La fraude sur l’âge est pire que le dopage, déclariez vous dans les colonnes de Sud Quotidien. Est-ce pour cette raison que nul n’entre à Diambars sans avoir au préalable déclaré son âge réel ?
Oui ! Tout à fait ! La fraude sur l’âge est pire que le dopage. C’est un cancer pour notre football. Regardez les performances de l’Afrique. Dans toutes les compétitions où il y a limite d’âge, l’Afrique figure de manière correcte, acceptable. J’allais même dire de manière performante, Ainsi, on gagne en U-17, en U-20 et en Olympiques. Mais dès lors qu’il n’y a plus de limites d’âge, le meilleur résultat de l’Afrique, ce sont les quarts de finale (coupe du Monde pour le Cameroun en 1994, le Sénégal en 2002 et le Ghana en 2010, Ndlr).
Jamais, on n’a pas pu atteindre un podium. Il est quand même temps de chercher à comprendre pourquoi on gagne en Cadets, Juniors et Olympiques et qu’ensuite tous les joueurs disparaissent cinq, dix ans plus tard. Faites l’historique des joueurs nigérians qui ont gagné les Jeux olympiques (Atlanta 1996, Ndlr), des joueurs nigérians champions du monde chez les U-20. Faites l’historique des joueurs camerounais vainqueurs des JO (Sydney 2000, Ndlr). Vous verrez un extrêmement important taux de déperdition. C’est dû à la fraude sur l’âge.
Quand je me suis exprimé sur la question, certains sont sortis du bois pour jeter des pierres. Je ne sais d’ailleurs pas pourquoi. Leur seul argument, c’est de dire qu’ils ne sont pas sûrs que nous ne fassions pas de la fraude sur l’âge. Cela n’est pas un bon argument. A supposer que nous en fassions, il faudrait alors nous traiter comme tous les fraudeurs, parce que ceux qui en sont coupables sont des fossoyeurs du football africain.
Vous savez l’Africain et le footballeur africain ont du talent. Le problème, c’est qu’on veuille procéder par des raccourcis pour participer à ce qu’on appelle le festin de l’industrie. Accéder à ce nouveau impose d’être patient, de s’armer d’esprit d’organisation et de méthode, d’avoir des infrastructures adéquates, et de compétence pour encadrer les jeunes. C’est l’absence de ces préalables qui amène à prendre des raccourcis, notamment en diminuant l’âge des jeunes. Et comme par extraordinaire sur le terrain, les Africains sont les plus grands, les plus, costauds, sautent plus haut, et courent plus.
Comment expliquez-vous de telles performances venant d’enfants d’un continent où il y a la disette et la malnutrition, où les pays sont en voie de développement où il n’y a pas d’infrastructures de base, où il y a des carences alimentaires ?
Comment expliquer que malgré ces handicaps, nos footballeurs soient toujours les plus grands, les plus forts, ils sont ceux qui sautent le plus haut, à bas âge. Combien de fois, on a sorti des joueurs de formation qui sont des extra-terrestres ? Que deviennent-ils après ? Où est Nii Lamptey (international ghanéen qui avait pris part à la Can 1992 au Sénégal à l’âge de 17 ans, Ndlr).
Nous ne voulons jeter la pierre à personne, ni donner de leçon à quiconque. Nous voulons juste faire comprendre que cet exercice, est un exercice vain. Si nous voulons vraiment donner à l’Afrique de remporter un jour, une compétition qui compte, on ne peut pas faire l’économie du travail et de la patience. Cela aussi dans la droiture !
Président, la pose de la première pierre de l’institut Diambars a eu lieu en 2003. En 2012 on est la 3ème année d’expérimentation du football professionnel. Etes-vous surpris de la place du Centre sur l’échiquier du football sénégalais ?
Je répondrais oui et non ! Oui, parce qu’à Diambars ne joue que des jeunes que nous avons vu arriver, ici enfants. Je disais à ma cellule audiovisuelle qu’il serait assez drôle que nous puissions reconstituer les images de deux équipes de Diambars. L’image des joueurs qui sont partis dont certains jouent en sélections olympique et A. Et une autre image de l’équipe qui joue le championnat national Ligue 1.
