« Plus jamais ça ! ». C’est ce que disait Mandela après avoir pardonné aux bourreaux de l’Apartheid. S’il est opportun que l’Afrique pardonne à l’occident pour les atrocités perpétrées avec la traite négrière et le colonialisme, il est urgent qu’elle lève le bouclier contre toute nouvelle injustice ou frustration faite à son peuple. Au prétexte de dénoncer le communautarisme des étrangers, les actes xénophobes et islamophobes contre les immigrés africains sont banalisés en Europe. Si l’immigré à le devoir de respecter les lois de son pays d’accueil, il n’en demeure pas moins que sa dignité et ses droits fondamentaux ne peuvent pas être bafoués.
Les émeutes en France, prétexte pour décomplexer la xénophobie et l’islamophobie ?
Après les émeutes de 2005, la majorité des français étaient favorable à la mise en place d’un couvre feu et à la suppression des aides sociales aux parents d’émeutiers. Alors que seul un tiers d’entre eux trouvait nécessaire de faire la lumière sur d’éventuelles bavures policières. Les sondages qui ont suivi ces émeutes montraient que la majorité des français étaient favorables à une définition plus restrictive de l’application des règles du regroupement familial, et à l’expulsion des étrangers, même en situation régulière, condamnés pour violences urbaines. Ainsi, malgré le fait que la France se dise pays des droits de l’homme, sa population défendait la violation d’un droit fondamental : le droit à une vie privée et familiale normale, consacré par le droit français et par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Les français réclamaient aussi une discrimination pénale contre les immigrés. Il est inconcevable qu’une même infraction soit sanctionnée différemment selon le statut administratif ou la nationalité du délinquant. Cet acharnement populiste contre l’immigré a amené des hommes politiques à défendre qu’il faille repérer chez les marmots de deux ans les bourgeons de la délinquance. On était à deux pas de valider en France le concept eugéniste du crime. En 2010, Marine Le Pen, présidente du Front national, avait insulté les musulmans de France en comparant leurs prières de rue à l’occupation Nazi d’Hitler. Son immunité parlementaire vient d’être levée par les députés européens le 02 juillet 2013. Elle sera jugée pour incitation à la haine raciale. Avant elle, un autre élu du Front National, Bruno Gollnisch, avait vu son immunité levée pour ses propos tenus en 2008 accusant les immigrés musulmans d’envahir la France et de détruire sa culture et ses valeurs.
Racaille des banlieues ou racaille politicienne ?
Lors d’une visite dans une banlieue sensible, Nicolas Sarkozy a été hué par des jeunes, mécontents de sa politique. Il les avait traité de racaille et avait promis de nettoyer leur quartier au Karcher. Malgré la polémique et l’indignation que ses propos ont suscitées, il renchérissait en disant que s’il avait un reproche à se faire, c’est que compte tenu d’un certain nombre d’individus qu’ils avaient en face d’eux, et de leur pedigree judiciaire, le mot racaille est faible.
Ces déclarations ont cristallisé les clichés sur l’immigration et stigmatisé les jeunes issus de l’immigration africaine comme des ennemis de la république française. La majeure partie des français appréciait les actions policières musclées, les interpellations et les condamnations en série qui ont suivi les émeutes de 2005. Alors que le problème des banlieues françaises est une réalité structurelle qui ne peut être résolue par des mesures politiciennes conjoncturelles. Tout résultat produit par cette méthode ne sera que de façade. Le problème ressurgira.
Entre temps, les hommes politiques se livrent à une compétition d’agressivité verbale contre les jeunes immigrés des banlieues. C’est devenu la mode pour séduire les électeurs déçus et les frustrés. A ce propos d’anciens responsables du front national, Pierre-louis Caussé et Daniel Simompieri avouait que les outrances verbales plaisent à l’électorat d’extrême droite.
Les thèmes de campagne populistes sur l’immigration restrictive, les mesures sécuritaires, le retour à un Etat policier, et l’identité nationale ont été instrumentalisés dans les discours et programmes politiques.
Alors, la bande de racaille, ce sont les jeunes ou ces politiciens ?
Être noir ou arabe, et musulman : un péché existentiel en France ?
