côté les riches et de l’autre les pauvres. L’Etat crée les conditions d’un enrichissement général, mais n’a pas de vocation à servir de levier d’enrichissement à ceux qui le contrôlent les destinées du peuple Sénégalais.
P. M. Sall Senecoplus

Bamba Toure

Samedi 22 Décembre 2012 08:33

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