Je dirais également non, parce que le travail que nous avons entrepris est un travail sérieux et méthodique avec probablement des erreurs et des déchets parce qu’au moment où nous commencions ce travail, nous n’avions pas de référentiel. Nous avons dû tout faire par nous-mêmes en regardant à gauche et à droite et en s’armant de patience. Je ne suis donc pas surpris parce que nous savions que nous faisions un travail qui paierait.
Oui, surpris parce que même armés de patience, nous savions que ce ne serait pas un exercice facile, surtout quand on doit aller en Ligue 1.
Je dois avouer que l’avènement de la ligue professionnelle a été une chance extraordinaire pour nous, en nous servant de champ de continuation de la formation de nos jeunes. C’est nécessaire à leur maturation et pour la fin de leur formation.
Dans nos différentes projections, nous espérions monter un club africain au bout de 10 ans. Nous nous étions dits qu’on passerait peut-être cinq ans en Ligue 2. Une fois arrivée en Ligue 1, nous passerions également cinq ans, avant de prétendre gagner un titre.
Parce que nous avions deux contraintes majeures. D’abord la jeunesse de notre effectif et notamment un certain manque en qualités athlétique et physique. Il y a ensuite et surtout des départs parmi les plus talentueux. Parce que notre équipe avec Idrissa Gana Guèye, Pape Ndiaye Souaré, Oumar Wade, Saliou Ciss, Kara Mbodji etc. aurait eu une autre allure. Même si je dois dire que Joseph Lopy n’est pas supérieur à Saliou Ndao et que Matar Fall ne baisserait pas pavillon devant Idrissa Gana Guèye.
C’est la raison pour laquelle, nous ne sommes pas surpris ; nous avons beaucoup travaillé. Nous ne sommes pas surpris parce que ces jeunes se connaissent. Ils ont vécu ici entre cinq à six ans, suivant l’âge auquel ils sont arrivés ici. Je suis surpris parce que ce que vous appelez «finale» contre le Casa Sports (l’interview a été réalisée le samedi 1er septembre, à la veille du match contre le Casa Sports, Ndlr) est un événement que nous n’attendions pas de si tôt.
Est-ce à dire que l’avenir du football sénégalais se fera à Diambars, à Dakar Sacré Cœur, à Aspire, au Génération Foot comparativement aux clubs dits traditionnels tels Jaraaf, Casa, JA, Us Gorée, Linguère…?
L’avenir est au travail sur des bases rationnelles. Alors si c’est Aspire, Dakar Sacré Cœur, Génération Foot qui travaillent sur des bases rationnelles, l’avenir leur appartient. Je vais prendre l’exemple des clubs qui ne vont pas porter plainte contre moi (éclats de rires). Parce que je sais que ce sont des amis. La différence avec Touré Kunda ou l’Us Gorée, c’est que si vous me demandez dans sept à huit ans, qui va jouer dans l’équipe première de Diambars, je peux vous donner 20 noms. Et de cette liste, 15 seront en L1 ou L2. Ce n’est pas parce que tu travailles sur de bases modernes que tu vas régner sur le toit du football sénégalais. C’est le football. Les autres ne dorment pas. Mais sur une décennie, le nombre de fois que tu serais plus proche du titre, sera beaucoup plus important que pour ces clubs-là. Parce que tu travailles sur une lame de fonds. Donc, ces jeunes qui ont déjà commencé à cheminer ensemble vont rester pendant cinq à six ans avant de sortir ensemble dans le championnat. Etant entendu que leurs ainés seront partis, il en restera quatre voire cinq éléments qui vont les encadrer. Ce qui fait que nous aurons une équipe homogène avec des qualités athlétiques et physiques conséquentes. Nous aurons accompli un travail technique soutenu par une attention diététique et des soins que les autres équipes n’auront pas eus. Si posez la même question portant sur l’avenir de leurs joueurs actuels, dans sept ans, Alioune Ndiaye (manager de l’Us Gorée) ou à Mbaye Diouf Diouf (président de Touré Kunda), ne pourront pas assurer 20 comme je viens de vous le dire. Ils vous dirons zéro.