L’obscurité de la situation sociale des Noirs en banlieue, empirée par l’obscurité de leur couleur de peau, les empêche d’accéder aux responsabilités. Ils sont victimes de discrimination à l’embauche et au logement. En même temps on nourrit envers eux le cliché selon lequel ils seraient des parasites profitant du système. L’immigration des africains musulmans, accusée d’être responsable de l’insécurité urbaine, est devenue le souffre-douleur des fachos et politicards français. Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France, considérant que l’immigration lui semble être responsable de la délinquance juvénile en France, exigeait le rétablissement de la double peine et une politique d' « immigration zéro ». Dans sa logique, si l’immigration est responsable de la délinquance en France, immigration Zéro égale délinquance Zéro. Trop terre à terre ! Si sa solution était retenue par la France et que les autres pays lui appliquaient la réciprocité, combien de français, disséminés dans le monde, seraient obligés d’abandonner leurs acquis à l’étranger pour aller gonfler la liste déjà très longue des chômeurs dans leur pays ? On se rappelle encore du gros délire de ce même Philippe de Villiers, qui assimilait les violences urbaines de novembre 2005 à une « guerre civile ethnique ». Il proposait alors que l’armée française intervienne dans les dans les zones concernées et qu’elle puisse fouiller les appartements et les caves. Ça sent le Gestapo.
Amalgame malsain entre polygamie africaine et violences urbaines
Des politiciens français, encore plus ingénieux, ont tenté d’établir un lien de causalité entre polygamie et violence urbaine. Au Sénat français, des politiques ont essayé de faire croire que la polygamie est en partie la cause des violences urbaines. C’est ce qu’avait déclaré Gérard Larcher, ancien président du Sénat français. Et l’ex président du groupe UMP à l’assemblée, Bernard Accoyer, d’enfoncer le couteau dans la plaie, en affirmant que la polygamie pose un problème de logement et qu’on ne peut pas vivre à plusieurs dizaines dans un appartement. Le meilleur vient d’un député-maire UMP de la région parisienne. Il a prétendu que les délinquants les plus difficiles dans sa commune étaient souvent issus de familles polygames. Quelle chasse à l’homme africain!
En réalité le problème de l’autorité parentale en France, est plus souvent lié à la famille monoparentale qu’à la polygamie. D’autant plus que les chiffres montrent que la polygamie est une réalité marginale en France. Ces mêmes chiffres montrent que beaucoup d’enfants issus de familles non immigrées, sont élevées par un seul parent, à cause du nombre important des divorces, et du peu d’intérêt accordé au mariage, institution de plus en plus ringardisée en France.
La banalisation de la recette xénophobe du Front National
Les politiciens de la droite comme de la gauche se sont rendu compte que la formule « Le Pen » marche, et qu’il faille plus ou moins adopter sa méthode. C’est du moins ce que laissent penser le mimétisme politique en faveur du Front national. Le discours des « Le Pen » n’a-t-il pas influencé la tentative de mise en quarantaine des jeunes à Montfermeil (Seine-Saint-Denis – Île de France) ?
Suite aux émeutes de 2005, le maire de cette ville, Xavier Lemoine, avait pris un arrêté municipal interdisant pendant des mois aux jeunes de 15-18 ans de se promener à plus de trois en centre ville. Les contrevenants risquaient une amende de 38 euros. Le maire justifiait cette interdiction ridicule par la hausse des vols avec violence dans sa ville. Il défendait que son arrêté allait s’appliquer de manière préventive et avec discernement. Discernement signifie choix. Le choix des sujets dans l’application d’une loi pénale ouvre la porte à des décisions arbitraires reposant sur des clichés. Or, une loi ne peut porter en elle-même les germes d’une application discriminatoire. La loi doit être neutre et de portée générale. Cet arrêté instaurait de fait un délit de sale gueule : la jeunesse issue de l’immigration, largement stigmatisée, risquait de constituer une cible privilégiée dans l’application sélective de ce regrettable arrêté.
Dans les débats politiques en France le sujet de l’immigration est devenu un fantasme qui suscite des agitations et des excès. L’immigré africain-musulman est devenu un fonds de commerce électoral, un bouc émissaire, une proie facile, sans défense, qu’on n’hésite pas à abattre froidement et lâchement pour gratter des points d’audimat, booster son indice de confiance, ou bichonner son électorat néo-fasciste. Florian Philippot, vice-président du Front national, est la tête de file de cette bande de braconniers qui a besoin d’abattre de l’africain pour asseoir son existence politique. Mais l’africain d’aujourd’hui ne se laissera pas faire.
