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Sénégal: Macky Sall ne doit pas enterrer Wade

Macky Sall vient de passer le cap des 100 jours à la tête du Sénégal. Mais, pour faire mieux qu’Abdoulaye Wade, le président sénégalais a tout intérêt à ne pas effacer complètement l’œuvre de son prédécesseur.


Sénégal: Macky Sall ne doit pas enterrer Wade

C’est une coutume de la presse de procéder à une évaluation des premiers pas d’un nouveau régime après les 100 premiers jours. C’est aussi une étape que les politiques guettent, quand les électeurs les renvoient dans l’opposition.

Cela fait donc du terme des 100 premiers jours un top de départ, pour démarrer l’offensive critique contre le nouveau pouvoir. Une sorte de fin d’état de grâce de convenance. Ce qui n’est pas toujours exact.

Le Sénégal a élu un nouveau président le 25 mars 2012. L’élu de la nation s’appelle Macky Sall. En dix ans de présence au cœur du régime libéral, l’homme a su se bâtir une stature d’homme d’Etat, puis de présidentiable.Il est parvenu à se forger un capital social et politique pour asseoir une ambition nationale.

Enfin, il a osé affronter Me Wade, le monstre froid et calculateur de la politique, au style si intimidant, au charisme époustouflant et surtout aux méthodes politiciennes déstabilisantes. Il est parvenu à éviter les chausse-trapes qui ont été disséminées sur son parcours, qu’il a accompli en blitzkrieg.
Comment marquer l'Histoire

Elu confortablement, Macky Sall se souvient certainement encore aujourd’hui, avec frisson, de ce qu’il a enduré et des risques pris à défier celui qui l’a fait homme d’Etat.

Mais une nouvelle ère a commencé le 25 mars, quand il a terrassé le maître. Elu sans bavure,  il a désormais un mandat à accomplir et rien d’autre. Il a des engagements à respecter, un pouvoir à installer et à consolider. Enfin, il en mesure le défi, il se doit de marquer l’Histoire de son pays en inscrivant sur le marbre son œuvre.

N’est-il pas le premier président élu du Sénégal né après l’accession du pays à l’indépendance? Il se doit d’être conscient qu’il succède à Wade, un homme qui a tout fait pour que l’Histoire retienne son nom et qui y est sans doute parvenu.

Dans quelques décennies, le 23 juin s’estompera dans la mémoire de beaucoup de Sénégalais, alors que  la statue de la Renaissance africaine et l’autoroute à péage et la génération de politiques que Wade a promus, dont Macky Sall lui-même, seront encore des marques vivantes de l’héritage de Me Abdoulaye Wade.
L'ère Wade n'était pas une parenthèse

A Macky Sall de faire autant sinon mieux que Wade et non s’évertuer à effacer l’œuvre de son prédécesseur comme de vulgaires traces dans l’Histoire en marche du Sénégal.

Cent jours après son installation dans le fauteuil laissé par Wade, sur lequel s’étaient assis Léopold Sédar Senghor puis Abdou Diouf, Macky Sall a commencé son mandat sur un ton bien différent de celui qui l’a précédé, il y a douze ans, à la tête du pays.

Ses premiers pas prouvent qu’il ne se veut pas être le continuateur de l’œuvre de Wade. Au contraire, il a choisi de faire le procès du régime battu.
Oublier l'euphorie de l'état de grâce

Plus féroce que le Sopi (changement en wolof) qui avait commencé son règne en 2000 par le procès d’anciens dignitaires, le nouveau pouvoir entend s’attaquer aux mœurs politico-affairistes.

Le Sopi ayant raté ses douze premiers mois de pouvoir et sa chasse aux sorcières, le chef de l’Etat et son commando d’incorruptibles vont-ils faire mieux que Wade et Moustapha Niasse (ancien premier ministre) en 2000 ou Diouf en 1981?

Ceux qui veulent s’élever en Elliot Ness pour alpaguer des Al Capone d’un nouveau genre sont si nombreux autour de Macky Sall.

En égrenant les 100 premiers jours du nouveau pouvoir, le nettoyage des écuries de Wade prend le pas sur tout le reste.

Chaque jour de plus montre que le curage du parquet de la République occupe davantage. Les dorures des palais importent beaucoup. Il faut qu’elles brillent.

Cette vague de ferveur républicaine comble de bonheur ceux qui ont été outrés par le culot des Libéraux de Wade qui sont allés au-delà du sacrilège avec le bien public ou les règles qui fondent nos institutions.

Mais après l’euphorie, il faut bien que les chantiers rouvrent, que les investisseurs reviennent, que la consommation redémarre, etc. Après cent jours, les électeurs commencent désormais à compter les jours qui les mènent au mieux-être ou à la déception. Attention à la morosité.

Abdoulaye Bamba Diallo (cet article a d'abord été publié dans Nouvel Horizon)

Slateafrique.fr


Lundi 2 Juillet 2012 - 16:08





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