C’est pourquoi, je dis que l’avenir est au travail sur la base de méthodes sérieuses. Il ne sert à rien d’enlever à un garçon de 25 ans, quelques années pour qu’il finisse chez les juniors. Quand j’entends ça dans les tribunes, ça me fait frissonner parce que le garçon qu’on va mettre chez les juniors en réduisant dix ans sur son âge, va être bon chez les U-20. On va ensuite le promouvoir chez les seniors. Il aura une bonne année. Après, il ne faut pas s’étonner qu’il sombre. Nous avons des joueurs supposés avoir 22 ans, alors qu’ils en ont 35 ou 38 ans.
Vous êtes peut-être l’avenir. Mais le football sans supporters n’est pas assez excitant non plus. Or, ni Diambars ni aucun autre centre ou école de football ne disposent de base affective, à l’instar des clubs traditionnels comme Jaraaf, la Ja etc.
Comment comptez-vous pallier cette insuffisance ?
C’est sûr que des initiatives comme Diambars et d’autres ne sont pas une panacée absolue. Il y a un certain nombre de manques, de déficits qu’il faut travailler à compenser. Il est aussi évident que la base affective des clubs dits traditionnels s’est très largement effritée. Sauf des clubs régionaux qui drainent naturellement des foules avec une base régionaliste. C’est notamment le cas du Casa Sports qui d’ailleurs. Mais à y voir de plus près, on se rend compte que là aussi, il y a eu du travail, une lame de fond qui permettent une certaine régularité, faisant que le club n’est jamais loin du titre. C'est-à-dire, le championnat. En quatre ans, le Casa Sports a gagné deux coupes (coupe du Sénégal et coupe de la Ligue et vient d’être sacré champion en 2012).
Le Casa Sports a une très forte base affective illustrative d’une quête identitaire qui colle à l’équipe. Mais où sont les bases affectives du Jaraaf, de la Jeanne d’arc, de l’Us Gorée, du Dial Diop.. ? Elles sont en train de s’effriter.
A Diambars, notre réflexion sur ce point, c’est que nous devons aller conquérir notre base affective.
En quoi faisant ?
La conquête se fera par notre image, la qualité de prestations de nos joueurs. Que les gens puissent se reconnaitre et s’identifier autour du programme que nous avons. Nous voulons avoir une lame de fond, un jeu attrayant qui puisse plaire au football sénégalais. De fait, aujourd’hui, quand on regarde le parcours de Diambars, de la Ligue 2 à maintenant, il y a quand même, une base affective qui commence à se créer. Des gens anonymement, sans être en tee-shirts, viennent regarder nos gosses.
Mais, il s’agit là des spectateurs et non de supporters ?
Tout à fait ! Ce sont ces spectateurs qui vont devenir des supporters. Le supporter est celui qui va au stade. Si le spectateur décide d’aller au stade, c’est pour voir du beau, du bon jeu. S’ils beaucoup continuent à venir au stade, chaque fois Diambars joue, ils vont finir par devenir des supporters.
Tout le monde sait que le Sénégalais aime le jeu. Personnellement, je suis un supporter presque fanatique de Barcelone. Je vais jusqu’en Espagne regarder le Barça jouer. Parce que pour moi, le FC Barcelone, c’est l’expression achevée de ce qu’on doit produire en football.
Si nous arrivons à réconcilier les Sénégalais avec le bon jeu en y ajoutant une touche d’efficacité, qui nous permette de gagner, nous aurons forcément des supporters. Il y a une méthode plus rapide. C’est celle de créer des comités de supporters, en les finançant, en les faisant adhérer au club. Ils viennent avec des tam-tams. Mais, pour moi, ce sont plutôt des supportés que des supporters (éclats de rires).