Aliou TALL
Président du RADUCC (Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen)
Paris - Dakar.
Email : raducc@hotmail.fr
Les émeutes en France, prétexte pour décomplexer la xénophobie et l’islamophobie ?
Après les émeutes de 2005, la majorité des français étaient favorable à la mise en place d’un couvre feu et à la suppression des aides sociales aux parents d’émeutiers. Alors que seul un tiers d’entre eux trouvait nécessaire de faire la lumière sur d’éventuelles bavures policières. Les sondages qui ont suivi ces émeutes montraient que la majorité des français étaient favorables à une définition plus restrictive de l’application des règles du regroupement familial, et à l’expulsion des étrangers, même en situation régulière, condamnés pour violences urbaines. Ainsi, malgré le fait que la France se dise pays des droits de l’homme, sa population défendait la violation d’un droit fondamental : le droit à une vie privée et familiale normale, consacré par le droit français et par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Les français réclamaient aussi une discrimination pénale contre les immigrés. Il est inconcevable qu’une même infraction soit sanctionnée différemment selon le statut administratif ou la nationalité du délinquant. Cet acharnement populiste contre l’immigré a amené des hommes politiques à défendre qu’il faille repérer chez les marmots de deux ans les bourgeons de la délinquance. On était à deux pas de valider en France le concept eugéniste du crime. En 2010, Marine Le Pen, présidente du Front national, avait insulté les musulmans de France en comparant leurs prières de rue à l’occupation Nazi d’Hitler. Son immunité parlementaire vient d’être levée par les députés européens le 02 juillet 2013. Elle sera jugée pour incitation à la haine raciale. Avant elle, un autre élu du Front National, Bruno Gollnisch, avait vu son immunité levée pour ses propos tenus en 2008 accusant les immigrés musulmans d’envahir la France et de détruire sa culture et ses valeurs.
Racaille des banlieues ou racaille politicienne ?
Lors d’une visite dans une banlieue sensible, Nicolas Sarkozy a été hué par des jeunes, mécontents de sa politique. Il les avait traité de racaille et avait promis de nettoyer leur quartier au Karcher. Malgré la polémique et l’indignation que ses propos ont suscitées, il renchérissait en disant que s’il avait un reproche à se faire, c’est que compte tenu d’un certain nombre d’individus qu’ils avaient en face d’eux, et de leur pedigree judiciaire, le mot racaille est faible.
Ces déclarations ont cristallisé les clichés sur l’immigration et stigmatisé les jeunes issus de l’immigration africaine comme des ennemis de la république française. La majeure partie des français appréciait les actions policières musclées, les interpellations et les condamnations en série qui ont suivi les émeutes de 2005. Alors que le problème des banlieues françaises est une réalité structurelle qui ne peut être résolue par des mesures politiciennes conjoncturelles. Tout résultat produit par cette méthode ne sera que de façade. Le problème ressurgira.
Entre temps, les hommes politiques se livrent à une compétition d’agressivité verbale contre les jeunes immigrés des banlieues. C’est devenu la mode pour séduire les électeurs déçus et les frustrés. A ce propos d’anciens responsables du front national, Pierre-louis Caussé et Daniel Simompieri avouait que les outrances verbales plaisent à l’électorat d’extrême droite.
Les thèmes de campagne populistes sur l’immigration restrictive, les mesures sécuritaires, le retour à un Etat policier, et l’identité nationale ont été instrumentalisés dans les discours et programmes politiques.
Alors, la bande de racaille, ce sont les jeunes ou ces politiciens ?
Être noir ou arabe, et musulman : un péché existentiel en France ?