Nous avons choisi une autre option, où des gens vont se reconnaitre dans Diambars, vont accepter de faire des sacrifices sur des kilomètres pour venir soutenir l’équipe en arborant fièrement ses couleurs et son maillot.
Où allez-vous chercher cette base-là ? A Saly, votre lieu résidence ou ailleurs ?
Non pas seulement à Saly. qui est notre localisation. Nous la chercherons dans tout le Sénégal. Pourquoi, le Sénégalais qui habite Saint-louis, Diourbel, Ziguinchor ou ailleurs dans le pays, ne supporterait-il pas Diambars ?
Sur ce terrain, Niary Tally a une réussite. Quand je vois dans la rue, un jeune arborer fièrement un tee-shirt de ce club et pas un autre, je dis que c’est une réussite. Mais il ne faudrait pas que cette réussite se transforme en arme contre eux.
Président en plus de champions de foot, vous formez aussi des champions de la vie. Quelle est la place des études dans le centre Diambars ?
S’il y avait un classement à faire entre études et football, les études seraient en première place. Même si nous gagnions le championnat, ce titre n’arriverait qu’en seconde position dans nos résultats globaux. BAC et BFEM seraient placés devant. Les études ont toujours été privilégiées. D’ailleurs, les jeunes passent plus de temps à étudier (8h à 14 heures), qu’à jouer au football (2 heures d’entraînement).
En outre, s’agissant des motifs d’exclusion de Diambars, il y a les études et il n’y a pas le football. Pour le football, on ne peut exclure personne du centre. C’est en l’absence de volonté à l’école, qu’un pensionnaire peut se retrouver hors de l’établissement, quel que soit son talent au football. Le scolaire peut punir le jeune au sportif, c'est-à-dire l’empêcher d’aller s’entrainer, d’aller jouer, de partir en tournée etc. Mais le contraire n’est pas valable.
De fait, cette année, en juniors, j’ai suspendu moi-même pendant six mois, deux jeunes qui n’avaient pas de bons résultats scolaires et qui devaient passer le BFEM. Pourtant, ils avaient des potentiels de joueurs de football. Ces deux jeunes après cette suspension ont tous les deux réussi à leur examen au premier tour.
Oui ! Tout à fait ! La fraude sur l’âge est pire que le dopage. C’est un cancer pour notre football. Regardez les performances de l’Afrique. Dans toutes les compétitions où il y a limite d’âge, l’Afrique figure de manière correcte, acceptable. J’allais même dire de manière performante, Ainsi, on gagne en U-17, en U-20 et en Olympiques. Mais dès lors qu’il n’y a plus de limites d’âge, le meilleur résultat de l’Afrique, ce sont les quarts de finale (coupe du Monde pour le Cameroun en 1994, le Sénégal en 2002 et le Ghana en 2010, Ndlr).
Jamais, on n’a pas pu atteindre un podium. Il est quand même temps de chercher à comprendre pourquoi on gagne en Cadets, Juniors et Olympiques et qu’ensuite tous les joueurs disparaissent cinq, dix ans plus tard. Faites l’historique des joueurs nigérians qui ont gagné les Jeux olympiques (Atlanta 1996, Ndlr), des joueurs nigérians champions du monde chez les U-20. Faites l’historique des joueurs camerounais vainqueurs des JO (Sydney 2000, Ndlr). Vous verrez un extrêmement important taux de déperdition. C’est dû à la fraude sur l’âge.
Quand je me suis exprimé sur la question, certains sont sortis du bois pour jeter des pierres. Je ne sais d’ailleurs pas pourquoi. Leur seul argument, c’est de dire qu’ils ne sont pas sûrs que nous ne fassions pas de la fraude sur l’âge. Cela n’est pas un bon argument. A supposer que nous en fassions, il faudrait alors nous traiter comme tous les fraudeurs, parce que ceux qui en sont coupables sont des fossoyeurs du football africain.
Vous savez l’Africain et le footballeur africain ont du talent. Le problème, c’est qu’on veuille procéder par des raccourcis pour participer à ce qu’on appelle le festin de l’industrie. Accéder à ce nouveau impose d’être patient, de s’armer d’esprit d’organisation et de méthode, d’avoir des infrastructures adéquates, et de compétence pour encadrer les jeunes. C’est l’absence de ces préalables qui amène à prendre des raccourcis, notamment en diminuant l’âge des jeunes. Et comme par extraordinaire sur le terrain, les Africains sont les plus grands, les plus, costauds, sautent plus haut, et courent plus.
Comment expliquez-vous de telles performances venant d’enfants d’un continent où il y a la disette et la malnutrition, où les pays sont en voie de développement où il n’y a pas d’infrastructures de base, où il y a des carences alimentaires ?
Comment expliquer que malgré ces handicaps, nos footballeurs soient toujours les plus grands, les plus forts, ils sont ceux qui sautent le plus haut, à bas âge. Combien de fois, on a sorti des joueurs de formation qui sont des extra-terrestres ? Que deviennent-ils après ? Où est Nii Lamptey (international ghanéen qui avait pris part à la Can 1992 au Sénégal à l’âge de 17 ans, Ndlr).
Nous ne voulons jeter la pierre à personne, ni donner de leçon à quiconque. Nous voulons juste faire comprendre que cet exercice, est un exercice vain. Si nous voulons vraiment donner à l’Afrique de remporter un jour, une compétition qui compte, on ne peut pas faire l’économie du travail et de la patience. Cela aussi dans la droiture !
Président, la pose de la première pierre de l’institut Diambars a eu lieu en 2003. En 2012 on est la 3ème année d’expérimentation du football professionnel. Etes-vous surpris de la place du Centre sur l’échiquier du football sénégalais ?
Je répondrais oui et non ! Oui, parce qu’à Diambars ne joue que des jeunes que nous avons vu arriver, ici enfants. Je disais à ma cellule audiovisuelle qu’il serait assez drôle que nous puissions reconstituer les images de deux équipes de Diambars. L’image des joueurs qui sont partis dont certains jouent en sélections olympique et A. Et une autre image de l’équipe qui joue le championnat national Ligue 1.
Je dirais également non, parce que le travail que nous avons entrepris est un travail sérieux et méthodique avec probablement des erreurs et des déchets parce qu’au moment où nous commencions ce travail, nous n’avions pas de référentiel. Nous avons dû tout faire par nous-mêmes en regardant à gauche et à droite et en s’armant de patience. Je ne suis donc pas surpris parce que nous savions que nous faisions un travail qui paierait.
Oui, surpris parce que même armés de patience, nous savions que ce ne serait pas un exercice facile, surtout quand on doit aller en Ligue 1.
Je dois avouer que l’avènement de la ligue professionnelle a été une chance extraordinaire pour nous, en nous servant de champ de continuation de la formation de nos jeunes. C’est nécessaire à leur maturation et pour la fin de leur formation.
Dans nos différentes projections, nous espérions monter un club africain au bout de 10 ans. Nous nous étions dits qu’on passerait peut-être cinq ans en Ligue 2. Une fois arrivée en Ligue 1, nous passerions également cinq ans, avant de prétendre gagner un titre.
Parce que nous avions deux contraintes majeures. D’abord la jeunesse de notre effectif et notamment un certain manque en qualités athlétique et physique. Il y a ensuite et surtout des départs parmi les plus talentueux. Parce que notre équipe avec Idrissa Gana Guèye, Pape Ndiaye Souaré, Oumar Wade, Saliou Ciss, Kara Mbodji etc. aurait eu une autre allure. Même si je dois dire que Joseph Lopy n’est pas supérieur à Saliou Ndao et que Matar Fall ne baisserait pas pavillon devant Idrissa Gana Guèye.
C’est la raison pour laquelle, nous ne sommes pas surpris ; nous avons beaucoup travaillé. Nous ne sommes pas surpris parce que ces jeunes se connaissent. Ils ont vécu ici entre cinq à six ans, suivant l’âge auquel ils sont arrivés ici. Je suis surpris parce que ce que vous appelez «finale» contre le Casa Sports (l’interview a été réalisée le samedi 1er septembre, à la veille du match contre le Casa Sports, Ndlr) est un événement que nous n’attendions pas de si tôt.