L’obscurité de la situation sociale des Noirs en banlieue, empirée par l’obscurité de leur couleur de peau, les empêche d’accéder aux responsabilités. Ils sont victimes de discrimination à l’embauche et au logement. En même temps on nourrit envers eux le cliché selon lequel ils seraient des parasites profitant du système. L’immigration des africains musulmans, accusée d’être responsable de l’insécurité urbaine, est devenue le souffre-douleur des fachos et politicards français. Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France, considérant que l’immigration lui semble être responsable de la délinquance juvénile en France, exigeait le rétablissement de la double peine et une politique d' « immigration zéro ». Dans sa logique, si l’immigration est responsable de la délinquance en France, immigration Zéro égale délinquance Zéro. Trop terre à terre ! Si sa solution était retenue par la France et que les autres pays lui appliquaient la réciprocité, combien de français, disséminés dans le monde, seraient obligés d’abandonner leurs acquis à l’étranger pour aller gonfler la liste déjà très longue des chômeurs dans leur pays ? On se rappelle encore du gros délire de ce même Philippe de Villiers, qui assimilait les violences urbaines de novembre 2005 à une « guerre civile ethnique ». Il proposait alors que l’armée française intervienne dans les dans les zones concernées et qu’elle puisse fouiller les appartements et les caves. Ça sent le Gestapo.
Amalgame malsain entre polygamie africaine et violences urbaines
Des politiciens français, encore plus ingénieux, ont tenté d’établir un lien de causalité entre polygamie et violence urbaine. Au Sénat français, des politiques ont essayé de faire croire que la polygamie est en partie la cause des violences urbaines. C’est ce qu’avait déclaré Gérard Larcher, ancien président du Sénat français. Et l’ex président du groupe UMP à l’assemblée, Bernard Accoyer, d’enfoncer le couteau dans la plaie, en affirmant que la polygamie pose un problème de logement et qu’on ne peut pas vivre à plusieurs dizaines dans un appartement. Le meilleur vient d’un député-maire UMP de la région parisienne. Il a prétendu que les délinquants les plus difficiles dans sa commune étaient souvent issus de familles polygames. Quelle chasse à l’homme africain!
En réalité le problème de l’autorité parentale en France, est plus souvent lié à la famille monoparentale qu’à la polygamie. D’autant plus que les chiffres montrent que la polygamie est une réalité marginale en France. Ces mêmes chiffres montrent que beaucoup d’enfants issus de familles non immigrées, sont élevées par un seul parent, à cause du nombre important des divorces, et du peu d’intérêt accordé au mariage, institution de plus en plus ringardisée en France.
La banalisation de la recette xénophobe du Front National
Les politiciens de la droite comme de la gauche se sont rendu compte que la formule « Le Pen » marche, et qu’il faille plus ou moins adopter sa méthode. C’est du moins ce que laissent penser le mimétisme politique en faveur du Front national. Le discours des « Le Pen » n’a-t-il pas influencé la tentative de mise en quarantaine des jeunes à Montfermeil (Seine-Saint-Denis – Île de France) ?
Suite aux émeutes de 2005, le maire de cette ville, Xavier Lemoine, avait pris un arrêté municipal interdisant pendant des mois aux jeunes de 15-18 ans de se promener à plus de trois en centre ville. Les contrevenants risquaient une amende de 38 euros. Le maire justifiait cette interdiction ridicule par la hausse des vols avec violence dans sa ville. Il défendait que son arrêté allait s’appliquer de manière préventive et avec discernement. Discernement signifie choix. Le choix des sujets dans l’application d’une loi pénale ouvre la porte à des décisions arbitraires reposant sur des clichés. Or, une loi ne peut porter en elle-même les germes d’une application discriminatoire. La loi doit être neutre et de portée générale. Cet arrêté instaurait de fait un délit de sale gueule : la jeunesse issue de l’immigration, largement stigmatisée, risquait de constituer une cible privilégiée dans l’application sélective de ce regrettable arrêté.
Dans les débats politiques en France le sujet de l’immigration est devenu un fantasme qui suscite des agitations et des excès. L’immigré africain-musulman est devenu un fonds de commerce électoral, un bouc émissaire, une proie facile, sans défense, qu’on n’hésite pas à abattre froidement et lâchement pour gratter des points d’audimat, booster son indice de confiance, ou bichonner son électorat néo-fasciste. Florian Philippot, vice-président du Front national, est la tête de file de cette bande de braconniers qui a besoin d’abattre de l’africain pour asseoir son existence politique. Mais l’africain d’aujourd’hui ne se laissera pas faire.
Aliou TALL
Président du RADUCC (Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen)
Paris - Dakar.
Email : raducc@hotmail.fr