Est-ce à dire que l’avenir du football sénégalais se fera à Diambars, à Dakar Sacré Cœur, à Aspire, au Génération Foot comparativement aux clubs dits traditionnels tels Jaraaf, Casa, JA, Us Gorée, Linguère…?
L’avenir est au travail sur des bases rationnelles. Alors si c’est Aspire, Dakar Sacré Cœur, Génération Foot qui travaillent sur des bases rationnelles, l’avenir leur appartient. Je vais prendre l’exemple des clubs qui ne vont pas porter plainte contre moi (éclats de rires). Parce que je sais que ce sont des amis. La différence avec Touré Kunda ou l’Us Gorée, c’est que si vous me demandez dans sept à huit ans, qui va jouer dans l’équipe première de Diambars, je peux vous donner 20 noms. Et de cette liste, 15 seront en L1 ou L2. Ce n’est pas parce que tu travailles sur de bases modernes que tu vas régner sur le toit du football sénégalais. C’est le football. Les autres ne dorment pas. Mais sur une décennie, le nombre de fois que tu serais plus proche du titre, sera beaucoup plus important que pour ces clubs-là. Parce que tu travailles sur une lame de fonds. Donc, ces jeunes qui ont déjà commencé à cheminer ensemble vont rester pendant cinq à six ans avant de sortir ensemble dans le championnat. Etant entendu que leurs ainés seront partis, il en restera quatre voire cinq éléments qui vont les encadrer. Ce qui fait que nous aurons une équipe homogène avec des qualités athlétiques et physiques conséquentes. Nous aurons accompli un travail technique soutenu par une attention diététique et des soins que les autres équipes n’auront pas eus. Si posez la même question portant sur l’avenir de leurs joueurs actuels, dans sept ans, Alioune Ndiaye (manager de l’Us Gorée) ou à Mbaye Diouf Diouf (président de Touré Kunda), ne pourront pas assurer 20 comme je viens de vous le dire. Ils vous dirons zéro.
C’est pourquoi, je dis que l’avenir est au travail sur la base de méthodes sérieuses. Il ne sert à rien d’enlever à un garçon de 25 ans, quelques années pour qu’il finisse chez les juniors. Quand j’entends ça dans les tribunes, ça me fait frissonner parce que le garçon qu’on va mettre chez les juniors en réduisant dix ans sur son âge, va être bon chez les U-20. On va ensuite le promouvoir chez les seniors. Il aura une bonne année. Après, il ne faut pas s’étonner qu’il sombre. Nous avons des joueurs supposés avoir 22 ans, alors qu’ils en ont 35 ou 38 ans.
Vous êtes peut-être l’avenir. Mais le football sans supporters n’est pas assez excitant non plus. Or, ni Diambars ni aucun autre centre ou école de football ne disposent de base affective, à l’instar des clubs traditionnels comme Jaraaf, la Ja etc.
Comment comptez-vous pallier cette insuffisance ?
C’est sûr que des initiatives comme Diambars et d’autres ne sont pas une panacée absolue. Il y a un certain nombre de manques, de déficits qu’il faut travailler à compenser. Il est aussi évident que la base affective des clubs dits traditionnels s’est très largement effritée. Sauf des clubs régionaux qui drainent naturellement des foules avec une base régionaliste. C’est notamment le cas du Casa Sports qui d’ailleurs. Mais à y voir de plus près, on se rend compte que là aussi, il y a eu du travail, une lame de fond qui permettent une certaine régularité, faisant que le club n’est jamais loin du titre. C'est-à-dire, le championnat. En quatre ans, le Casa Sports a gagné deux coupes (coupe du Sénégal et coupe de la Ligue et vient d’être sacré champion en 2012).
Le Casa Sports a une très forte base affective illustrative d’une quête identitaire qui colle à l’équipe. Mais où sont les bases affectives du Jaraaf, de la Jeanne d’arc, de l’Us Gorée, du Dial Diop.. ? Elles sont en train de s’effriter.
A Diambars, notre réflexion sur ce point, c’est que nous devons aller conquérir notre base affective.
En quoi faisant ?
La conquête se fera par notre image, la qualité de prestations de nos joueurs. Que les gens puissent se reconnaitre et s’identifier autour du programme que nous avons. Nous voulons avoir une lame de fond, un jeu attrayant qui puisse plaire au football sénégalais. De fait, aujourd’hui, quand on regarde le parcours de Diambars, de la Ligue 2 à maintenant, il y a quand même, une base affective qui commence à se créer. Des gens anonymement, sans être en tee-shirts, viennent regarder nos gosses.
Mais, il s’agit là des spectateurs et non de supporters ?
Tout à fait ! Ce sont ces spectateurs qui vont devenir des supporters. Le supporter est celui qui va au stade. Si le spectateur décide d’aller au stade, c’est pour voir du beau, du bon jeu. S’ils beaucoup continuent à venir au stade, chaque fois Diambars joue, ils vont finir par devenir des supporters.
Tout le monde sait que le Sénégalais aime le jeu. Personnellement, je suis un supporter presque fanatique de Barcelone. Je vais jusqu’en Espagne regarder le Barça jouer. Parce que pour moi, le FC Barcelone, c’est l’expression achevée de ce qu’on doit produire en football.
Si nous arrivons à réconcilier les Sénégalais avec le bon jeu en y ajoutant une touche d’efficacité, qui nous permette de gagner, nous aurons forcément des supporters. Il y a une méthode plus rapide. C’est celle de créer des comités de supporters, en les finançant, en les faisant adhérer au club. Ils viennent avec des tam-tams. Mais, pour moi, ce sont plutôt des supportés que des supporters (éclats de rires).
Nous avons choisi une autre option, où des gens vont se reconnaitre dans Diambars, vont accepter de faire des sacrifices sur des kilomètres pour venir soutenir l’équipe en arborant fièrement ses couleurs et son maillot.
Où allez-vous chercher cette base-là ? A Saly, votre lieu résidence ou ailleurs ?
Non pas seulement à Saly. qui est notre localisation. Nous la chercherons dans tout le Sénégal. Pourquoi, le Sénégalais qui habite Saint-louis, Diourbel, Ziguinchor ou ailleurs dans le pays, ne supporterait-il pas Diambars ?
Sur ce terrain, Niary Tally a une réussite. Quand je vois dans la rue, un jeune arborer fièrement un tee-shirt de ce club et pas un autre, je dis que c’est une réussite. Mais il ne faudrait pas que cette réussite se transforme en arme contre eux.
Président en plus de champions de foot, vous formez aussi des champions de la vie. Quelle est la place des études dans le centre Diambars ?
S’il y avait un classement à faire entre études et football, les études seraient en première place. Même si nous gagnions le championnat, ce titre n’arriverait qu’en seconde position dans nos résultats globaux. BAC et BFEM seraient placés devant. Les études ont toujours été privilégiées. D’ailleurs, les jeunes passent plus de temps à étudier (8h à 14 heures), qu’à jouer au football (2 heures d’entraînement).
En outre, s’agissant des motifs d’exclusion de Diambars, il y a les études et il n’y a pas le football. Pour le football, on ne peut exclure personne du centre. C’est en l’absence de volonté à l’école, qu’un pensionnaire peut se retrouver hors de l’établissement, quel que soit son talent au football. Le scolaire peut punir le jeune au sportif, c'est-à-dire l’empêcher d’aller s’entrainer, d’aller jouer, de partir en tournée etc. Mais le contraire n’est pas valable.
De fait, cette année, en juniors, j’ai suspendu moi-même pendant six mois, deux jeunes qui n’avaient pas de bons résultats scolaires et qui devaient passer le BFEM. Pourtant, ils avaient des potentiels de joueurs de football. Ces deux jeunes après cette suspension ont tous les deux réussi à leur examen au premier tour.